Toujours un pincement au cœur de mettre un point final à sa plaidoirie, d’attendre le verdict et de laisser nos clients reprendre le cours de leur vie, qu’on leur souhaite utile et heureuse.
Après 7 ans, « l’affaire Théo » vient de connaître son épilogue. Les policiers ont été condamnés. Aucun appel n’a été interjeté.
Cette procédure aura été une incroyable expérience pour le cabinet Vey & Associés. Au delà de l’expérience humaine et judiciaire, je partage avec vous trois réflexions.
▶️ la « qualification » des faits : c’est un débat mal compris qui a pourtant été au centre du dossier.
La mission des juges est d’appliquer le Droit et de « qualifier » juridiquement les faits. En matière criminelle, il existe de nombreuses qualifications, comme, par exemple, le meurtre et l’assassinat, qui n’ont pas la même définition et que la procédure vise à distinguer. Ici, les faits, d’abord qualifiés de « viol », ont été « requalifiés » en « violences ayant entraîné une incapacité permanente » puis en « violences ayant entraîné une incapacité ». La qualification a donc évolué, sur la base des expertises, nombreuses, des témoignages…
Ce qui compte, ce n’est pas de retenir la qualification la plus grave, mais la plus juste.
La règle de droit a donc été appliquée, et les accusés ont été jugés sur une qualification moins lourde que celle de leur mise en examen. Ce n’est ni une défaite ni une victoire. Simplement l’application du droit, démontrant au passage l’importance du respect de la présomption d’innocence.
▶️Spécificités des dossiers dits « de violences policières »
A aussi été discutée la neutralité des expertises réalisées par des experts appartenant au même « corps » que les accusés et la difficulté, pour la victime, de rapporter la preuve de ses accusations.
Ce point pose évidemment problème sur le plan de l’impartialité objective et plaide pour la création d’une autorité externe à la police, conformément aux recommandations du Conseil de l’Europe.
La question probatoire reste toujours au cœur de ce type de dossiers.
▶️Sanctions
Se pose toujours la question des justes sanctions.
Dés le départ, Théo et sa famille ont compris que, dans notre système, c’est aux juges de définir la peine, sur réquisitions de l’Avocat général. Ce n’est pas le rôle des parties civiles.
Cette acceptation est rare chez les victimes, et plusieurs médias ont ainsi relevé la dignité de Théo, et de sa famille, tout au long des débats.
C’est cette position de nuance et d’équilibre qui a été le fil conducteur de notre défense pendant toutes ces années.
Un combat qui a été mené, en équipe, dans le respect des individus et des institutions.
Désormais, nous avons un autre objectif, celui de l’indemnisation de Théo : le chemin judiciaire n’est (donc) pas encore terminé.
Merci à Théo et toute sa famille pour leur confiance.
Rédacteur Senior Ubiqus
2 sem.Remarquable chronique. Que Maître Dupond-Moretti ait pu (oser) plaider l'acquittement du frère de Mohamed Mera laisse toutefois songeur. La défense n'a-t-elle pas ses limites ?