Charlotte Perriand, une femme puissamment libre

Charlotte Perriand, une femme puissamment libre

En 1927, diplôme de l’Ecole des arts décoratifs en poche, Charlotte Perriand, 24 ans, expose au Salon d’automne une réplique de l’atelier qu’elle vient, toute fraîchement mariée, d’acquérir avec son époux rue Saint-Sulpice. Cet espace, ou Bar sous le toit, conçu selon son idée de vivre entre calme et réceptions, est réalisé à coup de mobilier tubulaire, caoutchouc, acier chromé, table extensible. Devant ce traitement industriel de l’espace d’habitation, voire quelque peu « machiniste», soucieux d’adaptabilité, de mobilité du corps et de facilité d’usage, sa proposition rencontre le plein succès : la belle et fascinante jeune femme, cheveux courts, allure preste car sportive (et grande skieuse) est sollicitée de toutes parts pour donner des conseils. Dans le même temps, elle découvre les théories de l’architecte Le Corbusier qu’elle ne connaît que, comme le Bauhaus d’ailleurs, via deux ouvrages L’Art décoratif aujourd’hui et Vers une architecture. La vie de la jeune femme bascule : « Le Corbusier m’a enlevé le mur que j’avais devant les yeux » dira-t-elle plus tard. Comme lui, elle a une vision anti-art décoratif quand on rajoute des choses après coup. Pour elle, architecture et fluides intérieurs sont liés ; ils forment un tout. Devant tant d’accointances, elle finit par rencontrer Le Corbusier, déterminée à travailler avec lui. Retors et misogyne, lui, demande « à voir ». Il se rend au Salon et, devant son Bar sur le toit, il l’engage sur-le-champ comme associée pour l’aménagement intérieur de ses futures maisons. Il a compris que cette jeune femme n’a pas que des idées, qu’elle sait aussi les réaliser ; qu’elle sera la personne idoine pour l’élaboration de l’équipement intérieur de ses constructions ; qu’elle est bel et bien de la trempe de ces femmes de plain pied dans leur temps, actives, espiègles et mystérieuses, à mi-chemin entre Louise Brooks ou Garbo, Eileen Gray ou Sonia Delaunay et qui, talentueuses, vont justement en faire voir et le faire savoir !

Charlotte Perriand (1903-1999) travaillera donc rue de Sèvres, dans l’atelier du Corbusier et Pierre Jeanneret (cousin et collaborateur de ce dernier) de 1927 à 1937. Dix ans d’échanges et de stimulations où, dit-elle, « on reconstruisait le monde tous les soir ». Dix années de collaboration libres et vivantes sur les villas La Roche, Church et Martinez de Hoz, mais aussi le Pavillon suisse ou l’Armée du salut. Et jusqu’en 1999, la destinée de Charlotte Perriand sera à l’image même de ses débuts, fervente et engagée sur l’avenir : cellule d’habitation de 14 m2, le Centresoyouz, Bureau central des coopératives de Moscou, Maison du jeune homme, Pavillon des Temps nouveaux, refuge bivouac, conseil pour l’art industriel au Japon, Méribel-les-Allues, Cité international universitaire, collaboration avec Jean Prouvé. Sans oublier les vingt ans consacrés à la station de sports d’hiver des Arcs. Bref, une intuition extrême à ce qui l’entoure (ville et nature), une indépendance d’esprit et une force de caractère à couper le souffle pour son époque : l’important ce n’est pas l’objet, c’est l'être humain qui l'intéressait.

Gert Walden

Im aktiven Ruhestand

7 ans

ich weiß auch nicht, wo ich mit den Armen bei der Schaukel hin soll :)

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire

Plus d’articles de lucileee _

Autres pages consultées

Explorer les sujets