Comme un éléphant dans un magasin de porcelaine...
ou « Que reste t il de quelques unes de nos valeurs fondamentales ? »
A peine les « mesures » ont elles été annoncées par 1er Ministre et Ministre de la Santé, et non encore votées par nos députés, et voilà que certains se préoccupent déjà de leur adaptabilité. Ils oublient (trop) vite de se poser la question de leur pertinence, voire de leur « légitimité » (dans le sens du respect des Lois) .
Ils disent :
· « comment vais je tenir sans manger ni boire dans le TGV pendant plusieurs heures ? J’espère que les contrôleurs seront tolérants »…
· « ah voilà le télétravail qui redevient obligatoire dans les entreprises qui peuvent le mettre en place ! Réfléchissons à quels sont les impacts sur l’organisation du travail et la motivation individuelle, et soyons créatifs, voyons y des opportunités »…
· « interdiction de manger debout dans le bars/restaurants mais pas si je suis assis. Alors, comment les personnes de petite taille (quelle est la hauteur d’un homme assis ?) vont elles être concernées ? Peut être pourront elles manger leur sandwich debout dans un petit coin ?
· « je dois porter le masque en extérieur, à l’air libre, dans les centres villes mais heureusement je peux l’enlever en intérieur pourvu que j’ouvre la fenêtre toutes les 10mn ».
Que se passe t il dans notre cerveau pour que nous « zappions » aussi vite d’une restriction à une autre ?
Et c’est là que m’est venu l’image de l’éléphant dans le magasin (de porcelaine).
Ceux qui sont déjà préoccupés par leur adaptation à ces mesures "sanitaires", c’est un peu comme si, dans un magasin de porcelaine, ils s’empressaient de prendre un balai pour ramasser les débris qu’a causé l’éléphant…pour tout mettre sous le tapis, sans se poser de questions ?
Quelles questions ?
· Pourquoi cet éléphant est il dans le magasin de porcelaine ?
· Qui l’a fait rentrer ? Qui l’a nourri ?
· Comment ai je pu faire pour ne pas le voir jusqu’à présent ? Que fait il encore là ? Serait il opportun de m’en débarrasser plutôt que de continuer à subir ses dommages ?
Pourquoi nous préoccuper de "comment" nous allons nous adapter à ce qui nous est proposé avant de se poser des questions de type "pourquoi" devons nous nous adapter à ce qui nous est proposé ?
Peut être parce que derrière la question du "Pourquoi", et non pas du "Comment", il y a la question du sens nous voulons donner à tout cela, et c’est une question difficile à se poser dans le contexte actuel.
Qu’est ce qui « supporte » la question du sens chez un être humain ? Je dirais que ce sont ses valeurs.
Sur quoi baser une réflexion sur le sens de la vie si ce n’est sur un socle de valeurs fondamentales, sans quoi la vie devient difficile, voire insoutenable ?
Une valeur exprime « ce qui vaut » ; les valeurs manifestent donc ce qui est essentiel et non négociable chez un individu.
Aucune valeur ne peut être stable et universelle, toutes les valeurs sont le produit d’une culture donnée et ne valent que pour ceux qui les ont produites...
Il semblerait qu’une étude attentive des différents courants philosophiques et spirituels de l’humanité montre qu’il n’en est rien. Il y a permanence et rémanence de certaines valeurs fondamentales.
Dans son livre « la guérison du monde » F Lenoir en cite 6 : vérité, justice, liberté, respect, beauté et amour. Dans toutes les cultures du monde elles apparaissent comme nécessaires à la vie individuelle et collective, et « c’est à travers elles que se manifestent véritablement la dignité, la grandeur « l’humanité » de l’être humain. On est pleinement Homme parce qu’on cherche la vérité ou pour le moins à discerner le vrai du faux, à être juste, respectueux, libre, aimant et qu’on est sensible au beau ».
Serions nous plus à l’aise avec les questions de type « Pourquoi ? » si chacun d’entre nous prenait un peu de temps pour réfléchir à ce qu’évoque pour lui ces valeurs éthiques et existentielles.
S’agissant d’un exercice de réflexion individuelle, chacun est libre de le faire ou pas, et pour cela, de faire ses propres recherches. Mais je propose ci après quelques énoncés, histoire de vous encourager. Je n’aborderai pas les 6 citées par F Lenoir mais seulement VÉRITÉ, JUSTICE, RESPECT, LIBERTÉ.
Qu'est ce que la «VÉRITÉ » ?
Chez les Grecs, la Vérité se définit par opposition au mensonge, ou plutôt à l’oubli. Chez Platon la Vérité passe par la réminiscence, le souvenir de ce qui est enfoui en nous. Socrate aide, par la maïeutique, la personne à accoucher des vérités universelles qui gisent au fond d’elle, se re-souvenir, amener en conscience ce qu’elle sait déjà.
Plus tard (St Thomas d’ Aquin), la Vérité se définit dans sa cohérence, l’adéquation entre le discours et la réalité (véracité).
Dans les 3 religions monothéistes, la Vérité est considérée comme valeur éthique, « quelque chose de solide qui aide à vivre » (chemin spirituel et existentiel).
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La « JUSTICE » ?
A célébrer en paroles, et à vivre en actes.
Selon Confucius, elle est « pratique sociale » et « attitude intérieure », son respect constitue les modalités de la Voie de l’accomplissement- l’homme accompli devient homme de bien; valeur centrale de la vie personnelle et collective, justice ne va pas sans égalité.
« Vertu complète » selon Aristote, la justice sous tend toute action morale. Pour Socrate il « vaut mieux subir l’injustice que de la commettre » ; la justice ennoblit l’âme de celui qui la pratique et maintient l’harmonie au sein de la cité…et la punition est une « médecine morale ».
Souvent représentée par une figure féminine, avec son glaive (nécessiter de trancher), sa balance (symbole de jugement et d’équité), les yeux bandés (impartialité du jugement). La Justice est associée à la Vérité ( sur laquelle elle se fonde ) et à la Paix (qui en est le fruit).
Portée par l’État, la communauté ou l’individu, la Justice vise « à faire régner le droit, l’égalité entre les hommes, la paix et la concorde sociales… »
Le RESPECT ?
Valeur sociale, si elle sous entend une certaine distance entre moi et l’autre, elle évite que les relations sociales deviennent rapports de force, d’intimidation, de sujétion, d’appropriation, de domination, voire de discrimination.
Au cœur de cette valeur il y a la reconnaissance de l‘autre et de sa différence, instituant une relation égalitaire, non fusionnelle, non hiérarchique, avec de l’empathie mais sans aller jusqu’à l’amour.
Présente dans les « commandements » ( « tu ne tueras point, … ») et illustrée par une maxime morale universelle, la Règle d’Or – « éthique de la réciprocité - « ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais point qu’on te fasse », dans sa formule positive « traite les autres comme tu voudrais être traité toi même ».
Une version « moderne » pourrait être l’Assertivité, ou la Tolérance, qui signifie ne pas renoncer à ses convictions personnelles mais accepter qu’autrui puisse penser autrement....Il semblerait que soit devenu urgent (MMS) de réapprendre à développer une éthique de la discussion fondée sur le respect et l’écoute d’autrui.
La LIBERTÉ ?
Très liée en Europe à l’émergence du « sujet autonome » et des libertés individuelles.
Mais dans des conceptions plus traditionnelles, l’autonomie de l’individu ne rime pas avec « déliaison » vis à vis de son environnement.
La Liberté peut être :
· libération, délivrance d’une oppression.
· moyen pour l’Homme de se libérer du Mal (péchés) qui peut le couper de la Vérité, de la Justice, du Respect, …
· liée à la notion de Loi (qui l’encadre) ou à la notion de libre arbitre (comme une éthique du comportement) ou de libération intérieure et spirituelle (loi de causalité universelle du karma).
Pour Socrate, pour qui l’individu est lié à la cité et au monde, c’est par la connaissance de soi et de la vraie nature des choses qu’il peut se libérer « du vice et du malheur ». La liberté recherchée est libération intérieure et de conscience.
Ce n’est qu’avec les Lumières que la Liberté va devenir uniquement une quête d’autonomie de l’individu sans autre finalité que la liberté en soi. Apparaissent alors les « droits de l’homme » et se généralise en Occident la pratique d’un droit (laïc) qui protège les libertés individuelles les plus fondamentales : liberté de conscience, d’expression, de circulation, de choix de vie.
C’est sur ce socle là qu’est fondée la notion de Liberté telle que nous la connaissons (et pratiquons ?) aujourd’hui.
Depuis un certain temps (2 ans?) le débat autour des valeurs s'est figé .
C’est pourquoi cet éléphant semble être là depuis longtemps, il a pris ses aises, et nous ne l’avons pas vu jusqu’à présent malgré ces multiples maladresses et les dégâts qu’il avait déjà fait.
Le risque est que cet éléphant continue à grossir, à prendre ses aises et, tôt ou tard, finisse par nous écraser !
Conclusion :
Revenons à mon image de l’éléphant dans le (mon) magasin de porcelaine
Personnellement je ne comprends pas ce qu’il fait là,
Je vais tout faire pour le renvoyer de là où il vient,
Et si cela n’est pas possible, j’envisagerai très sérieusement de sortir du magasin de porcelaine pour trouver un autre endroit pouvant m’accueillir et où je pourrais ranger ce qui m’est précieux.
Coach Professionnelle Intégrative - Médiatrice Familiale - Éducatrice Spécialisée
2 ansMerci pour ce partage. Une belle métaphore qui représente bien notre réalité actuelle. Ce poste a le mérite de questionner ce qui nous sommes en train de voir de plus en plus disparaître :nos valeurs et notre capacité de réfléchir, de questionner, notre curiosité et notre libre arbitre.
SOI AU TRAVAIL & TRAVAIL SUR SOI ~▪︎~ Superviseur (certifié EMCC ESQA) de coachs et de consultant•e•s RH | Analyste jungien (interprète de rêves dans la voie de C.G. Jung)
2 ansUne métaphore qui me semble tout à fait juste pour exprimer la disproportion des "mesures" annoncées... Je me sens également en pleine situation de double contrainte ("double bind") : si je n'applique pas, je suis "hors-la-loi", si j'applique, je contribue à une folie collective... La double contrainte étant une des origines de la schizophrénie, je nous souhaite de trouver la fameuse "3ème voie" entre subir l'autoritarisme d'un exécutif terrorisé et terrorisant (en Enfant adapté soumis), et refuser d'appliquer ces mesures (en Enfant adapté rebelle), peut-être en tâchant de retrouver l'Adulte en nous ? (Libre ? Autonome ? Responsable ?...) Merci en tout cas Eva de proposer ici cette réflexion qui me semble salutaire !
Coach Professionnel certifié, Superviseur ESQA #Alignement du #Dirigeant autour des valeurs et #Leadership #Cohérence enjeux stratégiques et objectifs opérationnels et Performance d'équipe #Réconciliation ind & collectif
2 ansSophie Bizeul, MCC, MABenjamin LouisMarc JuliéPhilippe GAILLARDElodie NEDELECJulien PanchoutNatacha Ortega FuentesGaël Jolybenoit farnaultEmilie CUNIALLaurent de RauglaudreNancy GutierrezBrigitte Ploix-GaydonRoger D.Katia BlancPhilippe LORAIN
Coach Professionnel certifié, Superviseur ESQA #Alignement du #Dirigeant autour des valeurs et #Leadership #Cohérence enjeux stratégiques et objectifs opérationnels et Performance d'équipe #Réconciliation ind & collectif
2 ansIsabelle MaréchalNicole LorainAna Oliveira PintoOlivia VerhulstLaurent AUPIEDValérie TaillardatJean-Marc ARNAUDThierry HuckThierry LechenaultVéronique BourdenxFrancoise Orlov, PhDJean Pascal BOIGNARDCéline MEYRIGNACPierre CHAUFFOURGrégory CANALESNathalie MONCLA 🧭Olivier HOLLEMAERTDelphine Barbier - Carré