Transport aérien et médecine : deux façons d'appréhender les erreurs
Les erreurs sont appréhendées de manière bien différente dans le transport aérien et la médecine ...
L'avion est actuellement le moyen de transport le plus sûr. En 2013, on a dénombré un accident tous les 2,4 millions de vols. Mais cela n’a pas toujours été le cas. En 1912 (en temps de paix …), plus de la moitié des pilotes de l’armée de l’air américaine sont morts dans un "crash".
D’après Matthew Syed, les progrès du transport aérien en matière de sécurité s’expliquent par la manière dont les compagnies aériennes et les constructeurs aéronautiques appréhendent l’échec. Tous les avions sont équipés de deux boites noires quasi-indestructibles. L’une d’entre elles enregistre les instructions que l’équipage donne à l’appareil. L’autre enregistre les conversations et les bruits dans le cockpit. En cas d’accident, les boites noires sont ouvertes et leur contenu est analysé. Une fois que les causes de l’accident ont été identifiées, elles sont rendues publiques. Les procédures utilisées par les compagnies aériennes du monde entier sont alors actualisées pour éviter qu’il ne se reproduise.
Aujourd’hui, on a beaucoup plus de chances de mourir lors d’une opération médicale de routine qu’en prenant l’avion. D’après une étude publiée dans le Journal of Patient Safety en 2013, 400.000 personnes mourraient chaque année aux Etats-Unis à cause d’erreurs "évitables" (mauvais diagnostic, utilisation de mauvais traitements médicamenteux, complications post-opératoires, etc.). Pourquoi les médecins commettent-ils autant d’erreurs ? La complexité y est pour beaucoup. L’Organisation Mondiale de la Santé a répertorié plus de 12.000 maladies différentes. Les médecins sont constamment sous pression et les hôpitaux sont surchargés. Mais il y a une autre explication. Par peur de perdre leur crédibilité, de nombreux médecins rechignent à reconnaître leurs erreurs. C’est dommage car la plupart de ces erreurs se ressemblent. Avec plus de transparence, leurs causes pourraient être identifiées et des procédures pourraient être mises en place pour les éviter … un peu comme dans le transport aérien.
Comme l’a bien résumé Chesley Sullenberg, le pilote qui a miraculeusement réussi à atterrir sur le fleuve Hudson en 2009 : "Tout ce que nous savons dans le domaine de l’aviation … nous le savons parce que quelqu’un, quelque part, est mort." Apprendre de ses erreurs est le meilleur moyen de progresser. Mais pour cela, il faut commencer par les reconnaître …
Source : Syed, M. (2015). Black Box Thinking: Why Most People Never Learn from Their Mistakes--But Some Do. Penguin
Pour aller plus loin : Tout ce que vous savez sur le management est faux (paru chez Dunod en juin 2019)
Directeur d'agence Multisite chez Caisse d'Epargne d'Auvergne et du Limousin (CEPAL)
4 ansCédric Magnier l article dont je te parlais