Bien utiliser les influenceurs: l'éclairage d'Olivier Moch, expert en communication

Quelle est la meilleure publicité dont une marque puisse rêver ou craindre ? Qui ou qu’est-ce qui peut influencer un achat ? Le bouche-à-oreille. La bonne réputation. On en veut pour preuve le succès grandissant des bloggueuses de mode devenues aussi célèbres et craintes que la « terrible » Anne Wintour.  C’est ainsi que, tout naturellement, ces bloggeurs(euses) et youtubeurs(euses) ont généré un nouveau métier : celui d’influenceur.  Techniquement, l’influenceur est une personne qui, de par sa position « médiatique » ou parce qu’il ou elle bénéficie d’une bonne notoriété vis-à-vis de son réseau, peut par ses publications influencer le comportement des consommateurs. Ce statut a forcément intéressé les marques qui en voient tout le potentiel…

Dans un monde parfait, on pourrait imaginer que l’influenceur se pose en « expert », suffisamment expérimenté et mature que pour décréter qu’il a raison de d’affirmer haut et fort ce qu’il pense. Diantre… A moins que ce statut nous « tombe dessus « tout simplement parce qu’on est « connu », « populaire », charismatique, etc. En vérité, il y a un peu de tout ça, et « tout ça » sous-entend une certaine subjectivité là où on aimerait de l’objectivité.  

Pour bien utiliser ce statut, il faut en connaître les réalités. Olivier Moch, notre expert en communication, nous apporte un bel éclairage.

>Qu’est-ce qu’un influenceur ?

« Un influenceur est quelqu’un qui, par sa notoriété, son métier, sa qualité d’expert reconnu dans un domaine où son exposition médiatique peut influencer les comportements commerciaux ou sociétaux du grand public, peut fédérer des masses autour d’une marque ou d’une action.

Nous sommes dans un univers ultra concurrentiel où chacun des acteurs commerciaux doit se positionner par rapport aux autres et capter rapidement l’attention des consommateurs afin de l’amener à poser l’acte d’achat de son produit. Pour se forger un avis ou poser un choix, une grande part de la population ressent le besoin d’être guidée. Les influenceurs ne sont pas apparus avec la technologie et les réseaux sociaux mais leur pouvoir d’influence me semble nettement plus grand parce que dans cette société d’ultra consommation, de plus en plus de personnes sont perdues dans la masse, face aux nombreux choix possibles… mais aussi parce que la renommée ou la notoriété sont des notions qui prennent de plus ne plus d’importance dans la pyramide des besoins de chacun d’entre nous… enfin la plupart ! »

>2° Que faut-il faire pour être influenceur ?

« Je crois qu’on ne peut pas dire : ‘’Je vais devenir influenceur !’’. C’est quelque chose qui ne se décide pas vraiment. On devient influenceur parce qu’on a travaillé pour. Soit pour développer une expertise réelle dans un domaine jusqu’à un point tel que les avis que l’on pose deviennent des références en la matière, soit parce qu’on est devenu un phare, une référence reconnue pour un public donné (une cible). Pour devenir influenceur, cela prend du temps. Il faut agir, poser des actes qui au bout d’un certain temps, par la récurrence, ferons que l’expertise, la notoriété, la reconnaissance s’installeront petit à petit et que le statut d’influenceur deviendra évident. Il faut aussi une bonne dose de charisme. Ceux qui pensent être des influenceurs parce qu’ils ont un blog, 5000 followers sur Instagram ou parce qu’une de leurs publications a fait le buzz sont dans l’erreur. Il faut d’abord qu’une légitimité s’installe et elle ne s’installe que par le travail au quotidien. On ne devient pas une référence avec un buzz, un blog (même bien construit) ou quelques milliers d’amis… »

>3 : Et ne pas faire ?

« La première chose à ne pas faire, à mon sens, c’est de se disperser ! Il faut segmenter ses domaines d’activités, et on ne peut pas être expert dans tous les domaines… Il est préférable d’apporter beaucoup de contenus de qualité sur une ou deux «niches» précises, des secteurs très spécialisés, plutôt que de se disperser trop… Je crois aussi que l’influence doit déborder du cadre des outils numériques. Les relations médias « traditionnelles » sont en pleine évolution mais elles existent toujours. Un influenceur efficace doit pouvoir aussi influer sur les médias, non pas les piloter dans une direction ou une autre mais bien obtenir une reconnaissance auprès des journalistes en tant qu’expert dans son domaine. Une erreur fréquente dans le chef des marques est de se tromper d’influenceur. De plus en plus souvent, elles choisissent un influenceur pour son nom, sans tenir compte de la réalité de la marque, de son public… Ce n’est pas parce que certains ont une portée qu’ils vont générer de l’engagement systématiquement dans tous les domaines. Comme évoqué plus haut, l’influenceur travaille dans des secteurs de niche, il faut qu’il connaisse parfaitement ses niches et les comportements du public de ses niches. Les ‘’grands noms’’ ne sont pas forcément les meilleurs influenceurs ».

4° Quelle est l’objectivité ?

« Vaste question ! L’influence est avant tout, pour les marques commerciales, une forme de promotion et ne repose donc pas sur l’objectivité. Pour beaucoup d’internautes, la publicité pure est dure n’est plus crédible. C’est pourquoi ils se tournent vers des prescripteurs dont ils attendent des avis objectifs. Pour un influenceur, perdre toute forme d’objectivité est donc un risque de perdre aussi son statut d’influenceur à court terme. Un vrai influenceur ne doit donc pas se positionner comme un publicitaire mais bien comme un utilisateur objectif de la marque, du produit ou du service… Ce n’est pas toujours le cas ! Evidemment, certains jouent sur leur nom, leur renommée et réclament des sommes importantes pour donner de l’écho à une marque dans leur communauté. Ce sont davantage des hommes ou des femmes sandwiches que de réels influenceurs. A l’heure du social media, les marques ont, je pense, davantage intérêt à faire appel à de vrais influenceurs qu’à des ‘’stars promotionnelles’’ car ça leur permettra, en plus de développer une visibilité certaine, d’améliorer leur produit ou leur service ».

 

5° Quelle est la ligne à ne pas franchir ?

« La première des lignes est légale. Il y a des lois en matière de réseaux sociaux, mais il y a aussi des règles ou des lois en matière de placement de produits… Par méconnaissance de ces lois, certains vont parfois trop loin ! Il y a aussi une limite éthique ou morale. Il convient de distinguer les deux l’éthique vient des normes de conduites établies par la société, tandis que la morale est établie par les normes de conduite d'une personne ou d'un groupe de personnes. Je pense qu’un influenceur doit se construire une ligne éditoriale adaptable à chacun de ses moyens de diffusion (blog, réseaux sociaux, communiqués…) et ne pas accepter d’y déroger pour une marque ou pour une action qu’on lui demande de soutenir. Finalement, parmi les premiers influenceurs, il y a les journalistes. Ils répondent à une ligne éditoriale… Les ‘’nouveaux’’ influenceurs doivent aussi, à mon sens, avoir une ligne conductrice de leurs actions et publications. Il existe, depuis peu en Belgique, un code d’éthique pour les influenceurs (www.belgianinfluencers.be/fr/code-ethique), il n’a pas de réelle valeur contraignante mais il a le mérite d’exister et d’avoir été créé par et pour des blogueurs, des vlogueurs et des influenceurs… C’est une excellente base de départ pour fixer ses limites et définir une ligne éditoriale ! »


 

 



 



Marie Ursula Bayou

+ 5 années d'expérience en gestion de projet | Digital Project Manager | Product Owner | UX /UI | Web Analyst | Tech Enthusiast

6 ans

Très intéressant et instructif

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