Au secours du passé simple

Et si on supprimait le passé simple ? Voilà en gros la question dont j’ignorais même qu’elle avait été posée à un moment donné. Et pourtant ce point a bel et bien été abordé par certains sites et journaux voilà quelques années.


Rangeons les sujets professionnels pendant l’été !

Les congés d’été constituent une période propice à la prise de distance avec notre quotidien. Plutôt que d’écrire un article sur la comptabilité ou les méandres fiscaux de telle ou telle mesure, je me suis donc demandé ce qui constituerait le meilleur sujet à traiter pour bien démarrer le mois d’août. L’importance du Witcher 3 dans le monde olympique me paraissait une excellente idée, mais j’ai été sidéré au détour d’une lecture estivale : le passé simple est en danger.

Aucun texte alternatif pour cette image

Bien que le sujet ne soit pas de toute première fraîcheur, puisqu’il remonte à 2017, tout du moins dans la chronique que lui consacrait Muriel Gilbert. Au passage, je vous recommande vivement la lecture de ces 2 petits poches sur la langue française. De quoi déjouer des pièges ou apprendre l’origine d’expressions utilisées chaque jour, le tout sans mal de crâne !

Le sujet est en fait plus ancien, car on en trouve déjà trace en 2014.


Le cœur du problème

Il semblerait qu’un certain nombre de français seraient incapables d’utiliser et même de comprendre un texte comprenant du passé simple. D’où vient ce constat, de quelle proportion est-il question, quel est l’âge des personnes concernées ? Je n’ai rien trouvé à ce propos.

Mais les conséquences me paraissent effrayantes : certains éditeurs ont décidé de supprimer ce temps de leurs livres. Plus précisément, Hachette a fait retraduire le Club des cinq pour en expurger tous les recours au passé simple. Cette démarche qui m’a outré au départ est en fait ancienne et il s’avère que l’éditeur a constamment fait évoluer le texte. Au point d’en ôter des termes « compliqués » pour les remplacer par d’autres plus simples ou par des schémas. Alors :

-         évolution bienvenue pour s’assurer que le lectorat cible comprenne bien le livre OU

-         Symbole de notre temps qui consiste à niveler par le bas dès qu’une difficulté se présente ?

Je laisse à chacun le soin de répondre à cette question.


Un mal plus profond ?

Mais avant de lancer la pierre à Hachette, on peut se demander comment se fait-il que certains de nos compatriotes ne comprennent pas un texte comprenant du passé simple.

La baisse de niveau des élèves en français (et en maths) semble une constante année après année. Le COVID et le fait que les programmes, déjà quasi impossible à atteindre avant la pandémie sont maintenant des vœux pieux, est déjà un problème en soi. Mais le débat devient bien trop large pour pouvoir être traité dans un modeste article Linkedin.

En revanche, je suis allé rechercher ce que disent les programmes scolaires, notamment parce que Muriel Gilbert l’a mentionné, et il est précisé que pour le cycle 3 (CM1, CM2 et 6e) les attendus sont les suivants :

·       Mémorisation des verbes fréquents et des verbes dont l’infinitif est -er […] aux 3èmes personnes du passé simple.

Donc on conjugue au passé simple les verbes du premier groupe avec des sujets en « il », « elles » et « on » et leurs équivalents au pluriel. Si tant est encore une fois que le programme soit suivi et atteint ce qui est loin d’être la norme.

Quant au cycle 4 (du 5ème à la 3ème) l’attendu est :

·       Mémorisation des formes verbales : formes du passé simple […] des verbes fréquents (être, avoir, aller, faire, dire, prendre, pouvoir, voir, devoir, vouloir, savoir, falloir, valoir ; verbes à l’infinitif en -er).

Tout cela est consultable ici.


Alors que fait-on ?

Bon, indépendamment de l’avis de chacun sur le sujet, on va déjà arrêter de s’auto-congratuler sur les résultats du bac qui atteint des scores soviétiques alors qu’il s’agit d’un secret de polichinelle que les copies sont surnotées afin de le donner à un maximum de candidats. Quel est aujourd’hui la valeur de ce truc ? Bon ça c’est surtout pour Blanquer & co.

Pour les simples mortels que nous sommes, je pense qu’il est important qu’on prenne conscience de ce problème, qu’on privilégie les éditions qui n’expurgent pas le passé simple de leurs textes et enfin qu’on compense ce que l’éducation nationale n’a plus les moyens de faire en prenant le relais des enseignants (que je ne blâme absolument pas vu le peu de moyens qu’on leur octroie) sur le plus de sujets possibles.


Pour prolonger la question et sur l’intérêt de ce temps qu’on emploie peu, je vous recommande la lecture de cet article.

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