Ocean 2025 : urgence, coopération, prospective
Version longue de la Chronique du Futur n°45
La dégradation accélérée de l’océan mondial représente un enjeu majeur pour la survie de l’espèce humaine. En juin 2025 se tiendra, à Nice (France), la 3ème conférence des Nations-Unies dédiée à l’Océan. Que nous apprend une réflexion approfondie sur l’Océan, en termes applicables aussi aux organisations ? Quelles propositions peuvent en émerger ?
Urgence
L’océan mondial représente 70% de la surface terrestre ; un océan qui nous nourrit, nous oxygène, nous réchauffe et nettoie nos rejets. Mais surexploitation des ressources, pollution et changement climatique causent une dégradation telle qu'elle fait peser un risque existentiel sur la survie de l’espèce humaine.
D’ici 2050, la masse de plastique devrait excéder celle des poissons ; la mer se sera élevée d’une vingtaine de cm en France, de 25 à 30 cm dans le monde ; 30 à 50% des prairies marines, qui stockent 18% du carbone océanique, pourraient avoir disparu ; l’acidité de l’océan devrait augmenter de 12 à 26%, multipliant les zones mortes ; la population de méduse poursuivra son explosion ; la biomasse marine mondiale pourrait diminuer de 4 à 10% ; la circulation thermohaline poursuivra son affaiblissement, accélérant le changement climatique… (sources : GIEC et Natural History Museum).
En d’autres termes : il y a urgence ! La procrastination est désormais suicidaire. Or notre système actuel de gouvernance de l'océan est inefficace : les mécanismes de prise de décision sont trop longs, freinés par d'interminables compromis comme sur l'exploitation des fonds marins ; il n'a pas les moyens d'un véritable contrôle de l'application et du respect des décisions prises. Et l'urgence de protéger l'environnement et la santé humaine ne résiste pas aux intérêts économiques de l'industrialisation accélérée des océans.
Il est donc temps que la gouvernance mondiale (ONU, Forum économique mondial…) déclare un « état d’urgence » pour l’Océan lors de la prochaine Conférence de l'Océan en juin 2025. Celui-ci lui permettrait d'instaurer une gouvernance et des processus d'exception, comme en temps de guerre ou de désastre national. Si la Décennie pour l'Océan a déjà fait beaucoup pour la prise de conscience de cette urgence, il faut désormais passer au stade supérieur : celui de l'élaboration des solutions et des décisions afférentes à leur mise en oeuvre.
Coopération
Reconnaître l’urgence ne suffit pas en soi, mais c’est un premier pas - celui de la prise de conscience - qui permet de faire le second : accepter de coopérer plutôt que de se concurrencer. L’ampleur et la vitesse du phénomène sont telles que seules l’union, la coopération, la mutualisation peuvent nous donner une chance de l’endiguer. Par exemple :
Ainsi, nous devons efficacement mettre en commun les données et les moyens, réduire l'écart des connaissances entre les pays en développement et les pays développés (transfert de connaissances/expériences dans les deux sens, groupes de travail internationaux), et impliquer les populations locales, dont chaque citoyen peut être un agent de changement à son niveau.
Prospective
Nous ne pouvons pas affronter l'avenir sans y être préparés. Pourtant, notre incapacité collective à reconnaître le changement et à s'y préparer est évidente. Nous devons donc changer notre façon de penser et d'agir si nous voulons façonner l'avenir : adopter une vision systémique du monde, une approche proactive et une perspective de long terme. Pour être opérationnelle, la prospective doit s'éloigner des grands scénarios mondiaux pour s'attaquer à la résolution des problèmes locaux, sous l'égide d'une gouvernance anticipative.
L’ONU vient de faire un grand pas dans ce sens en introduisant la prospective dans les 5 compétences de pointe (UN 2.0 Quintet of Change) nécessaires pour moderniser le système onusien, avec les sciences du comportement, le digital, l’innovation et les data.
Le projet Ocean 2100 esquissé par l' Université Internationale de la Mer vise à contribuer à cet objectif en
Cette culture de l’anticipation, dotée d’une véritable compétence de prospective opérationnelle, est un instrument puissant pour affronter les défis de demain, comme ceux d’aujourd’hui.
Urgence-coopération-prospective : il est temps de passer à l’action !
Fabienne GOUX-BAUDIMENT, 23 septembre 2024 (publié dans la La Revue RH&M n°96 (janvier 2025)
Imaginer, organiser, réaliser...
1wIl y a 20 ans, les ressources maritimes étaient présentées comme inépuisables. Il est grand temps de ne plus croire tous les discours providentiels et de mobiliser systématiquement notre esprit critique. Et si le problème était l'exploitation, la croissance... Vivons simplement !
Thanks for the mention, Fabienne GOUX BAUDIMENT! We couldn't agree more that 2025 will be a pivotal year for cooperation — it absolutely must be.
Founder of eOceans® | Scientist | Inventor | Creating award-winning tools that help people and planet thrive.
1moThank you for your thoughtful post and insights! I'm eager to continue exploring synergies and leveraging eOceans® to enable real-time data analysis and fostering alliances at local to global scales, for our blue planet.
Vice président chez Société Française de Prospective
1moMerci énormément pour toutes ces chroniques consacrées à l'Océan... Avec les conférences sur les plastiques ,sur le droit de la mer , sur l'extractions des ressources minérales en eau profonde ,et surtout la Conférence de Nice .. l'année 2025 sera en effet celle des mers et des Océans .. Parmi celles et ceux ci la Méditerranée , dont l'avenir dépend plus que partout ailleurs des changements globaux et du développement durable de la région ( et des fleuves ) qui l'entourent .. Nous présenterons à Nice ( je parle du Plan Bleu ) l'exercice de prospective que nous venons de terminer sur la Méditerranée à l'horizon 2050.. Ce n'est pas particulièrement réjouissant mais rien n'est encore perdu si on agit à la mesure des enjeux futurs ..
Conseiller spécial de la présidence.
1moTrès utile