Armelle Andro : "La question du genre est très présente dans les enjeux de santé"​
Crédit photo : Pascal Levy

Armelle Andro : "La question du genre est très présente dans les enjeux de santé"

A l’occasion de la #JournéeInternationaleDesDroitsDesFemmes, rencontre avec Armelle Andro , responsable scientifique de Paris Santé - Direction de la santé publique de la Ville de Paris , démographe spécialisée dans la santé sexuelle et reproductive des femmes et des populations vulnérables.

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Crédit photo : Pascal Lévy

 Quest-ce que le prisme du genre ?

C’est le fait de tenir compte, dans l’analyse des questions sociales, des différences et des hiérarchies qui existent selon le sexe dans la société. On sait par exemple aujourd’hui que le genre structure fortement le rapport à la santé, via les différences selon le sexe dans les expériences biologiques et sociales des individus. 

Quelle est la place quoccupe le genre dans la santé ?

Le genre influence la santé à plusieurs niveaux. Tout d’abord les différences corporelles entre les hommes et les femmes vont produire des pathologies différentes. Même si la majorité des problèmes de santé sont les mêmes pour les deux sexes, des différences telles que la corpulence peuvent modifier les risques de santé.

De plus, les hommes et les femmes n’ont pas le même rapport à la santé à cause de la socialisation différenciée selon le sexe. La différence d’espérance de vie entre les sexes est ainsi due à des différences de comportements ou de traitements vis-à-vis de soi et du soin tout à long de la vie. Les femmes ont de meilleurs suivis médicaux et consultent plus souvent que les hommes mais par ailleurs, certaines pathologies, comme les maladies cardio-vasculaires sont sous diagnostiquées chez elles.

Enfin, il y a des conditions de vie et des pratiques sociales qui sont traditionnellement très genrées. C’est le cas par exemple de l’activité professionnelle, de la consommation de tabac, d’alcool et de la prise de risque. Si les conditions de vie des hommes ont été historiquement plus délétères pour la santé, depuis les années 1960, les statuts et les pratiques des deux sexes se sont rapprochés et certains risques sont maintenant plus partagés.

Et dans la recherche médicale, le genre joue-t-il un rôle ?

Historiquement, la médecine est une discipline d’hommes et les savoirs médicaux qui en ont découlé se penchaient sur un individu neutre, mais qui s’apparentait par défaut à un homme. La plupart des personnes intégrant les essais cliniques étaient des hommes. Par conséquent, la mise sur le marché de certains médicaments s’appuyait sur des dosages conçus pour des corps à la moyenne masculine plus qu’à la moyenne féminine.

De plus, un certain nombre de pathologies ont pendant très longtemps été invisibilisées car elles ne concernaient que les femmes, c’est le cas par exemple de l’endométriose.

Comment la recherche a-t-elle évolué vis-à-vis de l'égalité des genres ? Et quest-ce qui est fait aujourdhui ?

La prise en compte des questions de genre s’est faite en parallèle de l’intégration de plus en plus de femmes dans le monde de la recherche au début du 20e siècle. Les thématiques du genre se sont ainsi révélées et intégrées à la production du savoir. Mais les femmes ont en réalité toujours été présentes en tant que petites mains invisibles ou partenaires intellectuelles dans l’ombre.

Aujourd’hui à l’université il y a autant de filles que de garçons, voire plus de filles dans certains domaines (en sciences de la vie, de la santé, de la Terre et de l'Univers). Il n’empêche que le plafond de verre dans la recherche existe toujours, il est même très solide dans certaines disciplines. Par exemple, dans les universités françaises, les professeures ne représentent que 33 % de l’ensemble du corps professoral.

Comment se positionne la Direction de la santé publique sur ces sujets ?

La Ville a depuis longtemps une politique volontariste sur la lutte contre les discriminations de genre dans sa politique RH et plus largement dans ses politiques publiques. Concernant la recherche, depuis 2006, chaque année, la Ville de Paris encourage les études de genre grâce à des bourses de recherche dotées de 10 000 € pour chacun.e des 2 lauréat.es. Ces bourses s’inscrivent donc dans la volonté de la Ville de promouvoir les politiques d’égalité et de contribuer à la diffusion des connaissances sur ces sujets.

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