2024 : ET MAINTENANT ?
Interview de Joël PONS – Président de Nouvelles Générations Européennes – 31 décembre 2023 à 09 H 55.
Joël PONS, la fin de l’année 2023 a été marquée par un accouchement particulièrement difficile d’un texte de loi sur l’immigration adopté majoritairement à l’Assemblée Nationale par 349 voix, après un parcours chaotique entre Sénat, motion de rejet, Commission Mixte Paritaire, saisine du Conseil Constitutionnel par le Président de la République lui-même et par le PS. Fallait-il voter cette loi immigration ?
Permettez-moi d’abord de souhaiter une très belle année 2024 à toutes et tous, et particulièrement à tous les abonnés de LinkedIn que je tiens à remercier pour leur fidélité, leurs nombreux échanges et commentaires en 2023. Espérons que 2024 sera une année de lutte contre les maltraitances infantiles et les violences conjugales, une année de respect des femmes et de leurs droits, des droits encore trop souvent bafoués par un machisme d’un autre temps. Par ailleurs, et comme la plupart d’entre nous, j’ai aussi une pensée particulière pour le courage des ukrainiens, défenseurs de notre Europe, pour les israéliens et leurs victimes du 7 octobre dernier ou leurs 129 otages toujours retenus par le Hamas, et pour les victimes civiles du peuple palestinien, ce peuple plongé dans la terreur de la guerre et dans une crise humanitaire inouïe. Restons surtout solidaires de l’Ukraine, continuons de faire pression sur Benjamin Netanyahu pour qu’il cesse enfin son offensive jusqu’au-boutiste et de plus en plus meurtrière dans la bande de Gaza, sans véritable boussole et dans le seul objectif de son maintien au pouvoir, et souhaitons surtout que 2024 soit l’année d’un retour aux négociations politiques et diplomatiques internationales, seules à même de mettre un terme à ces conflits, et de permettre de retrouver enfin le chemin d’une paix durable.
Pour répondre à votre première question, oui bien sûr, il était temps de voter enfin un vrai texte sur l’immigration. Pour trois raisons. La première, pour ne pas laisser un monopole idéologique et électoraliste au RN ou à LFI, qui ont construit leurs fonds de commerce sur cette seule thématique sociétale. La seconde, parce que l’immigration est une véritable problématique humaine et un enjeu transverse, essentiel et complexe. Un sujet majeur et urgent, celui qui nous concerne tous et qui, au même titre que le réchauffement climatique et ses conséquences de plus en plus prégnantes, mérite d’être traité sérieusement en légiférant tant en France, qu’en Europe (comme le vote du pacte européen sur l’asile et la migration), qu’au plan mondial. Il nous faut assurer un équilibre, une gestion rigoureuse, humaine, humanitaire et préventive devant ces flux migratoires de plus en plus importants et difficilement gérables, des mouvements de populations qui vont encore s’intensifier dans les années qui viennent. La troisième raison, et non des moindres, la nécessité d’envoyer un signal fort en direction de l’islamisme radical et du terrorisme international, en direction de tous les passeurs, les trafiquants, les marchands de sommeil et la délinquance clandestine, en leur rappelant fermement que notre mode de vie, nos lois, notre démocratie et notre laïcité ne sont pas négociables, par une application plus stricte de sanctions existantes, voire plus lourdes, tout en renforçant la surveillance de notre territoire et l’échange d’informations sensibles avec nos partenaires européens dans le seul objectif d’éviter le pire. Assurer en priorité la protection des français de souche ou non et celle de nos forces de l’ordre, régulariser une immigration déjà intégrée dans les métiers en tension, protéger une immigration à la dérive trop souvent à la merci d’exploiteurs de rêves qui la conduisent inexorablement à la mort, font partie intégrante de cette loi, véritable outil législatif de régulation, de prévention, de protection, de régularisation et d’intégration constructive et positive. Celles et ceux qui ont considéré à tort que le vote de la loi immigration constituait une victoire ou une revanche contre les immigrés, ne sont ni sérieux, ni responsables. Quant à celles et ceux qui resteront toujours figés dans le fameux « touche pas à mon pote » des années 80, définitivement aveuglés dans un déni de la réalité du terrain et du quotidien parfois insupportable des français, ceux-là continueront toujours de faire le jeu de tous les nationalismes et de tous les populismes, en prenant le risque majeur de les porter au pouvoir.
Vous l’avez rappelé, désormais le Président de la République lui-même et Olivier Faure, le Premier Secrétaire du Parti Socialiste ont engagé la saisine du Conseil Constitutionnel sur ce texte de loi. Restons persuadés que les sages sauront amender certaines dispositions qui n’entreraient pas dans le champ du respect de notre constitution, de celui des droits de l’homme ou du droit d’asile.
Doit-on s’attendre en 2024 à un remaniement ministériel et au départ d’Elisabeth Borne, la Première Ministre ?
On avait bien compris les limites et le handicap majeur d’une majorité relative à l’Assemblée Nationale pour le Gouvernement et le Président de la République, et cette nécessité pour eux d’utiliser toutes les ficelles constitutionnelles à leur disposition (22 fois le 49.3), tout en recherchant en permanence des alliances et des compromis souvent imparfaits. Mais là, je dois dire qu’on a atteint le summum de la tambouille politicienne à l’Assemblée Nationale, en nous replongeant pour un temps dans les méandres sans issue de la IVème République.
Cette régression n’augure rien de bon pour l’avenir du pays, pour l’image déjà très écornée des politiques eux-mêmes, et contribue par voie de conséquence à l’accroissement d’une abstention déjà en progression constante, celle qui pourrait atteindre un nouveau record aux européennes de juin prochain.
Désormais, Il n’y a pas trente six milles solutions. Soit on continue comme cela dans cet esprit de fatalisme inéluctable, en élargissant encore le boulevard de l’extrême droite de Marine Le Pen jusqu’aux portes de l’Elysée, soit Emmanuel Macron reconnaît enfin que le « Macronisme » a fait son œuvre et son chemin, constate objectivement les dérives de son parti Renaissance déchiré par ce « en même temps » devenu contreproductif et difficilement gérable, et consent surtout à préparer en responsabilité sa succession d’ici à trois ans et demi, en semant enfin les premières graines d’un grand rassemblement démocrate, social et européen, dans le prolongement de son programme « Révolution ». Le Président qui en a encore sous le pied, et qui a du pain sur la planche, doit provoquer un électrochoc politique d’ampleur et fixer enfin un nouveau cap réformateur, concret et compréhensible pour tous les français, par la mise en place nécessaire d’une forme de « coalition volontaire et naturelle », pour éviter une dissolution dévastatrice. « Coalition volontaire et naturelle » composée d’actrices et d’acteurs politiques majeurs de la droite, de la gauche et du centre, des alliés démocrates trop souvent délaissés, et pourtant tous engagés dans le même sens de l’intérêt général et de la concorde nationale.
Face aux grands défis qui nous attendent, comme la lutte contre le réchauffement climatique, la nouvelle révolution industrielle qui s’impose en conséquence, celle de l’intelligence artificielle (I.A.) ou la poursuite indispensable de la construction européenne, pour une Europe qui protège et qui agit, source de croissance, de paix, de prospérité et de justice sociale, le temps est venu pour le Chef de l’Etat de remettre au goût du jour le verbe « gagner », de le conjuguer au présent et au futur et de travailler en équipe sur l’avenir d’une France avec lui ou sans lui, une France à l’horizon 2030, voire bien au-delà.
Recommandé par LinkedIn
Une France qui gagne, c’est une France qui doit aussi se dégager de ce piège tendu en permanence par les idéologies caricaturales, simplistes et populistes des extrêmes conduites à des fins purement électoralistes, totalement mono-sujet immigration, et qui fracturent systématiquement notre pays. A l’extrême droite de l’échiquier politique, le RN, Reconquête et les Ultras réveillent et attisent un racisme sous jacent en distillant cette haine grandissante d’une immigration devenue la seule cause de toutes nos crises et de nos déboires, responsable de tous les crimes et délits perpétrés dans notre pays. Une immigration qu’ils considèrent comme dangereuse et « invasive » et qu’il faudrait « chasser » à vue et à merci. A l’extrême gauche, LFI qui prône quant à elle une immigration tous azimuts, la régularisation de tous les sans-papiers sans aucune limite, une immigration insoumise et radicalisée, poussée habilement à la guerre urbaine, et libre de bafouer nos lois, notre démocratie, notre culture ou notre laïcité, sous prétexte que la « Police tue » ou que le Hamas, soit disant en position de légitime défense, n’a rien d’un mouvement terroriste.
Alors vous comprendrez que dans un tel contexte, et pour répondre à votre question, même si Elisabeth Borne, la Première Ministre a su démontrer son courage, sa volonté et sa ténacité, tant dans la tempête des retraites, que lors des émeutes urbaines de mai dernier ou lors des négociations sur la loi immigration, elle n’a pas su trouver le bon chemin des alliances solides, équilibrées et majoritaires, pourtant la mission prioritaire que lui avait fixée le Président de la République. Désormais, elle n’est plus la mieux à même de répondre efficacement et surtout opérationnellement à l’impérieuse nécessité de provoquer cet électrochoc politique positif, démocrate et rassembleur qui s’impose aujourd’hui au Chef de l’Etat et que toute la France attend depuis la rentrée de septembre dernier.
Si remaniement il y a, et c’est désormais souhaitable, il doit être puissant, visible et lisible pour tous. Là où une fois de plus, un simple ajustement ministériel ou un petit jeu de chaises musicales aurait pour conséquences d’éteindre définitivement la fin du quinquennat du Président, alors dans l’incapacité totale de poursuivre ses réformes, et plongeant notre pays dans un nouveau chaos législatif dévastateur et particulièrement favorable aux extrêmes lors des élections européennes de juin prochain.
N’est-il pas déjà trop tard ?
Non, il n’est jamais trop tard, et un vrai sursaut politique positif dans l’intérêt général doit être une priorité avec un grand P. Un « nouvel élan français » pour relancer l’esprit de grandeur de la France et son image de grande Nation et de grande puissance en Europe et dans le monde, tout en mettant un terme à cette « sale période » d’anxiété, de peurs, de régressions, de violences, de recroquevillement, de crise du logement et du pouvoir d’achat, véritables injustices sociales, notamment pour les plus précaires, cette « sale période » qui tétanise les forces vives de notre pays depuis la crise sanitaire de la Covid-19, en nous faisant glisser doucement mais surement vers une France affaiblie, morose, immobile et verrouillée et une Europe fracturée, celles qui ne nous ressemblent pas.
Il nous faut retrouver l’énergie et le courage de faire face, de « positiver », de gagner et de redonner enfin un nouveau sens à notre vivre ensemble, aux progrès de notre temps, à notre vie française et européenne, à notre esprit de liberté, d’égalité, de fraternité et de solidarité, celui qui nous manque tant, et dont nous avons tous tellement besoin.
La jeunesse de notre pays est notre richesse d’aujourd’hui et de demain. A défaut de le faire pour nous, agissons pour elle…Maintenant !
Très belle année 2024 et souhaitons-nous de magnifiques Jeux Olympiques d’été du 26 juillet au 11 août prochain.