Vu de l’intérieur : 5 clichés sur l’entreprise libérée…

Vu de l’intérieur : 5 clichés sur l’entreprise libérée…

L’entreprise libérée est un sujet qui fait couler beaucoup d’encre. Ce mode de fonctionnement intéresse des personnes de divers horizons : des chefs d’entreprises, des salariés, des consultants, des professeurs, des étudiants, des journalistes, etc. L’idée qu’un patron ne soit plus considéré comme un chef est interpellante et fait écho à de nombreuses personnes. Ce qui ressort du concept dans la presse ou dans ce que j’entends autour de moi est souvent très positif, notre expérience est perçue comme inspirante, enthousiasmante et innovante.

D’autres points de vue contraires s’expriment également : anarchie, effet de mode, happy washing… Et ce qui me surprend c’est que la plupart du temps, cela vient de ceux qui ne pratiquent pas l’entreprise libérée. C’est pourquoi j’ai eu simplement envie de vous faire partager ce que je vis depuis mon arrivée au sein d’inov-On.

Chacun son opinion et c’est bien normal que nous ne partagions pas tous les mêmes avis !

Certains détracteurs sont des personnes sceptiques vis-à-vis de ce que les médias rapportent de l’entreprise libérée, et d’autres peuvent se trouver chatouillés par le concept en lui-même.

Et heureusement que les sceptiques sont là ! Nous pourrions sinon baigner dans une soupe sirupeuse de bons sentiments sans aborder les difficultés qu’impliquent le fait de placer l’humain au cœur des entreprises.

Ce concept d’organisation bouscule notre monde établi issu de croyances passées, nées de la révolution industrielle, de nombreuses années d’habitudes et de hiérarchie pyramidale. Si le modèle a fait ses preuves à une époque où les salariés devaient produire à la chaîne sans avoir leur mot à dire, il se trouve que le monde du travail a sacrément évolué depuis le début du siècle. Bizarrement, il met du temps à se remettre en question d’un point de vue général…

RSE, RH, Communication interne, beaucoup de services tentent de s’adapter aux nouvelles générations qui sont de plus en plus exigeantes envers ce que leur apporte une entreprise et qui semblent être en quête de sens. Le mode de management et la place accordée aux collaborateurs sont en revanche primordiaux pour y répondre.

Chaque action mise en place pour prendre en compte les collaborateurs est certes importante, mais tant que la façon globale de considérer les employés n’est pas transformée (considération de la personne, responsabilités, rôles, parcours de formation, respect de l’équilibre vie pro / vie perso…), il y a sans doute moins de chances d’atteindre des résultats positifs à long terme.

Cette approche peut se retrouver dans d’autres fonctionnements que celui d’une entreprise libérée très certainement, mais je ne peux vous parler que de ce que je vis de l’intérieur actuellement.

L’entreprise libérée n’est pas un concept duplicable, mais un chemin que les entreprises empruntent, permettant à chaque collaborateur de faire grandir ses savoirs et d’exprimer son meilleur potentiel professionnel. L’essentiel est donc de responsabiliser les salariés en les considérant comme capables de prendre des décisions concernant leur activité, tout en les accompagnant dans la gestion de ces nouvelles responsabilités. On ne leur dit plus quoi faire, on les implique, on les laisse savoir quoi faire, tout en étant à leurs côtés.

Un an après mon intégration au sein d’inov-On aux côtés de l’équipe Fruizz (l’agence de communication décalée du groupe), j’ai eu envie de vous faire partager les réponses aux commentaires ou remarques que j’ai souvent entendues à ce sujet :

1.“Ta boîte, c’est celle où le patron a planté ses salariés du jour au lendemain pour faire le tour du monde !”

Alexandre Gérard a préparé le passage en entreprise libérée pendant près de deux ans avant d’annoncer à ses collaborateurs le fameux “saut en parachute”. Il a essayé d’anticiper au mieux son objectif en commençant tout d’abord par une grande phase de développement personnel puis celui de son “CODIR” de l’époque. Il a ensuite semé petit à petit des petites graines vers la libération comme l’abandon de ses signes de pouvoir par exemple.

2. “Dans ton entreprise, c’est l’anarchie, chacun fait ce qu’il lui plaît !”

Ce n’est pas parce que nous sommes libres et responsables de nos actions que nous pouvons faire n’importe quoi… Dans tous les cas, nous partageons notre quotidien avec notre équipe. Celle-ci est donc tout à fait en mesure de réguler les excès de chacun. Si jamais le laxisme ou la complaisance à outrance s'invitaient chez inov-On, nous saurions veiller au respect de l'engagement de chacun grâce au cadre dans lequel nous fonctionnons. Ce cadre repose sur notre vision (engagés ensemble pour un monde meilleur) et nos valeurs :

  • La performance par le bonheur
  • Équipe respectueuse et responsable
  • Cultiver l’amour du client
  • Ouverture d’esprit et esprit d’ouverture

Le rôle des Capitaines et Team-Leaders est de les faire vivre auprès de leur équipe.

Quand une équipe n’arrive pas à prendre de décision pour de mauvaises raisons, plusieurs services comme la Team Happiness (Ressources Humaines), le Pool (Assistants de Direction) ou la Team inov-On, les Co-animateurs du Groupe (PDG, DG et DAF) savent tout à fait l’encourager à se poser les bonnes questions qui feront avancer les choses. Pour résumer, nous sommes très autonomes et responsables mais si nous nous éloignons du cadre, l’entreprise n’hésite pas à nous le rappeler et prendre les mesures nécessaires.

3. “C’est bien gentil “libérée”, mais ça veut dire quoi, que mes salariés sont prisonniers, c’est ça ?”

Cela n’a rien à voir, mais je comprends que ce terme puisse choquer certaines personnes. Il correspond pour notre part à l’histoire personnelle d’Alexandre Gérard qui a eu le sentiment de vivre une vraie “libération” en transformant radicalement son entreprise. Notre mode de fonctionnement ne se limite en revanche pas aux structures se revendiquant “libérée”. Il peut se retrouver chez beaucoup d’organisations se disant  “responsabilisantes”, “collaboratives”, “ouvertes” ou autres appellations, certains n’ayant pas posé de nom sur leur transformation.

Ce terme ne se veut pas en opposition à une vision réductrice de l’entreprise sous-entendant une aliénation des salariés, mais est plutôt tourné vers un nouveau modèle d’avenir, agile et innovant orienté vers les compétences des collaborateurs et leur bon sens.

4. “Vous dites que vous n’avez pas de modèle applicable à toutes les structures, que chacun doit construire son propre chemin, mais ça veut dire que du coup vous n’avez pas de cadre ?”

Nous n’avons pas la prétention de décréter un fonctionnement type qui puisse convenir à tout le monde. Si le principe de l’entreprise libérée est effectivement universel, il nécessite cependant que chaque structure se construise individuellement pour coller au plus près des particularités de chacun et s’assurer ainsi de la plus grande réussite.

La caractéristique première d’une entreprise nécessite bel et bien des règles de fonctionnement. Les entreprises libérées n’y échappent bien évidemment pas. Travailler sous ce mode d’organisation implique tout autant, voire peut-être plus qu’ailleurs, de définir des valeurs, des principes indispensables de fonctionnement.

5. “À vous entendre, c’est le monde des Bisounours quoi ?!”

Surtout pas ! Tout est fait pour favoriser le bien-être des équipiers, le regard positif sur les autres est encouragé, les conditions de travail respectent le mieux possible l’équilibre vie pro / vie perso, mais ça ne veut pas dire pour autant que tout y est rose. L’humain occupant une place centrale dans l’organisation des entreprises libérées, cela entraîne comme ailleurs l’apparition de désaccords ou de conflits que nous sommes encouragés à résoudre par nous-mêmes dans un premier temps.

C’est pourquoi l’équipe RH (notre Team Happiness) tient à cœur de former les collaborateurs aux techniques de Communication Non Violente, telle que le Feedback, la régulation, la médiation, etc. Je trouve que la réussite d’une équipe passe forcément par une bonne communication et donc une belle collaboration. C’est ce qu’on appelle chez nous “la performance par le bonheur”.


Ce que je retiens de cette première année au sein d’une entreprise libérée, c’est que le sujet passionne autour de nous.

Nous essayons de nous aligner avec nos valeurs et notre vision construites collectivement. Chacun fait son bout de chemin comme il peut. Notre culture d’entreprise s’appuie sur la liberté, l’autonomie et la responsabilisation, dans l’optique de s’engager vers un monde durable... Un vaste programme qui nous donne de quoi faire chaque jour !

Travailler au sein du groupe inov-On, c’est s’approprier un fonctionnement assez atypique, mais qui me correspond complètement. Pour mieux vous le faire comprendre, je peux vous raconter comment se déroulent mes journées chez Fruizz :

Tout d’abord, je peux commencer par vous dire qu’aucune ne se ressemble ! En charge de la communication interne et externe du groupe (CHRONO Flex, inov-On Expérience, Fruizz...) je suis sollicitée par toutes les entités sur place, au siège de Saint-Herblain, ou à distance partout en France, ce qui donne lieu à beaucoup de rencontres entre collègues de visu ou en visioconférence.

Les journées sont intenses mais grâce au télétravail et à la souplesse des horaires, j’arrive à détourner les embouteillages et à apprécier le travail à la maison une fois par semaine. Ma semaine est souvent rythmée par un ou plusieurs ateliers collaboratifs (brainstorming, facilitations, flashcodev, etc) ou des sollicitations d’avis suivant les problématiques des dossiers à traiter. Le sérieux fait aussi place à la convivialité avec les petits-déjeuners d’anniversaires et tous les moments organisés par la communauté des Happyculteurs à laquelle je contribue.

Avec ce nouveau cadre d’entreprise libérée, j’ai repris goût à mon métier. Ma mission n’est pas de tout repos, mais le travail est désormais pour moi synonyme d’épanouissement professionnel, ce qui impacte également ma vie personnelle. Bref, pour ceux qui me connaissent, j’ai eu la chance de trouver ce que j’étais venue chercher, le bien-être au travail, et je vous souhaite à tous de trouver le vôtre !

Jean-Lou Fourquet

Co-auteur "La dictature des Algorithmes" | Membre de l'association Tournesol | Ancien chroniqueur Arrêt sur Images | Fondateur de la chaîne ApresLaBiere | Numérique | Journaliste | Vulgarisateur | Conférencier

5 ans

"L’entreprise libérée n’est pas un concept duplicable, mais un chemin que les entreprises empruntent" Merci Laurence Bastien - Richard pour ce chouette article / témoignage !

Philippe GUYONNEAU

Responsable Pôle Déploiement Projets chez VIF

5 ans

Éclairant et tellement vrai

Il est vrai que ce sont bien là les clichés les plus fréquents au sujet de l'entreprise libérée. Bravo pour cette belle synthèse. J'aimerais revenir sur le point 3 : " Pourquoi libérée ? Mes salariés sont-ils prisonniers" ? Je trouve votre réponse trop gentille pour l'entreprise traditionnelle. Le contraire de "libéré", c'est "soumis" et non "emprisonné". Dans l'entreprise hiérarchique, les personnes sont soumises, C'est indiscutable et contrairement à ce que vous dites, c'est un mode de relation aliénant. Revenons au sens littéral d'aliéner : "rendre autre". C'est bien l'effet le plus clair de la soumission. Les employés soumis ne sont plus eux-mêmes. Ils singent plus ou moins des comportements qu'ils s'imaginent être ce que l'on attend d'eux. Dans l'entreprise libérée, il leur est proposé le contraire : rester eux-mêmes, avec leur capacité d'initiative ; déployer leurs talents. Le plus beau, c'est l'évidente supériorité, sur le plan de la logique même de l'entreprise du mode d'organisation libérée sur celui de la soumission.

Evelyne G.

Coach Consultante en Développement Socio-Professionnel / Coach certifiée, spécialisée en gestion du stress et prévention des RPS / Facilitatrice

5 ans

Merci pour ce partage d'expérience Laurence, c'est un vrai bonheur de te lire... 🙏😉

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