Vers la mesure de l'efficacité de la formation (1/2)
La nouvelle réforme de septembre 2018 est plus que les autres un grand bouleversement dans le monde de la formation. Mais cette fois au-delà des changements sur les modalités financières, les opérateurs de formations sont fortement appelés à se réformer par une accentuation de la qualité et de la certification à plusieurs niveaux. Le troisième niveau est encore au niveau des signaux faibles ou forts selon la lecture de chacun, mais il nécessite certainement une grande vigilance.
Préalable stratégique
Il me semble important de commencer par un rapide historique des signaux faibles et des signaux forts, concernant la veille stratégique des différentes lois que la formation continue à connue depuis 2003.
Certains débats sont souvent anciens dans le milieux professionnel, mais nous pouvons remarquer qu’ils finissent par être une lame de fond qui se transforme peu à peu en législation. Ce sont donc à un moment des signaux faibles qui se transforment en signaux forts et finissent en loi. Évolutions qui finissent aussi par avoir un impact stratégique accru chez les différents acteurs de la formation.
Premier exemple, la naissance du DIF. L’esprit du législateur était de rendre le salarié plus acteur de son parcours, en pouvant acheter des « petits morceaux de formations », mais aussi en négociant un parcours professionnel avec son employeur. Ces débats ont continué de réforme en réforme pour donner naissance à l’obligation de GPEC, à la démarche compétence et à la notion de blocs d’employabilités, aujourd’hui dans la définition de diplômes. En 2003, les entreprises qui avait une appréhension la moins négative du DIF étaient celle qui avait déjà une GPEC bien construire, en lien avec leur stratégie. Alors signaux faibles ?
Deuxième exemple, la démarche qualité. La certification était il y a quelques années imposée par certains donneurs d’ordres. C’était alors interprété comme un atout différenciant par certains et parfaitement inutile par d’autres. Nous voyons bien où la législation en est arrivée aujourd’hui et encore plus à l’horizon 2020.
Dernier exemple d’évolution d’idées, d’observation prospective du marché dans l’histoire récente, Le RNCP. Il était considéré comme parfaitement superflu par les organismes de formation certificateurs de différentes ministères. Là aussi, l’esprit du législateur à l’origine était de faciliter l’accès à l’emploi, la gestion des RH et la mobilité professionnelle. Nous voyons bien aujourd’hui que tout organisme peut désormais créer un diplôme et que le diplôme n’est plus un atout concurrentiel majeur pour les certificateurs d’état.
Il est donc important d’observer dans ces exemples, l’évolution de ces débats en législation pour appuyer la démonstration prospective qui va suivre sur la mesure de l’efficacité des formations. Elle peut apparaître aujourd’hui, comme un signal faible, un débat entre quelques professionnels, mais c’est une très vieille idée qui monte vraiment en puissance.
De signal faible à signal fort
Premiers signaux : L’évaluation à chaud et à froid des formations, mais également la mesure du retour sur investissement (ROI) est un débat récurent chez les responsables de formation depuis plusieurs années. D’autre part, la suppression du plan de formation dans la loi de 2013 a fait nettement passer un certain nombre de dépenses formations dans un contexte d’investissements RH. Dans le même temps, l’apparition du décret qualité a produit l’équation suivante : « investissement RH + qualité = Mesure de l’efficacité ». Mais comment ?
Second signaux : Notons l’évolution du rôle de plusieurs acteurs de la formation.
1) Les OPCA/OPCO qui ont depuis 2013 une fonction accrue d’acheteurs, de référenceurs de formations, ainsi que de contrôle ou garant de la qualité des formations de leurs adhérents.
2) Les responsables de formation en entreprises doivent de plus en plus prendre en compte la stratégie de l’entreprises pour fournir les bonnes compétences, au bon endroit, au bon moment. Ils sont conduits à négocier un budget de formation et à rendre compte de son impact ou de son efficacité.
3) Les organismes de formation, de leur côté, doivent prendre en compte ces nouvelles exigences. Ceci implique d’apprendre à démontrer la qualité, l’efficacité des formations, afin de mieux conseiller et accompagner leurs clients.
Tous ces éléments se confirment dans la réforme de 2018 avec une récurrence sans précédent du mot efficacité dans la feuille de route donnée par le gouvernement.
En conclusion de cette observation, notons que l’esprit du législateur s’oriente toujours plus vers la compétitivité des entreprises et la sécurisation des parcours professionnels. Ces deux objectifs provoquent l’émergence de deux comportements d’achats majeurs.
Le premier celui de l’entreprise, qui pour assurer le maintien et le développement de sa compétitivité achète de « l’employabilité immédiatement rentable » d’où une demande de retour sur investissement , d’efficacité de formation.
Le second, celui des salariés, qui achètent une sécurisation de leur parcours professionnel, une évolution de leurs compétences, en demandant une reconnaissance certifiée, le plus souvent prouvée par un diplôme.
Responsable qualité & Référente handicap de l'ENSAI
6 ansBonjour et merci beaucoup pour cet article très éclairant. Puis-je vous demander ce que signifie ici "divers degrés de certifications" ? En effet, les certifications qualité des organismes de formation et les certifications délivrées par la CNCP (qui a rejoint France Compétences au 1er janvier) ne sont pas la même chose.