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Les géants du paiement comme Visa, Mastercard, PayPal et Stripe ne veulent pas rater la révolution des cryptos. En multipliant les initiatives autour des stablecoins, ils cherchent à intégrer une technologie qui redéfinit déjà les standards de rapidité, de coût et de transparence.
Ils sont encore peu visibles dans notre quotidien, mais leur impact se fait déjà sentir à l’échelle mondiale. Les stablecoins, ces actifs numériques adossés aux monnaies traditionnelles, s’immiscent discrètement mais sûrement dans l’univers des paiements.
Portés par leur promesse d’instantanéité, de faible coût et de transparence, ils attirent l’attention des entreprises, des institutions et, surtout, des géants historiques du paiement. Ces derniers, conscients de l’enjeu, rivalisent d’initiatives pour se positionner dans ce nouvel écosystème.
En 2020, les stablecoins représentaient à peine 10 milliards de dollars en circulation. Aujourd’hui, leur capitalisation dépasse les 200 milliards de dollars, un record historique.
À titre de comparaison, le volume des transactions en stablecoins sur la blockchain Ethereum a atteint 4800 milliards de dollars au premier semestre 2024, surpassant même les volumes annuels de PayPal. Cette montée en puissance s’explique en partie par leur capacité à offrir la stabilité des monnaies traditionnelles avec les avantages de la blockchain.
“Aujourd’hui, plus de la moitié des volumes de transactions que nous traitons proviennent des stablecoins”, explique Varun Paul, directeur de l’infrastructure des marchés financiers chez Fireblocks, une entreprise spécialisée dans les wallets institutionnels.
Ces chiffres illustrent une tendance forte : les stablecoins ne sont plus cantonnés à des usages crypto-natifs comme le trading ou la finance décentralisée (DeFi). Ils s’imposent désormais comme une solution viable pour des paiements transfrontaliers, la gestion de trésorerie et même l’inclusion financière dans les pays émergents.
Leur succès repose également sur un modèle économique performant. Les émetteurs de stablecoins, comme Tether (USDT) et Circle (USDC ou EURC), investissent leurs réserves dans des obligations d’État, générant des rendements stables.
Par exemple, Tether a enregistré un bénéfice net de 2,5 milliards de dollars au troisième trimestre 2024, tandis que Circle, qui prépare une introduction en bourse, a annoncé un chiffre d’affaires de 779 millions de dollars au premier trimestre 2023.
Selon Jeremy Allaire, PDG de Circle, cette stabilité économique est renforcée par les avancées réglementaires, notamment en Europe : “Avec le règlement MiCA, les stablecoins deviennent des monnaies numériques légales circulant sur blockchain. C’est un pas de géant pour toute l’industrie.”
Visa, Mastercard, PayPal et Stripe : une adoption stratégique des stablecoins
Visa s’est rapidement positionné comme un acteur clé dans l’intégration des stablecoins. Avec son réseau global de 100 millions de commerçants, le géant facilite leur adoption grâce à des collaborations stratégiques, notamment avec Gnosis Pay.
Cette dernière propose une carte de paiement adossée à des wallets en stablecoins, permettant aux utilisateurs de régler leurs achats tout en restant connectés à la blockchain. Martin Köppelmann, cofondateur de Gnosis, souligne : “Visa offre un réseau de distribution incomparable, essentiel pour coordonner les flux de paiement tout en respectant les réglementations locales.”
Visa est incontestablement le leader des cartes de paiement crypto. Avant Gnosis, le réseau américain avait déjà attiré Coinbase, Crypto.com ou encore Bitpanda. Ces cartes ont l’avantage de permettre à leurs détenteurs de dépenser des cryptos dans le monde entier sans avoir à repasser par leur banque : tout est assuré par les plateformes d’échange crypto, réduisant ainsi les frictions.
De son côté, Mastercard mise sur une approche diversifiée pour intégrer les cryptos dans son réseau. En collaborant avec des fintechs comme Paxos, l’entreprise facilite les paiements en stablecoins tout en explorant de nouveaux usages comme les NFT pour renforcer la fidélisation client.
“Les stablecoins représentent une révolution majeure. Ils permettent des paiements plus rapides et accessibles, tout en ouvrant la voie à des innovations inédites”, déclare à The Big Whale Christian Rau, responsable des paiements numériques pour Mastercard en Europe.
Stripe a quant à lui franchi un cap en octobre 2024 en acquérant Bridge, une start-up spécialisée dans les paiements en stablecoins, pour 1,1 milliard de dollars.
Cette acquisition reflète l’ambition de Stripe de simplifier l’usage des stablecoins pour les entreprises, tout en consolidant son rôle sur le marché des paiements numériques. “Cet achat valide réellement l’impact des stablecoins sur l’industrie et montre que la blockchain est devenue une infrastructure incontournable”, explique Varun Paul de Fireblocks.
PayPal a également été l’un des premiers géants à lancer son propre stablecoin, le PYUSD, à l’été 2023. Avec une capitalisation initiale de 500 millions de dollars, ce stablecoin vise à démocratiser les paiements numériques pour ses millions d’utilisateurs.
L’entreprise cible notamment les remises de fonds et les paiements internationaux, deux segments où les stablecoins offrent un avantage significatif en termes de coûts et de rapidité.
Les stablecoins ne se contentent pas de redéfinir les transactions crypto natives : ils gagnent du terrain dans des secteurs variés, devenant un outil indispensable pour des cas d’usage concrets.
Dans le domaine des paiements transfrontaliers, ils s’imposent comme une alternative efficace aux services traditionnels comme Western Union, où les frais peuvent atteindre 6% pour un transfert international. “Les stablecoins permettent des transactions quasi instantanées et beaucoup moins coûteuses”, souligne Varun Paul.
Des entreprises comme Fipto, qui a levé 15 millions d’euros en 2023, exploitent cette technologie pour rapatrier les fonds de filiales internationales, simplifiant ainsi les flux financiers et réduisant les délais.
Dans des régions comme l’Afrique ou l’Amérique latine, les stablecoins jouent également un rôle crucial pour l’inclusion financière en offrant un accès direct aux dollars numériques, souvent inaccessibles via les systèmes bancaires traditionnels. En Afrique, par exemple, Yellow Card aide les particuliers et les entreprises à contourner les pénuries de devises locales pour réaliser des paiements transfrontaliers.
Pour les entreprises, les stablecoins sont devenus une solution idéale pour sécuriser leurs actifs, réduire les coûts de conversion et générer des rendements compétitifs. Avec des taux atteignant facilement 10% par an, ils surpassent largement les comptes d’épargne traditionnels, attirant un nombre croissant de grandes entreprises, notamment dans les secteurs du commerce international et de la tech.
Cependant, malgré leur succès, les stablecoins font face à plusieurs obstacles. La régulation reste un enjeu majeur. Si des cadres comme MiCA offrent des garanties en Europe, d’autres régions peinent encore à harmoniser leurs politiques, comme c’est le cas aux États-Unis.
Par ailleurs, l’adoption directe des stablecoins par les commerçants reste limitée. Cette réalité pousse des projets à développer des alternatives décentralisées, capables de rivaliser avec les réseaux traditionnels tout en s’appuyant sur la blockchain pour maximiser leur potentiel.
Les challengers à l’affût : vers une infrastructure décentralisée
Des acteurs comme Safe ou Aptos explorent des modèles décentralisés pour réduire la dépendance aux géants traditionnels. Safe, par exemple, développe Safenet, un réseau visant à permettre des paiements entièrement on-chain.
“Safenet doit permettre d’effectuer des paiement via n’importe quelle blockchain pour lutter contre la fragmentation notamment causée par la multiplication des layer 2”, explique Lukas Schor, cofondateur de Safe. Aptos, de son côté, mise sur sa capacité à traiter des milliards de transactions par jour pour attirer les entreprises à la recherche de solutions à grande échelle.
Base, le layer 2 développé par Coinbase, représente également une initiative ambitieuse. En tirant parti de sa base d’utilisateurs de plus de 100 millions de personnes, Base promeut l’adoption de l’USDC et de l’EURC, son stablecoin euro, comme solutions de paiement pour les commerçants et les entreprises.
Si les stablecoins redéfinissent déjà les standards de rapidité et de coût dans le secteur des paiements, leur potentiel véritable reste encore en grande partie inexploité. Au-delà de leurs usages actuels, ces actifs pourraient demain devenir le socle d’un écosystème hybride où cohabiteraient des infrastructures décentralisées et des réseaux traditionnels.
La montée en puissance de solutions blockchain entièrement on-chain, couplée aux efforts des géants du paiement pour moderniser leurs offres, ouvre la voie à des innovations radicales. À mesure que ces technologies convergent, la question n’est plus seulement de savoir si les stablecoins transformeront le secteur, mais jusqu’à quel point ils en deviendront le moteur central.
Dans cette nouvelle ère, les entreprises, les régulateurs et les consommateurs devront collaborer pour façonner un système où la technologie sert non seulement l’efficacité, mais aussi la transparence et l’inclusion financière à l’échelle mondiale.
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