Bientôt la fin du CDI?

Bientôt la fin du CDI?

En France, un Contrat de travail à Durée Indéterminée a toujours été considéré comme une panacée.

Tout d’abord, il était la condition sine qua non pour accéder à un logement, qu’il s’agisse de le louer ou de contracter un prêt immobilier.

Plus important encore, dans ce monde moderne en perpétuel changement, il est encore perçu comme le seul rempart contre la précarité et l’incertitude, la seule garantie qu’il y aurait de la nourriture sur la table jusqu’à la fin du mois.

Encore aujourd’hui, il est difficile de trouver une location classique en France sans un CDI. Sans ce dernier, il faut avoir un garant lui-même en CDI qui sera prêt à payer les loyers.

Mais les banquiers devront s’adapter aux nouvelles réalités économiques s’ils souhaitent continuer à financer l’immobilier car il devient de plus en plus difficile de décrocher un tel contrat de travail. Bien que les salariés en bénéficiant soient toujours majoritaires, 87 % des nouvelles embauches se font désormais en CDD, selon les chiffres de l’année 2017.

Certains assouplissements ont été constatés, comme l’octroi des prêts aux intérimaires ou entrepreneurs… lorsqu’ils ont un coemprunteur en CDI.

Rigidité et contraintes signent la fin du CDI

Le CDI n’est pas seulement risqué pour l’employeur, car il ne peut pas être rompu en cas de difficultés économiques sans éventuellement des procès en justice. Il est également insuffisamment souple pour le salarié : les augmentations salariales ne sont pas obligatoires, les réaffectations à un autre service peuvent prendre des années et le préavis de démission peut s’étendre jusqu’à trois mois, rendant difficiles les changements d’emploi ou de carrière.

Dans un tel contexte, l'une des voies pour évoluer consiste à "court-circuiter" les initiatives des collègues ou des concurrents, au lieu de chercher un meilleur poste ailleurs. Les salariés bloqués dans leurs carrières souffrent en silence, abusent de tranquillisants et sont souvent en souffrance au travail.

La nouvelle génération Y, parfois baptisée « génération du zapping », ne s’intéresse pas à la stabilité et préfère varier les expériences en changeant constamment ses habitudes, qu’il s’agisse du travail, des lieux de vie ou des modes de consommation.

Cette vie nomade permet de faire des études ou de travailler pendant quelques mois à l’autre bout du monde, les contrats de travail ou de logement devant s’adapter à ce nouveau contexte. La nouvelle génération est parfaitement adaptée à la mondialisation car ses habitudes sont en perpétuel mouvement, tout comme les nouvelles technologies ou le comportement des marchés.

Jusqu’au début du XXe siècle, il fallait cent ans pour que tous les savoirs accumulés par l’humanité soient multipliés par deux ; après la Seconde Guerre mondiale, ils ont doublé tous les 25 ans.

Aujourd’hui, en 2022, la somme totale de toutes les connaissances accumulées par l’Homme double toutes les 12 heures.

Travail nomade et nouveaux métiers

En suivant la même analyse, il est facile d’imaginer le futur du marché de l’emploi – selon une étude du think tank californien Institute for the Future (IFTF), 80 % des emplois de 2030 n’existent pas aujourd’hui.

Comment alors imaginer une carrière de plus de quarante ans en occupant le même poste, ou en exerçant le même métier ?

Le nomadisme des travailleurs se reflète aussi dans l’aménagement de l’espace dans l’entreprise ; peu à peu, les « cubes » dans l’open space se voient remplacés par le we-space, où les salariés occupent un bureau disponible et branchent leur ordinateur portable pour travailler chaque jour à côté de quelqu’un d’autre.

Les managers dans certains grands groupes, comme BNP Paribas, déplacent les membres de leurs équipes d’un bureau à un autre, comme sur un échiquier, pour éviter qu’ils s’incrustent et favoriser ainsi leur mobilité.

Quand j’étais enfant, je lisais avec grand intérêt les histoires de Ray Bradbury, qui racontaient comment les robots allaient remplacer l’Homme dans le monde de demain. À cette époque, ces histoires paraissaient invraisemblables et fantaisistes, mais de nos jours, elles semblent se réaliser.

Aujourd’hui, le métro devient automatique et sans conducteur, les caisses du supermarché sont en libre-service, les banques sont en ligne et il n’y a plus besoin d’agences de proximité, le trading se fait par des machines, les livraisons se font par drones – eh oui, on en a déjà vu des exemples dans les cours de promenade de nos prisons…

Et pourtant, le démantèlement du CDI pour laisser place à l’automatisation et l’innovation ne signifie nullement qu’il n’y aura plus de travail pour les Hommes, bien au contraire.

La dactylographe d’antan a évolué vers le métier d’assistant bilingue et son métier s’est bonifié. De la même manière, les postes de conducteurs dans nos transports évolueront vers les services d’amélioration des réseaux.

Même les logements se sont adaptés à ces nouvelles tendances. Beaucoup de jeunes actifs se logent en auberge de jeunesse ou grâce à Airbnb en attendant d’acheter leur bien immobilier.

Se passer d’intermédiaires?

Prenons un exemple: dans une grande banque internationale, deux cadres sont recrutés pour un projet d’intégration de données dans un nouveau système informatique et occupent le même poste.

Le premier a été recruté par une société de consulting (SSII), il a signé un CDI. Sa prestation est facturée à la banque 650 euros par jour, il ne reçoit qu’un salaire mensuel brut de 3 333 euros, le reste étant encaissé par la SSII.

Le deuxième a créé son entreprise et facture à la banque les mêmes 650 euros par jour en tant qu’entrepreneur individuel, et reverse à la même société 10 % de son chiffre d’affaires, la banque acceptant de passer des contrats uniquement avec des prestataires référencés.

Multipliez ces 650 euros journaliers par 47 semaines travaillées par an et vous obtiendrez le chiffre d’affaires qu’un consultant en informatique peut obtenir en travaillant dans le secteur bancaire s’il choisit d’être à son compte au lieu de signer un CDI.

Comparez maintenant ce résultat avec ce que va recevoir son collègue titulaire du CDI au même poste. Le calcul est vite fait me diriez-vous? Il faut cependant pondérer cette analyse car le salarié reste mieux couvert en terme de maladie, assurance chômage et retraite

Il n’est pas toujours facile de se passer de tous ces intermédiaires qui gagnent des sommes colossales sur des prestations qu’ils ne fournissent pas en profitant de l’économie des petits boulots.

Des conseillers téléphoniques inexpérimentés basés dans une autre région organisent le déplacement d’artisans pour réaliser vos travaux, alors qu’ils ne se sont jamais rencontrés, et récupèrent 40 % de la somme totale facturée. L’artisan qui intervient à votre domicile ne percevra que 60 % de ce que vous aurez payé.

Des applications téléphoniques derrière lesquelles des loups issus d’écoles de commerce embauchent des chauffeurs pour conduire votre véhicule au garage et récupèrent 50 % de la somme que vous payez pour la prestation.

Tout ce beau monde qui vous met en relation avec un prestataire vous le facture à prix d’or ; le vrai prestataire, micro-entrepreneur précaire qui réalise le travail, ne perçoit qu'un revenu faible.

Demain tous travailleurs indépendants?

Nous sommes dans une période transitoire où l’économie des petits boulots n’est qu’à ses débuts, mais l’entrepreneuriat individuel va continuer de croître. Les différents intermédiaires deviendront de plus en plus obsolètes car la mise en relation pourra se faire directement et gratuitement sur le web, comme sur Leboncoin ou Facebook marketplace. L’avenir se trouve dans les applications ou les sites gratuits de mise en relation.

La fin du salariat et du CDI est déjà annoncé par les sachant . On nous annonce que demain nous seront tous des travailleurs indépendants, libres et exerçant diverses fonctions tout au long de notre carrière.

Est-ce vraiment la seule alternative?

On peut cependant nuancer cette prédiction. Si le CDI disparaissait demain, il devra être surement remplacé par une autre forme de contrat long (par exemple sur 3 ans) et ceci pour deux raisons :

La première est sociétale : une fraction importante de la population (probablement 25 %) n’est pas capable de travailler par missions, à son propre compte soit par manque d’autonomie, soit à cause du stress que génère l’incertitude. Certes, il est envisagé de créer une sorte de flexi-sécurité qui protège tous les travailleurs mais pour cette population, il me parait important d’apporter des solutions contractuelles qui leur amènent un niveau suffisant de stabilité et leur permettent un épanouissement personnel. La solidarité dont fait preuve les entreprises japonaises dans le maintien de perspectives à long terme pour une partie de leurs salariés est un facteur important de stabilité et de bien-être collectif pour un pays comme le Japon et doit nous interpeller.

La seconde est un éclairage oublié dans le raisonnement de ce qui fait la performance d’une entreprise à savoir son capital humain : l’importance pour les entreprises, quelles qu’elles soient, de disposer de salariés loyaux, engagés dans la durée sur un projet collectif, prêt à se battre pour leur succès et l’importance de conserver les talents et les expertises. Une entreprise qui ne fonctionnerait que par projets avec des travailleurs indépendants, n’aurait pas d’âme en définitive. Aurait-elle la capacité d’innover et de rester compétitive sur le long terme ? Serait-elle réellement compétitive ?

L'avenir nous le dira.

Emmanuel Nakou Louzonzila

Entrepreneur / Business developer

2 ans

Le CDI vie ses dernières années. 

Catherine LACROIX

Partenariat France Travail/Défense Mobilité

2 ans

c'est sur il va être indispensable que les banques et autres agences immobilières s'adaptent...pas gagné quand on voit toutes les "garanties" demandées pour les locations... 🤔

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