Partie 1 : Ubérisation, homme amélioré/augmenté, transhumanisme… : comprendre la révolution en cours avec un philosophe actuel, Luc Ferry
Nous en conviendrons tous, l’époque à laquelle nous vivons est complexe. Des tendances de fond, dont la fulgurance de la progression est l’une des caractéristiques, dessinent un monde nouveau dont nous avons du mal à voir à quoi il va ressembler. Ce que nous pressentons, c’est que ce que nous vivons est bien de l’ordre de la rupture, de la révolution. Un monde ancien est en train de s’en aller et ses façades traditionnelles vacillent sous la pression d’un monde nouveau dont l’arrivée semble d’autant plus inexorable qu’elle est, encore une fois fulgurante. Nous vivons une crise, sans aucun doute de civilisation, où les structures existantes se battent pour ne pas disparaître. Le combat est d’ordre tectonique : la crise est violente, l’accouchement (mais de quoi ?) se fait dans la douleur.
Le résultat, pour nous, c’est que nos repères traditionnels disparaissent peu à peu et ne nous suffisent plus à comprendre les évolutions en cours. Disons-le, pour beaucoup d’entre nous le monde dans lequel nous vivons est difficilement compréhensible et face à ce qui se déroule sous nos yeux et à ce qui nous attend, certains sont résolument optimistes mais il faut bien le dire, l’immense majorité est inquiète et se pose, confusément des questions.
J’avoue pour ma part, osciller entre inquiétude et profonde excitation. Mon inquiétude naît du fait que je suis persuadé que nous vivons une crise de civilisation due à une 3ème révolution industrielle : un monde ancien est en train de s’en aller tandis qu’un monde nouveau arrive et cela ne se fera pas sans pleurs et grincements de dents. Mon excitation, elle, vient du fait que je suis, pour ainsi dire par nature, émerveillé devant tout ce que l’homme est en capacité d’inventer. Plus que tout autre espèce vivante, l’homme est capable de modifier les données de son existence plutôt que de la subir, mais est-ce toujours pour un mieux ? Les progrès de la science m’émerveillent et en même temps, depuis l’invention de l’informatique l’accélération est tellement incroyable : tout va vite, de plus en plus vite. Je ne sais pas toujours quoi en penser. Ai-je même le temps de penser ?
En France, et c’est une chance, les médias accordent une large place aux philosophes. En effet, il est pour nous difficile de nous extraire du quotidien et de l’accomplissement de tâches de plus en plus nombreuses et rapides (et c’est une conséquence négative de cette 3ème révolution industrielle) pour prendre du temps à réfléchir aux évolutions du monde, à ce qu’elles ont de positif ou de négatif, s’il faut les encourager ou s’y opposer, s’il est satisfaisant de conserver un statut d’observateur passif ou s’il faut au contraire monter dans le train et vite. Et quand nous prenons le temps de le faire, seul ou avec d’autres, il faut bien avouer que la complexité produit bien souvent de la perplexité quand ce ne sont pas des opinions aussi peu fondées et utiles qu’elles résultent d’une réflexion indigente et hâtive. Les philosophes, font profession de prendre du temps pour réfléchir et nous livrer le fruit de leurs réflexions. Et quand ils le font, nous pouvons alors partager ou non leurs analyses mais ce qui est certain, c’est qu’elles nous permettent de progresser dans la réflexion pour mieux comprendre ce qui se passe, notre « être-au-monde-qui-change » en quelque sorte.
C’est ainsi qu’au cours d’une rediffusion de l’excellente émission littéraire de Jean-Pierre Elkabbach intitulée « Bibliothèque Médicis » (diffusée sur la chaîne Public Sénat, tous les vendredis soirs à 22h et enregistrée dans la bibliothèque du Sénat), j’ai entendu Luc Ferry parler de son dernier ouvrage : « La révolution transhumaniste : comment la technomédecine et l’ubérisation du monde vont bouleverser nos vies. »
Je me suis alors dit que cet ouvrage allait me permettre de comprendre un peu mieux les évolutions actuelles de notre monde.
Et la première chose que j’ai ainsi apprise de Luc Ferry dès les premières pages, c’est que les mutations en cours de notre monde étaient le fruit d’un courant de pensée appelé, précisément, le « transhumanisme ».
C’est parce que cet ouvrage m’a paru éclairant que je me propose de vous en dire plus dans un prochain article ! A suivre donc… !
Guy Fontaine