Violences Hospitalières : vers un état des lieux.
Je vous invite à parcourir mon deuxième article en lien avec les risques psychosociaux sur le blog Management en Milieu Hospiatlier.
Un grand merci à Jean- Luc Stanislas pour son dynamisme époustouflant !
VIOLENCE(S) HOSPITALIERE(S) chapitre 1 : vers un état des lieux
Le secteur hospitalier n’est pas épargné par le risque psychosocial. Parmi les risques qui le composent, opérons un focus, le temps de quelques lignes, sur la VIOLENCE externe c’est-à dire celle exercée par des individus extérieurs des structures médico-sociales. En effet, le lieu où l’on prend soin est aussi le reflet de la dégradation socio-économique à l’origine de la flambée de la violence urbaine qui touche toutes les sociétés.
Etymologiquement, le terme « violence » prend ses racines dans une origine grecque « bio » signifiant « force vitale », « vigueur ».Empruntée au latin classique, la violence « violentia » désigne un "caractère emporté, farouche, indomptable". La violence, telle que définie par J. Bergeret, est naturelle et primitive, assimilable à l'instinct de survie, d'auto-conservation. Les actes de violence, dans cette acception, témoignent d'une résurgence de peurs archaïques, et constituent une défense en réponse à une menace de destruction de son être.
Dans un cadre plus actuel, le Bureau International du Travail (B.I.T) décrit la violence comme « tout incident au cours duquel des personnes sont victimes de comportements abusifs, de menaces ou d’agressions physiques dans les circonstances liées à leur travail, y compris sur le trajet entre leur domicile et le lieu de travail, et impliquant une remise en cause implicite ou explicite de leur sécurité, de leur bien-être ou de leur santé. »
L’Observatoire National des Violences en milieu de Santé (O.N.V.S) créé en 2005, a mis à disposition un outil de recueil des événements de violence pour offrir aux établissements publics et privés de nouvelles orientations : le logiciel NETSURVEY (janvier 2012).
L’ONVS fait la distinction entre : violence aux biens / violence aux personnes, et au sein de chaque catégorie, elle définit des niveaux d’agression selon l’échelle de gravité retenue par le Code Pénal :
- Les violences au bien : des vols simples, tags, dégradation jusqu’à des destructions lourdes, incendies, vol à main armée… (Braquage au sabre à l’hôpital de Trappes en décembre 2015 pour des comprimés de Valium)
- Les violences aux personnes : allant des injures sans menaces, nuisances mineures à des violences volontaires, pression psychologique, menaces avec armes par nature ou par destination, agression sexuelle et décès d’agents (Drame de Pau – Psychiatrie – Décembre 2004)
Il apparait comme un triste constat que la violence ne cesse d’augmenter régulièrement d’année en année. Les chiffres clés de 2013 montrent :
12 432 signalements d’atteintes aux personnes et aux biens (contre 11 021 en 2012), effectués par 353 établissements (contre 352 en 2012)
Géographiquement, l’Ile de France est la région la plus touchée, talonnée par la Picardie et la Basse-Normandie. En y regardant de plus près, les services les plus impactés sont : la psychiatrie, les services d’urgence et la médecine générale.
Dans 76% des cas, le patient lui-même reste l’auteur de violences signalées (les 24 % restant sont identifiés comme le personnel et les accompagnants) et dans 3 situations sur 4, les violences s’exercent à l’encontre du personnel qui majoritairement ne portera pas plainte. Les atteintes aux biens ne sont pas systématiquement signalées car elles font l’objet d’une déclaration auprès des assurances par un autre circuit ; quant aux atteintes aux personnes, elles sont davantage signalées en raison de l’impact psychologique qu’elles créent sur les victimes et la nécessité, notamment pour le personnel, d’utiliser l’Observatoire comme un outil d’information sur leurs conditions de travail et parfois sur la dégradation des relations patients/soignants.
Face à de tels actes, il apparait important d’identifier les principaux déterminants liés à ces conduites. On observe donc :
- Des facteurs endogènes : personnalité de l’agresseur liée essentiellement à la frustration, aspects biologiques (âge de l’agresseur, sexe, dysfonctionnement hormonal,…), profil de la victime
- Des facteurs exogènes : contexte socio-culturel, facteurs environnementaux (cadre de vie, sentiment d’appartenance à un groupe, défense de son territoire, influence médiatique,….), déclencheurs de violence (sécurité, mode de communication, identité,…)
Parmi les causes favorisantes prédominent : les délais d’attente souvent interminables, le manque d’informations reçu par les usagers, le manque de personnel et les conditions d’accueil.
Dans les nombreux cas recensés, il apparait que les causes à l’origine de violence sont multifactorielles et qu’une seule variable isolée n’est pas pour autant un facteur déclenchant.
Confronté à un temps de travail incertain, le personnel se trouve à pratiquer dans des conditions non-sécurisantes provoquant chez lui des réactions variées allant de l’incompréhension et l’humiliation à la culpabilité et la colère face à l’injustice de s’être fait agresser. De plus en plus d’agents se sentent malmenés dans leur posture de soignant car violentés par ceux qu’ils voulaient aider.
Un groupe de travail international a mis en avant des stratégies d’adaptation personnelles visant à affronter la vague de violence (stratégie de survie) ou à mettre fin à l’interaction difficile (interactions personnelles). Elles apparaissent selon cinq positionnements pouvant aller d’une attitude très passive à une action très énergique :
PASSIVE ACTIVE
Accepter Eviter Se défendre Négocier Se défendre verbalement physiquement
(Freeze) (Flight) (Fight)
(Source : conseil international des infirmières – Genève, 1998)
Dans les stratégies de survie, le personnel s’accommode de la situation ou la subit passivement. Pour les stratégies d’interventions personnelles, le personnel accepte la violence subie et la traite dans l’anticipation et la prévention d’autres formes de violence par la médiation ou la négociation.
En regard d’une violence souvent banalisée, aux conséquences parfois irréversibles, la responsabilité appartient à chacun mais plus particulièrement aux établissements qui se doivent de prendre en compte ces situations quotidiennes afin de garantir les meilleures conditions de travail possible à leurs salariés.
Chrystel ARTUS -
PSYCHOSOCIOLOGUE DU TRAVAIL
8 ansBonjour, très bon article qui tombe à pic et qui confirme l'accroissement généralisé des différentes formes de violences constaté dans touts les secteurs (au travail et hors travail, internes ou externes, etc..;..) qui ne sont pas , à mon avis, étrangères aux contexte actuel : conditions de vie sociale, de travail, insécurité socio-économique, dé-liaison sociale, pertes de repères etc; Il est très juste de rappeler que la violence subite ou agit n'efface pas la responsabilité des personnes même à travers les stratégies d'adaptation que celles-ci mettent en place pour la gérer; Cependant sur cette question je me permets de préciser deux points qui me semblent fondamentaux: 1- le violence n'est pas innée, mais acquise et souvent réactionnelle ; Elle ne peut être réduite à sa dimension psychologique (manifestations visibles), sauf dans le cas de la violence dite pathologique ( la violence sociale que la majorité d'entre nous rencontre est plutôt de nature sociale). 2-elle est souvent ''circulaire ou héritée '' le sujet violent à été lui-me victime de violences, le sujet de victime de violences pouvant devenir plus violent que son agresseur ''. A mon avis,l'approche la plus réaliste de ce ''RPS'' , puisque la violence en en est un, est donc celle qui remonte aux causes primaires (les conditions et facteurs) génératrice de celui-ci et ne se imite pas '' à son évitement ou à sa réparation'' ( niveaux secondaire et tertiaire).
Protection Rapprochée, Contractor
8 ansSuper ton article, Chrystel Artus