CIR_CII : les aides versées par des personnes morales de droit privé ne doivent pas être déduites de l’assiette de calcul

CIR_CII : les aides versées par des personnes morales de droit privé ne doivent pas être déduites de l’assiette de calcul

Dans un arrêt du 12 Juillet 2023 (9e et 10e ch., n° 463363), le Conseil d’état définit pour la première fois la notion de « subventions publiques » au sens du Crédit Impôt Recherche (CIR) et du Crédit Impôt Innovation (CII). Cette nouvelle définition bouleverse les pratiques de calcul du CIR/CII et constitue, pour beaucoup d’entreprises innovantes, une excellente nouvelle.

Pour rappel, le CIR est un dispositif fiscal institué en 1983 qui vise à favoriser les activités de Recherche et Développement au sein des entreprises. Le CII quant à lui a été instauré en 2013 et a pour vocation d’encourager les entreprises à mettre sur le marché de nouveaux produits. Pour calculer le montant du crédit impôt (CIR ou CII), l’entreprise doit additionner ses dépenses de recherche et/ou d’innovation, et déduire de la base de calcul les subventions publiques qu’elle a reçues à raison des opérations ouvrant droit au crédit d'impôt (III. A244 quater B CGI).

La notion de « subventions publiques » au sens du CIR/CII n’avait jamais été clairement définie.

L’administration fiscale avait une vision assez large de la notion de subvention, considérant qu’une subvention publique pouvait être versée à la fois par une autorité administrative et/ou un organisme privé. Outre ce critère organique élargi, la jurisprudence a également eu l’occasion de considérer l’origine des ressources ou la nature de la mission confiée à la personne morale versant les fonds, afin de qualifier telle ou telle aide de « subvention publique » au sens du CIR. A titre d’illustration, l’administration fiscale précise dans sa doctrine que les prêts à taux zéro innovation (PTZI) distribués par Bpifrance, de par leurs caractéristiques, sont assimilés à un financement public de projets de recherche et doivent donc être déduits de l’assiette du CIR.

La récente décision du Conseil d’État vient de rejeter la prise en compte de tous ces critères et bouleverse les pratiques établies en matière de déduction des subventions, en proposant une définition basique et littérale des « subventions publiques » au sens du CIR/CII.

Ainsi, les subventions publiques au sens du III de l'article 244 quater B du CGI sont définies comme « toute aide versée par des personnes morales de droit public ».

Dès lors, seules doivent être déduites de l’assiette du CIR/CII les aides versées par l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics.

A contrario, les aides versées par des personnes morales de droit privé (quelle que soit l’origine de leurs ressources et leurs missions) n’ont pas à être déduites de l’assiette du CIR/CII. C’est notamment le cas des aides versées par BPI France SA qui est une personne morale de droit privé.

Cette définition des subventions publiques peut permettre à certaines entreprises innovantes ayant, dans leurs déclarations de CIR/CII passées, déduit à tort des aides versées par des personnes morales de droit privé (dont BPI France SA), de demander un complément de CIR/CII par voie de réclamation contentieuse. Elle va également simplifier les déclarations de CIR/CII 2023 dans lesquelles les aides versées par des personnes morales de droit privé n’auront pas à être déduites de l’assiette de calcul.

Nul doute que le législateur souhaitera soit adopter expressément une définition élargie des « subventions publiques » au sens du CIR/CII, soit ajouter à la notion de « subventions publiques » les aides versées par des organismes précisément identifiés comme BPI France SA par exemple.

Ces éventuels ajustements législatifs interviendront au plus tôt au début de l’année 2024. Dans cette attente, les entreprises pourront bénéficier en 2023 d’une mise en œuvre simplifiée du CIR/CII et même prétendre, pour certaines, à un complément de CIR/CII au titre des années civiles 2020 à 2022.

Abdoulaye Sarr, Ph.D

Axelerium | Expert en valorisation et financement de l'innovation

1 ans

Un client vient m'envoyer cet article ! J'ai dit attention, car la décision du conseil d'état reste évasive sur la définition de ce qu'est "une personne morale de droit public". Donc, à ce stade, il me semble imprudent de considérer non déductible les aides versées par BpiFrance ou d'enclencher une procédure de réclamation. Si tant est que BpiFrance soit une personne morale de droit privé, son capital est quand même détenu par le public et à ce titre, il est assimilé à une "personne morale de droit public". D'ailleurs, à rappeler également que la jurisprudence, dans plusieurs décisions antérieures, avait déjà précisé que les aides versées par BpiFrance étaient déductibles de l'assiette du CIR. Aussi, quel que soit l'organisme de financement qui verse l'aide à la RDI, la prudence est requise s'il y a un doute sur son retraitement jusqu'aux précisions explicites par le législateur de ce qu'est une "personne morale de droit public" avec éventuellement une liste exhaustive.

Adrien Geille

AI Academic Programs, Grants & Partnerships EMEA, USA, CAN | EMBA

1 ans

Bonjour Marie-Odile Senand est ce que de ta compréhension les aides cifre versées par l'anrt sont également concernées ?

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