« C’est sévère, mais juste » : l'impossibilité d'une idylle
By Viktor Hanacek, found on picjumbo.com

« C’est sévère, mais juste » : l'impossibilité d'une idylle

Je vois régulièrement des gens s’insurgent et enragent contre des expressions comme « Au jour d’aujourd’hui » ou « s’avérer vrai » les taxant à l’envi de pléonasme et en prônant, à tort, leur bannissement, mais on fait généralement peu cas de cette phrase.

Pourtant, elle n’a pas vraiment de sens. Car, selon moi, on ne peut pas être sévère et juste à la fois.

Et ce ne serait-ce que pour des raisons étymologiques : se, en latin, est un préfixe de privation, et verus renvoie à ce qui vrai, authentique, ou même juste. Donc, la « sé-vérité », c’est déjà ne pas être juste, car ne pas être dans le « vrai ».

Mais analysons plutôt cette expression par le prisme de la sémantique actuelle.

La justice, c’est quand on est froid, pragmatique, quand on arrive à se débarrasser de l’affect et/ou de la doctrine pour évaluer la réalité de la manière la plus concrète, la plus sincère, la plus objective ou, à défaut, la moins partiale possible.

Or, quand on est sévère, on est volontairement dur dans son jugement, ce qui implique nécessairement une subjectivité. Une partialité consciente et intentionnelle.

Exemple :

Un prévenu se retrouve devant le juge pour une infraction passible d’un à trois ans de prison.

Au vu de son dossier, on comprend rapidement qu’il regrette ce qu’il a fait et qu’il n’avait pas de réelle volonté de nuire à autrui. Par ailleurs, un certain nombre d’éléments laissent penser que son contexte personnel a pesé dans la commission de l’infraction, et le prévenu se montre disposé à réparer les torts qu’il a causés et prendre les mesures nécessaires pour ne pas retomber dans les mêmes écueils.

Cependant, le magistrat, sévère, décide de le condamner à la peine maximale pour l’infraction en question, c’est-à-dire trois ans.

Le juge ne peut pas être juste puisqu’il n’a pas pris en compte les circonstances atténuantes, la volonté du prévenu de payer sa dette et de ne pas recommencer.

La justice et la sévérité sont donc deux concepts impossibles à marier, tant l’un est fondamentalement l’antithèse de l’autre.



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