Un marin dans le désert
Il nous arrive souvent de nous sentir hors du temps et de l’espace, décalés dans notre environnement, perdus dans le besoin de nous rendre utiles, d’avoir un emploi gratifiant et, sans aucun doute, bien rémunéré. Nous sommes des professionnels de plus de 55 ans, hypocritement qualifiés de « seniors », un préjugé qui cache la réalité : pour de nombreux recruteurs, nous ne sommes plus désirables. Le plus triste est que ces mêmes recruteurs continuent de nous leurrer avec leurs tactiques habituelles, en évoquant des « compétences transversales » et d’autres euphémismes, tout en nous proposant des formations qui, malgré tout, ne nous mèneront pas à un emploi.
La vérité est que, sans une véritable nécessité (être le seul candidat) ou un contact réellement influent, nos chances sont minimes. Il existe un cadre dans lequel les responsables des ressources humaines se cantonnent, se sentant en sécurité, et n'engagent que des profils qui s'y insèrent parfaitement. C’est compréhensible : personne ne veut prendre de risques, et la continuité est synonyme de sécurité, avec le « statu quo » tant vénéré en Europe.
Devons-nous nous résigner, accepter la réalité de l’immigrant, nous consacrer au nettoyage ou à la prise en charge de personnes encore plus âgées que nous ? Devenir les « parias » de cette société qui écarte les seniors, tout comme les anciennes sociétés néolithiques abandonnaient leurs aînés incapables de chasser ou de pêcher ? Absolument pas.
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Notre longue-vue de marin est encore utile, et naviguer entre les dunes est très semblable à naviguer en mer : vaste, rempli de dangers mais aussi d’opportunités. Nous passons de loups de mer à experts bédouins, forts de notre expérience et de notre flexibilité, qui, alliées à notre besoin, font de nous des survivants.
Sur le marché du travail, les « étoiles » sont les membres de la génération Z, entre 30 et 40 ans, parfaitement adaptés aux attentes actuelles. Les milléniaux commencent également à s’y insérer progressivement. Tous deux évoluent dans une réalité créée par les baby-boomers et notre génération X, sans l'urgence de bâtir une carrière ou de trouver un emploi stable. Ils sont les enfants de l’abondance. C’est là que nous nous distinguons : notre réalité est plus exigeante, plus difficile, mais aussi plus urgente.
C’est pourquoi nous devons affiner notre stratégie, ne pas laisser la défaite nous atteindre. Acceptons peut-être des rémunérations moindres, mais sans rancune ni tristesse. Soyons solidaires avec nos collègues, et nous atteindrons le succès tant espéré : un emploi où nous nous sentirons utiles, compétents et épanouis, comme le veilleur qui aperçoit enfin la terre ferme et guide le navire vers un port sûr.
Spécialiste de l'audit interne, contrôle interne et des risques avec plus de 20 ans d'expérience ayant travaillé dans des secteurs très variés.
1 moisMerci beaucoup Pablo pour cet excellent papier, admirable dans son analyse pertinente et si juste. La résilience à développer pour faire face à ce fléau actuel, aussi lâche qu'hypocrite est une arme parfois difficile à pérenniser sur le long terme....la patience du candidat "senior" comme solution face à ce biais du recruteur trouve souvent ses limites....