Naked

Naked

Trois années se sont écoulées depuis la parution d’Eleven Songs, premier album d’Aliocha Schneider. Trois années durant lesquelles le jeune homme a beaucoup changé. « Il y avait autrefois quelque chose d’un peu juvénile dans ma façon de voir les choses : je trippais sur Bob Dylan et ma musique était très ancrée dans celle des années 60, comme pour faire contrepoids à la musique moderne que je jugeais alors insipide », raconte-t-il à Apple Music. Le vent a donc tourné. À 26 ans, l’auteur-compositeur-interprète, qui est également comédien depuis qu’il est enfant, délaisse sa guitare acoustique et ses inspirations folk pour embrasser des sonorités produites par des boîtes à rythmes, des pianos électriques, des synthétiseurs et un peu de basse. « Je me suis donné la liberté d’adopter un style plus moderne. J’ai aussi beaucoup travaillé sur ma voix et je crois que ça se ressent. » Intitulé Naked, cet album en anglais mise sur le dépouillement. « Je voulais quelque chose d’épuré sur le plan musical pour illustrer la quête de pureté et de simplicité qui guide les thèmes de mes pièces », explique le Montréalais qui prend le temps de nous les présenter une à une. The Party « On a sorti ce simple depuis un moment, un peu en guise de transition, pour annoncer la cassure dans ma démarche. Il marque un changement entre quelque chose de très doux et de plus sombre, et laisse aussi présager un côté plus fou. Dans le clip, on me voit arriver dans un party, tout sage, puis me mettre à danser sur les tables et à tout briser. » Peggy (Stone Breaker) « C’est drôle, parce que lorsque j’ai composé celle-là, c’était une chanson country que je n’aurais jamais mise sur l’album. Quelque chose est demeuré intact dans la façon de raconter l’histoire, mais sinon, tout a été transformé. Un groove de basse lui donne maintenant un côté plus soul. C’est aussi une pièce qui a une dimension un peu plus spirituelle que les autres. Je l’ai écrite d’après une vieille fable de Charles Péguy à propos de trois casseurs de pierres au temps des cathédrales. » Turn to Grey « Il s’agit d’une note à moi-même pour me ramener à la réalité si un jour je me trompe de chemin. J’ai toujours eu peur de céder à des compromis artistiques afin d’accéder au succès. Me retrouver dans la lumière, mais avec des idées qui ne me ressembleraient pas, ça n’aurait aucun sens. Ce serait comme un joueur de football qui lâcherait le ballon pour arriver plus rapidement derrière la ligne. » Naked « Je me suis attardé au mot “naked” (nu) pour dégager tout ce qu’il peut évoquer. Oui, il y a le désir et la sensualité, mais aussi la beauté des œuvres d’art, une part de vulnérabilité, une intégrité, une brutalité, quelque chose de sauvage, à vif. Bref, derrière ce mot, il y a tout un monde. Le résultat ne lui ressemble pas du tout, mais comme point de départ, je me suis appuyé sur un motif joué à la basse et inspiré par la pièce “Dreams” de Fleetwood Mac, en ajoutant de l’orgue et des flûtes. » Your Sex Is Perfect « J’ai beaucoup été influencé par la poésie de Leonard Cohen pour celle-ci. Au départ, c’était un peu un défi pour moi de faire une chanson sur le sexe qui serait à la fois explicite et sensuelle, mais sans tomber dans des clichés vulgaires ou trop fleur bleue. Elle figure aussi parmi les premières pièces qui ont été enregistrées, et qui m’ont un peu donné la marche à suivre pour les arrangements du reste de l’album. » I’m Gone « Il y a peu de chansons sur cet album qui parlent des relations amoureuses, mais celle-ci en est une. Parfois, quand on aime quelqu’un, mais que ce n’est pas réciproque, on s’accroche quand même beaucoup trop, jusqu’à ce que ce soit clair qu’il n’y a vraiment plus d’espoir. Même jusqu’à dépasser les limites de notre amour-propre. Cette chanson relate le parcours de quelqu’un qui, finalement, reprend le contrôle de la situation avant de sombrer. Et avec son côté presque trap, elle va sans doute être très l’fun à faire sur scène. » Forget My Blues « C’est un bon exemple de ce que je peux maintenant faire avec ma voix, car même si cette pièce est simple, elle représente un grand défi sur le plan vocal. Elle parle de quelqu’un qui nous fait du bien dans les moments de mélancolie ou de tristesse, à qui on dit de rester encore un peu. Comme dans la chanson “Juste une p’tite nuite” des Colocs, qui me fait pleurer chaque fois que je l’écoute. » Run Baby Run « Celle-là a été écrite juste après la parution du premier album, et je trouve que ça s’entend dans l’acoustique, et dans l’influence à la Nick Drake. J’évoque une étoile qui meurt pour parler d’une désillusion, de quelque chose qui nous guidait et qui s’éteint, nous laissant seul, sans direction. Comme sur plusieurs pièces de l’album, Charlotte Cardin a fait les accompagnements vocaux. Elle a un talent incroyable pour les harmonies. » Mixed Up « C’est la dernière chanson que j’ai écrite alors qu’on avait presque fini l’enregistrement. En m’inspirant de ce que Jacques Prévert a fait dans son poème “Cortège”, je me suis amusé à jouer avec les mots en changeant la place des qualificatifs. Ces nouvelles associations d’idées donnent lieu à des images surprenantes, parfois drôles, parfois dramatiques. » Moon « Cette pièce est également un exercice de style, mais musical. Au départ, son rythme était deux fois plus rapide, mais à l’enregistrement, on l’a ralenti et on a ajouté beaucoup de réverbération. Charlotte a aussi chanté dessus, mais sans directives, en improvisant. Tout ça a donné quelque chose de spatial, comme en apesanteur. Une ambiance où la conscience est comme enfumée et dans laquelle des pensées décousues ne font que passer. »

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