Vraie et fausse "récession" ...
S’attaquer sérieusement aux dépenses de l’Etat (et non pas à des sujets périphériques comme les « niches fiscales ») nécessite de briser un tabou majeur : baisser ces dépenses revient à déclencher sciemment une « récession ». En gros, le contraire de ce que font nos gouvernants depuis 40 ans, en courant tous après la « croissance », censée financer les dépenses de l’Etat et son déficit chronique.
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LE PIB CONTIENT
TOUTES LES DEPENSES INUTILES DE L’ETAT
En effet, toute dépense – même totalement inutile - de l’Etat rentre dans le PIB ! Citons en vrac les dépenses :
- Dirigées vers des investissements sans intérêt : travaux publics inutiles (beaucoup de ronds-points sur les routes),
- Rémunérant des travaux sans valeur ajoutée (dans le millefeuille « commune-communauté de communes-canton-arrondissement-département-région-état » de la fonction publique territoriale, dans l’Education Nationale, dans les « agences de l’Etat », les subventions à des associations sans réelle « utilité publique »),
- De « solidarité » mal placées et sans contreparties (RSA, CMU, …) qui rapportent plus à ceux qui les gèrent qu’à ceux qui en ont besoin (les SDF voient rarement la couleur du RSA + CMU + "DALO=>APL").
Dans ces conditions, il est tentant pour des politiciens à la recherche de voix lesd'augmenter la dépense publique sans limites : ils augmentent le PIB, et tant pis pour les impôts et la dette. Le gouvernement suivant y pourvoira ! On notera que ces effets sont conservés très concrètement même si le gouvernement embauche ostensiblement des gens pour faire des trous et d'autres pour les combler !
DIMINUER LES DEPENSES DE L’ETAT
REVIENT A CREER UNE FAUSSE « RECESSION »
Donc, par le miracle de la « valeur travail » (tout employé de l’Etat est réputé produire un PIB égal à sa rémunération), ou de l’« investissement » (tout rond-point inutile rentre dans le PIB) supprimer ce qui ne sert à RIEN provoquera une RECESSION. Cet effet de récession est immédiat (suppression d'un poste de fonctionnaire ou d'une commande publique = PIB en moins) et agit aussi directement et immédiatement sur le nombre d'inactifs (suppression d'un poste de fonctionnaire = 1 retraité ou 1 chômeur de plus).
Concrètement, cela n’a aucune importance si ce faisant, on réoriente ces ressources vers de la création de VRAIES richesses. Loin de tout concept idéologique fumeux, une VRAIE richesse est un produit ou un service qu’une clientèle solvable achète de son plein gré. Cela se mesure (à peu près) à l’aide du PIB marchand, dont personne ne parle actuellement … et qui diminue depuis des décennies dans le PIB global, en même temps que la dépense publique augmente ! Si davantage de clients achètent, l'effet est immédiat sur le PIB, mais agit nettement plus lentement sur le nombre d'actifs (les embauches viennent plus tard ...).
CETTE RECESSION
SERA COMPENSEE ET AU-DELA
PAR LA CREATION DE PLUS DE RICHESSES
Mais pour passer ainsi de la « dépense inutile » à la « dépense utile », on a besoin de plus de chercheurs, de chefs d’entreprise, de vendeurs de talent, d’ingénieurs, de techniciens, d’artisans et iI y en a pour plusieurs années d’efforts pour les former et leur donner les moyens et l’envie d’y travailler. Entre le moment où la réduction des dépenses publiques commence réellement et le redémarrage du PIB marchand, il y aura un « creux » du PIB non marchand, et donc du PIB global. Cela sera difficile à supporter par ceux qui vont passer d’activités improductives à des activités productives.
Charge à l’Etat de trouver les voies et moyens pour accélérer le redémarrage du « PIB marchand » – en clair augmenter l’efficacité de la lutte à court terme contre le chômage de masse actuel. Les moyens en sont connus – et appliqués très timidement par les gouvernants de 2015.
QUELQUES PREREQUIS FONDAMENTAUX
Pour permettre cette évolution fondamentale, et au-delà des notions philosophiques de « libéralisme » ou de « socialisme », il faut reconnaître explicitement quelques points simples mais « incorrects » et que l'on entend peu dans le discours politique :
- Une nation a besoin d’innover massivement en recherche fondamentale et au plan technologique pour être « dans la course » du XXIe siècle ;
- Le travail non qualifié ne vaut quasiment plus rien depuis 25 ans dans la société française et ne peut plus y être payé qu’à son prix (coût de l'automatisation ou de la suppression pure et simple). Il est donc interdit à un citoyen français d’être ou de rester « non qualifié ». Sinon, il aura de grandes difficultés à produire assez de richesses pour vivre décemment de son travail (sans forte aide de la collectivité) ;
- La dépense publique, hors fonctions régaliennes (armée, police, justice, …) doit prouver son efficacité (production finale de richesses – biens et services vendus à des acheteurs volontaires) pour être légitime.
Pierre TARISSI
N.B. : Quelques éléments de réflexion supplémentaires dans ces article des "Echos"...