Un nouveau terrain de jeu professionnel adapté à nos aspirations individuelles ?

Un nouveau terrain de jeu professionnel adapté à nos aspirations individuelles ?

C’est une certitude : les cadres et le monde du recrutement se souviendront de 2017 comme étant une année de transition, de reprise économique et surtout une année de chamboulement des pratiques !

Cette analyse n’a aucun lien avec les élections présidentielle et législatives, avec la réforme du code du travail en cours, et encore moins avec les recrutements astronomiques dans le monde du football ! Nous sommes simplement à la fois dans une économie en mouvance (enfin !) - qui vient impacter positivement les investissements et les projets d’entreprises -, et dans une période de modification des codes, des attentes et des ambitions des salariés. La nouvelle génération influence d’ailleurs nettement ces tendances. Tout un sujet qui s’accentue d’autant plus durant une période estivale, propice aux réflexions et aux remises en question professionnelles et individuelles. D’où cet exercice d’écriture à la rentrée des classes.

Adieu la crise… bonjour l’emploi ?

C’est donc un fait : le travail temporaire bat des records, la création d’emplois monte en puissance (plus de 90 000 postes créés lors du second trimestre dans le secteur du privé), et le mot « croissance » a pris le dessus sur celui de « crise » ou de « difficultés économiques ». L’APEC parle même de 215 000 emplois de cadres créés en 2017 avec des prévisions autour de 236 000 pour 2019. Un record ! En parallèle, plus de 10 000 start-up ont été créées depuis 5 ans en France, dont 300 dans le domaine des services RH, afin de tenter de simplifier l’accès à l’emploi. C’est dire l’importance de cette thématique « emploi » et du champ des possibles pour l’optimiser.

Ceci se constate par un redressement dans le secteur de la construction, une hausse d’activité dans les services, et une hémorragie stoppée dans le secteur industriel. Les chefs d’entreprise se montrent plus optimistes, et les déclarations d’embauches explosent. Encore faut-il qu’elles se confirment réellement dans la durée et que cela corresponde à une croissance effective plus que temporaire. Soyons tout de même prudents, puisque ces chiffres sont calculés sur la base d’une croissance du PIB de 1,6% pour 2018. En parallèle, les secteurs de la Banque/Assurance ou du Transport ne mettent pas en avant des plans de recrutements massifs non plus ; à l’inverse de l’Informatique qui pèse un quart des recrutements prévisionnels de cadres.

Des envies de changements…

Nous pouvons sans aucun doute croiser cette tendance économique avec le comportement des salariés depuis début 2017, et une accélération de ces envies, constatée (majoritairement chez les cadres supérieurs) sur les périodes printanières et estivales. La météo (considérée comme un bon cru 2017 dans le sud de la Loire) n’est pas LE facteur clé, mais elle a joué favorablement sur l’état émotionnel des salariés et sur la remise en question de leur équilibre personnel / professionnel.

"Les régions françaises deviennent attractives, désirées et sollicitées."

Pour preuve, les sites emplois et les prestataires en recrutement ont pu constater une large augmentation des candidatures en régions dans le courant du mois d’août et début septembre. La dernière semaine d’août (semaine de reprise professionnelle pour beaucoup) est la semaine qui a connu le plus fort taux de lecture d’annonces d’emploi en région par les franciliens. Un exemple qui me concerne directement : plus de 500 candidatures reçues en seulement 3 semaines pour le recrutement d’un Directeur Général dans le grand sud !

Les cadres en poste, jusque-là frileux quant à une mobilité et une prise de risque, sont donc à nouveau dans une démarche attentive d’identification d’un nouveau projet professionnel et de vie. C’est en ce sens que les régions françaises deviennent attractives, désirées et sollicitées. En parallèle, et à l’heure des classements des villes les plus agréables de France, Bordeaux, Nantes et Lyon ressortent comme des villes dans lesquelles 83% des nordistes et franciliens souhaiteraient s’installer. 56 % se disent même être prêts à recevoir un salaire inférieur pour pouvoir s’installer hors de la région parisienne. Parmi eux, 58 % déclarent être capables de sacrifier 5 000 euros bruts annuel, soit 10 % de leur salaire moyen (source : Cadremploi). Temps de transport trop longs (c’est d’ailleurs une raison pour laquelle la métropole marseillaise recule dans les souhaits des salariés), coûts immobiliers et coût de la vie sont les raisons clés à ces volontés de changements des franciliens. Seul le volume de postes disponibles sera limitant pour accueillir tous ces salariés sur ces territoires. Les places sont chères !

Notre contexte de jeu de chaises musicales vient donc certainement de débuter pour présager d’un second semestre 2017 plus dynamique encore, et une année 2018 dans le même rythme, du moins je nous le souhaite.

Une nouvelle donne ?

C’est dans ce type de contexte économique et émotionnel que les salariés réfléchissent davantage à leur bien-être et à leur reconversion. 85% des français estiment que la reconversion professionnelle a du bon, mais plus de 60% l’envisagent difficilement (formations non adaptées et risque de perte de niveau de vie).

Prenons le cas de la nouvelle génération, quel que soit le niveau d’étude concerné, qui est en phase de repenser les métiers traditionnels et les métiers manuels, pour vivre en harmonie avec leurs pensées et leurs savoirs. C’est en ce sens que certains diplômés des grandes écoles sont en train de se reconvertir vers les métiers du bois, de la bouche, de l’aménagement extérieur ou encore dans les commerces de proximité. Quand nos générations les plus expérimentées connaissaient en moyenne 3 entreprises au long de leur carrière (et donc plus de stabilité), les moins de 35 en connaissent déjà plus de 6. « Je n’aime plus, je switche ! » « Je n’adhère plus, je quitte !» « Je n’apprécie pas les consignes, j’entreprends ! ».

"Une entreprise qui n’innove pas ne peut pas attirer les talents de demain et ne peut pas se différencier sur son segment."

Autre cas concret : alors que l’on mettait en avant la réticence au recrutement des seniors durant les 15 dernières années, cette tendance est justement en phase d’inversion. Prenons l’exemple des saisonniers : les séniors paraissent aujourd’hui plus fiables, plus fidèles d’une année sur l’autre et plus à l’écoute des clients. Alors que les moins de 25 ans (qui représentent toujours 48% des saisonniers) sont davantage exigeants, moins fiables et plus revendicateurs sur les horaires et notamment sur les conditions de travail. C’est un signe supplémentaire qui montre un retournement du marché, de l’emploi et de ses codes. Si on prend le cas des Etats-Unis, il n’y a jamais eu autant de séniors salariés par le passé (question de fiabilité, mais malheureusement aussi de nécessité de revenu supplémentaire du fait de retraites très faibles). C’est exactement le même constat pour les jeunes cadres, appelés la génération du « switch » et de l’immédiateté.

Je ne peux pas parler de transformation et de mutation sans utiliser le mot « digitalisation », parfois utilisé à outrance et sans réelle définition. Mais il faut être clairvoyant. Une entreprise qui n’innove pas, qui ne simplifie pas ou n’automatise pas ses tâches quotidiennes redondantes par le biais des nouveaux outils existants, ne peut pas attirer les talents de demain et ne peut pas se différencier sur son segment.

C’est justement ce concept de simplification de nos tâches qui se corrèle à cette nouvelle génération et à cette transformation du marché. Nos modes de vies, nos priorités et nos engagements évoluent plus vite que par le passé et ont même tendance à faire un pas en arrière sur certains principes. La société nous rappelle la priorité de la déconnexion (ne soyons plus dépendants de ces écrans tactiles !) et nous renvoie à nos priorités personnelles (moins de transport, plus de temps personnel, moins de stress professionnel). C’est d’ailleurs via cette fameuse expression du bien-être au travail (via le Great Place To Work par exemple) que nous valorisons désormais cette notion d’équilibre, d’épanouissement, de fierté et de sentiment d’appartenance. Sujets ô combien importants pour les DRH aujourd’hui au travers de la marque employeur et de l’attractivité des talents.


Nouveaux modes de pensées, transformation de nos emplois d’ici 20 ans (et non disparition comme certains l’évoquent), modifications des codes générationnels, nouveaux équilibres de vie, réorganisations des conditions de travail (télétravail, droit à la déconnexion, montée en puissance du freelance…) sont autant de facteurs de transformation de notre milieu professionnel et de la perception que nous en avons.

2017 est une année de bascule, tant pour notre économie française que pour nos comportements en milieu professionnel. C’est à nous tous de comprendre ces nouveaux enjeux pour une meilleure compréhension des priorités professionnelles de chacun. Ne parlons plus d’intelligence situationnelle ou de compétences techniques uniquement, mais considérons sans plus tarder les priorités individuelles et la capacité émotionnelle de chacun à savoir s’adapter à cette nouvelle donne et à ces nouvelles règles du jeu.

Caroline VILLECROZE

Business Coach | Transformation | Management | Stratégie | Performance

7 ans

Un article qui donne de l'espoir! Merci Stanislas! Et on est quand même pas mal à Marseille ;)

François GERY-FRIOUD

PDG ACMA PRO - Services à la Personne (91 & 92)

7 ans

constat très juste

Tanguy DANIELLOU

Fiabiliser vos DSN pour vos cotisations et les droits de vos salariés

7 ans

Très belle ode pour l avenir ! C'est une vision possible merci !

Guillaume Bézie PharmD-execMBA

ArtificiaI Intelligence for predictive and precision medicine I Partnerships & Business Development I Leverage Healthcare Data in Oncology Cardiology I&I Psychiatry ADHD

7 ans

Je pense que plus que jamais les fonctions RH, et plus globalement le secteur a l'opportunité de se saisir de ce sujet qui impacte et va impacter la performance de nos organisations. Des outils existent et se créent pour accompagner ce mouvement qui à mon sens devra être bottom-up et non plus top-down.

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