Le miel en France
Avec des entrepôts pleins à craquer de miels importés, les négociants français refuseraient désormais d’acheter du miel français à un prix décent. Or, pour rentrer dans leurs frais, les apiculteurs doivent vendre au moins à 5 euros le kg le miel dit « de grande culture », c’est-à-dire de colza ou tournesol.
Pourtant, en magasin, le prix des miels importés est loin d’être bradé. On les retrouve en moyenne à 10 euros le kg et même jusqu’à 20 euros le kg. « Tout le monde est perdant : les consommateurs, les apiculteurs français, mais aussi les apiculteurs étrangers dont le travail n’est pas rémunéré à sa juste valeur.
Le syndicat paysan pointe également la levée des droits de douane sur le miel ukrainien depuis deux ans, une situation qui aurait accentué la tendance à l’importation.
Réduire le recours aux miels importés grâce à une meilleure information, c’est l’un des objectifs attendus de la directive européenne sur le miel, actuellement en cours de révision.
La France avait déjà pris les devants en imposant depuis le 1er juillet 2022 un étiquetage de l’origine du miel commercialisé. Mais cette nouvelle réglementation a rapidement montré ses limites, car elle ne s’applique qu’aux produits conditionnés en France. « Très vite, on a vu des contournements. Des opérateurs français ont conditionné leurs miels en Allemagne ou en Italie ». Dans ce cas, le fabricant peut se contenter d’afficher « mélange de miels originaires de l’UE » ou « mélange de miels non originaires de l’UE » sur ses étiquettes.
La directive prévoit une meilleure traçabilité des miels et la création d’une plateforme européenne d’experts. Objectif : lutter contre la fraude, l’autre grande problématique à laquelle est confrontée la filière apicole.
Une enquête publiée en mars 2023 révélait un taux très élevé de miel frelaté. Les méthodes d’adultération seraient de plus en plus sophistiquées pour échapper aux contrôles. « Il s’agirait, au mieux, de “nectar de fleurs immatures” ou de produits contenant une proportion significative de sirop de fructose de canne, de riz ou de maïs », note le SPMF qui estime que, compte tenu de l’importance des tonnages et du niveau très bas des prix, 100 % des miels indiens et 95 % des miels chinois seraient des miels immatures non conformes.
Si ce texte européen laisse entrevoir un meilleur contrôle du marché en Europe, le gouvernement français n’a pour l’heure encore fait aucune proposition concrète pour aider les apiculteurs en difficulté. Or, la future directive « miel » ne réglera pas tous les problèmes, avertit Muriel Pascal. « Il faut revoir tous les accords de libre-échange. On met les paysans des différents pays de l’Union européenne en concurrence. Or, nous ne sommes pas tous sur le même diapason en matière de normes sociales et environnementales », estime l’apicultrice lozérienne. Les éleveurs et éleveuses d’abeilles vont en tout cas continuer à mener bataille pour sauver leur activité.
Responsable de projets apicoles et installations
5 moisJe salue l'idée. La deuxième initiative serait de consommer le miel via des circuits locaux et court pour éviter les problèmes de traçabilité et d'adultération. Mais la fraude la plus mesquine reste celle de l'appellation florale intégrale, ou encore appellation florale imparfaite. Pour mémoire, le miel est un produit naturel, qui tient son caractère authentique au fait qu'il n'y a pas eu d'intervention de l'homme, mais surtout au fait qu'il est le résultat du butinage sur un périmètre et une zone géographique précise.