Architectes, urbanistes, promoteurs : osons la frugalité !
Trop. Trop forte consommation des ressources, trop d’émissions de gaz à effet de serre. Nous, acteurs de la ville, bâtisseurs, grands consommateurs d’énergie, émettons 40% des émissions de gaz à effet de serre. Nous portons une importante part de responsabilité. Nous devons changer notre manière d’aborder la construction de la ville. Une approche existe, qui peut nous y aider : l’innovation frugale.
Innover plus pour consommer moins
A ce rythme, l’équivalent d’un département en terres agricoles pourrait disparaître à cause de l’urbanisation, et ce tous les cinq à six ans, selon la FNSafer. Malgré ces chiffres alarmants, malgré les alertes régulières, notre modèle de développement reste le même : pour satisfaire notre besoin de croissance, nous construisons continuellement, sans penser à demain et au prix à payer, non seulement pour la planète, mais aussi pour notre qualité de vie.
« Nous entrons dans un monde de pénurie », écrit Navi Radjou, auteur de L’innovation frugale : comment faire mieux avec moins, puis il ajoute : « Vivre avec moins ne représente pas pour autant un sacrifice, cela peut être source d’innovation et même d’une meilleure qualité de vie ».
Été 2015. La Californie fait face à la sécheresse la plus importante de son histoire. Le gouvernement annonce la mise en place d’une mesure d’urgence : tous les habitants seront mis à contribution pour réduire de 25% la consommation d’eau pendant neuf mois. Au commencement, cela s’avère très difficile mais cet impératif écologique favorisera une série d’innovations fabuleuses sur le recyclage des eaux usées et le recours à des technologies agricoles.
L’innovation frugale, c’est répondre à un besoin le plus simplement et efficacement possible en utilisant un minimum de moyens. C’est de ce paradigme d’innovation là dont nous avons aujourd’hui besoin.
Certains professionnels du bâtiment et de l’aménagement du territoire l’ont bien compris : Dominique Gauzin-Müller architecte, Alain Bornarel ingénieur et Philippe Madec urbaniste ont co-signé un Manifeste pour une frugalité heureuse, dont le constat est clair : « Le maintien des solutions architecturales urbanistiques et techniques d’hier, ainsi que des modes actuels d’habiter, de travailler, de s’alimenter et de se déplacer, est incompatible avec la tâche qui incombe à nos générations : contenir puis éradiquer les dérèglements globaux. »
Et maintenant ?
Aujourd’hui, je vois plusieurs manières de mettre en pratique cette frugalité. La première : donner davantage d’importance à la rénovation, la modularité et la réversibilité des bâtiments en s’inspirant notamment du passionnant travail présenté cette année à la Biennale de Venise par Encore Heureux autour des lieux infinis pour déployer une nouvelle approche et permettre à la ville d’évoluer autrement ; une architecture infinie.
Point capital, et pas toujours bien traité, il faut mettre nos réalisations au service des usages sans opposer le beau et le fonctionnel, l’élégant et le performant. Certaines agences l’ont bien compris, en mettant les usages des habitants au cœur de leur conception des bâtiments, en faisant de la simplicité une force au service de la rationalité environnementale. C’est le cas de Diener & Diener et Clément Vergely sur dans notre projet « Ydeal » de la Confluence.
Ensuite, la primordiale frugalité des matériaux. Il faut privilégier le local et réduire les coûts de transports, comme nous le faisons en ce moment même sur notre projet New G : à l’échelle nationale, c’est le premier immeuble de grande hauteur en ossature bois d’essence local. Le recours aux isolants biosourcés est aussi une priorité, comme la terre crue, matériau ignoré tout au long du XXe siècle alors qu’il est recyclable et présente de nombreux avantages en matière de confort intérieur, particulièrement ses capacités de régulation thermique.
Prioriser une conception « low tech » et durable, en privilégiant un mode de construction bioclimatique, qui optimise l’utilisation – et donc les propriétés – des éléments naturels et du contexte du projet. Notre conviction est que l’on n’obtient pas de performances passives réelles, c’est-à-dire des bâtiments qui consomment très peu d’énergie, avec une stratégie unique que l’on soit en neuf ou en réhabilitation. Si, dans le premier cas, une certaine technicité peut être souhaitable (double flux…), dans le second cas, nous mettons en priorité l’accent sur les échanges de chaleur et d’humidité du bâtiment, la « perspirance », sur les microclimats générés par les dispositifs architecturaux, ce qui permet d’obtenir des performances passives sans recours à des dispositifs techniques.
Enfin, l’harmonie avec la nature. Mettre l’environnement au service du bâti ne suffit pas : l’architecture doit, elle aussi, être généreuse avec ce qui l’entoure. C’est le sens des initiatives de végétalisation qui se multiplient dans les villes. Nous sommes conscients de la nécessaire réconciliation entre nature et architecture et c’est avec la Compagnie de Phalsbourg notre ambition au travers de notre programme « Mille Arbres », qui couvrira une partie du périphérique parisien, porte Maillot. Une petite forêt peuplant l’immense toit terrasse du volume imaginé par Sou Fujimoto et OXO Architecture contribuera à purifier l’air ambiant, saturé de pollution.
Nous voulons promouvoir ce concept de frugalité, en nous engageant aux cotés de tous les acteurs qui participent à bâtir cette nouvelle nature de ville.
Porteurs d’initiatives, d’idées, de projets, parlons-en !
Responsable opérationnel du Réseau Français de la Construction en Paille
5 ansEnfin heureux de voir que ce que nous défendons depuis des années au sein de certaines associations d'écoconstruction, quelquefois pris pour de doux rêveurs, soit repris par des entreprises de promotion immobilière. Il était temps...
chez
5 ansL'Innovation frugale en architecture est louable et demande à être répandu dans toutes professions, les métiers, les entreprises, les écoles et comme mode de pensé chez tous habitants la planète terre.
Créatrice COLOC 7374-LMP-Décoratrice d’intérieur.
6 ansDonnons plus de sens et de raison à l'habitat des générations futures en optimisant la construction mais aussi les usages...
Tristan Agenet
Co-fondateur SAS My Private French Travel -actionnaire SAS la bulle verte -President de la fédération nationale réseau CREPI
6 ansVoilà un vrai menu !