Souto de Moura à l'Arsenal
Eduardo Souto de Moura était présent hier au pavillon de l’Arsenal pour présenter ses nouveaux projets, pétris de poésie et de contradictions comme on les aime.
Démarrant sur une discussion de comptoir à propos de la décadence, Eduardo nous emmène dans son monde où tout semble permis, du remblai en matière plastique au découpage de maison, avec plus ou moins de réussite. En effet, si l’on admire facilement sa poésie, héritée de Mies, son manque d’intérêt pour les problématiques environnementales plus contemporaines l’éloigne des nouvelles générations.
A défaut d’une thématique précise - le Pritzker portugais nous a présenté ses dernières réalisations et projets, pour la plupart non publiés - différentes thématiques sur la production architecturale sont apparus au cours de la présentation.
Sa filiation avec Mies Van der Rohe pour commencer, qui est éblouissante dans sa maison en verre sur pilotis, et que l’on retrouve dans l’ensemble de sa démarche qui s’appuie sur la construction de la forme et la recherche des moyens les plus adaptés que chaque époque met à notre disposition pour y parvenir. Ces moyens techniques peuvent se révéler déroutants, quand il utilise des matières plastiques en remblai pour recréer un paysage naturel au-dessus d’un bâtiment (Barragem Foz Tua). Sa poésie est alors plus proche de Julien Blaine que de Marceline Desbordes-Valmore, à laquelle il nous a habitués (chapelle vaticane pour la biennale de Venise 2018 ; Artestella…), malgré ses positions difficiles à tenir dans le contexte contemporain. Ainsi, pour la construction d’un hôtel (Bibios), il prévoit de raser une colline afin d’améliorer la vue, tout en dessinant un édifice auto-suffisant. Ainsi, il prétend que l’architecture et la nature se combattent même quand il se montre préoccupé par la cause environnementale. Cette opposition peut également être génératrice d'espace serein, comme pour le mémorial de Pedrograo Grande, où il retranscrit l’émotion suscitée par l’incendie en une subtile composition de pierre, de métal, et surtout d’eau, symbole de la renaissance après le désastre. Son architecture relève alors du service social, pratique et pragmatique. Son incursion dans le domaine de l’urbanisme est assez limitée sur les projets présentés ce soir-là, et à défaut de révéler un véritable parti pris spatial, ces travaux (Entrecampos) illustrent la difficulté de mener à bien les projets avec les jeux d’acteurs complexes et internationaux (portugais, brésiliens, chinois…).
Enfin, c’est avec un petit projet d’agrandissement d’une maison traditionnelle à Macao (Quintes) qui nous surprend par le soin qu’il apporte aux œuvres du passé. En découpant subtilement la maison de manière à permettre son agrandissement, il parvient à créer un équilibre plus harmonieux que la version initiale, ce qui fera dire aux responsables locaux du patrimoine que la maison agrandie est identique à l’originale.