Évaluer la communication publique: de l'importance des indicateurs
Ce témoignage a été publié dans la dernière édition de l'ouvrage « Pilotez votre communication » (Thierry Libaert / Jacques Suart) aux éditions Dunod (juin 2019)
La mise en place récente d'indicateurs pour mesurer les effets de la communication publique de la ville et de la métropole de Rennes répond d'abord, et pour faire court, à des enjeux de légitimité.
Tout d'abord en interne, pour mesurer et étayer la valeur ajoutée de la communication dans la mise en œuvre des politiques publiques, tous secteurs confondus. Aujourd'hui, la quasi-totalité des productions émanant de la communication de Rennes (articles print et web, campagnes de communication, dataviz et vidéos, communiqués et dossiers de presse, activité sur les réseaux sociaux, etc.) est monitorée et analysée. Des bilans réguliers sont dressés des projets de communication, rappelant le contexte, les enjeux, les objectifs (partagés et validés par les commanditaires) et revenant, de manière visuelle et synthétique (sous la forme d'une newsletter dédiée), sur les résultats à date de notre intervention. Le tout est envoyé par mail, de manière ciblée mais néanmoins généreuse, à l'ensemble des parties prenantes, y compris les partenaires extérieurs intéressés au projet. Ce bilan global s'accompagne le plus souvent d'un récapitulatif exhaustif des retombées presse, qui complète la revue de presse quotidienne et thématisée, elle-même envoyée à un large fichier de correspondants.
Un autre regard
Les indicateurs alimentent donc en premier lieu une stratégie de communication interne visant à progresser en crédibilité, donc en efficacité et en légitimité, au sein de l'organisation. À provoquer un autre regard sur nos métiers, plus proche de nos réalités. Il va de soi qu'ils s'avèrent aussi de très bons outils de management, d'une part pour motiver les agents, d'autre part pour optimiser la répartition des tâches et des charges. La pratique montre aussi que ces bilans incitent les membres du codir à intégrer bien plus en amont la communication comme partie intégrante des politiques publiques. Enfin, last but not least, nos tableaux de bords nous servent de plus en plus à réorienter, parfois radicalement, nos propres réflexes ou routines de communication.
Une culture croissante de l'évaluation
Légitimation "externe" également, rendue d'autant plus nécessaire par la forte crise de défiance dont souffrent les pouvoirs publics, y compris locaux – même si ces derniers ont longtemps été épargnés et continuent à l'être davantage que leurs homologues nationaux. L'irruption de l'usager dans notre écosystème, via notamment les réseaux sociaux, a sans conteste fait émerger une culture de l'évaluation, qui a longtemps fait défaut à la communication publique. Toutes les enquêtes font remonter un besoin de services, d'information locale et de pédagogie sur les politiques publiques. Il est préférable de vite apporter des réponses précises aux questions posées, aux signaux faibles que nous pouvons déceler, dans un environnement où la surexposition aux messages réduit considérablement les possibilités de se faire entendre. Et, comme dans tout dialogue, le risque est grand – et la sanction immédiate – quand l'un des interlocuteurs ne se sent ni écouté ni entendu.
Éclairer les décisions
Traduction concrète: la multiplication des infographies pédagogiques, largement utilisées dans le rapport annuel d'activités, mais aussi tout au long de l'année les soirs de conseils, sur les réseaux sociaux, à mesure que les délibérations sont discutées et votées; ou encore la création de dataviz dynamiques, liées à notre plateforme open data, pour expliquer dans le détail la structuration des budgets ville et métropole (près de 20.000 visites depuis le 1er janvier 2019 et 20.000 pages vues sur https://dataviz.rennesmetropole.fr/budget/), mais aussi la formation au data-journalisme d'une partie de la rédaction, la création de rubriques "décryptage" et "chiffes-clefs" dans les magazines ou dans notre nouvelle appli d'information IciRennes (https://metropole.rennes.fr/decouvrez-ici-rennes), les vidéos sur-titrées de 30 secondes à la mode Brut, très friandes de statistiques et diffusées sur les écrans numériques de rue, etc. Bref, tout ce qui peut venir, de manière chiffrée et opposable, étayer les propos, éclairer les décisions, problématiser les orientations. Le tout mobilisable rapidement, pour alimenter une stratégie de conversation omnicanale, qui nous a conduits à multiplier les points de contact avec la population. Une manière d'accompagner les élus et les services dans leur démarche de co-construction des politiques publiques.
Laurent Riéra