Concurrence Déloyale : Reprise d’un nom de domaine tombé dans le domaine public (Cour de cassation 02 février 2016 )

La règle syllogistique est simple : Tout ce qui est du domaine public est libre de droit, or un nom de domaine non renouvelé tombe dans le domaine public donc un nom de domaine non renouvelé est libre de droit.

Cependant, il ne faut pas confondre vitesse et précipitation et cette règle peut connaître une exception à travers la responsabilité civile et son dérivé la concurrence déloyale.

En l’espèce, la société LES VENTS DU NORD qui exploite un magasin de vente et de restauration d’instruments à vent sous la dénomination, l’enseigne et le nom commercial était titulaire du nom de domaine « lesventsdunord.fr» depuis 2007.

 Le 31 décembre 2010 ce nom de domaine est tombé dans le domaine public pour n’avoir pas été renouvelé.

 Aussitôt une société concurrente, la société CUIVRES ET BOIS, s’empressa également le 31 décembre 2010 d’acheter ce nom de domaine, et le 4 janvier 2011 le nom de domaine « lesventsdunord.com» 

C’est dans ces conditions que la Société LES VENTS DU NORD a assigné sa concurrente en concurrence déloyale.

 La Cour d’appel condamne, la Cour de cassation rejette le pourvoi et donc approuve la condamnation pour concurrence déloyale.

Pour condamner la société CUIVRES ET BOIS pour concurrence déloyale, la Cour d‘appel relève  que si la page d’accueil du site internet accessible par le nom de domaine « les ventsdunord.fr » portait la mention  « site en construction », elle n’était cependant pas vierge  puisqu’elle comportait le logo spécifique de la société LES VENTS DU NORD, son adresse, ses coordonnées téléphoniques, ses horaires et l’objet de son activité et qu’elle renvoyait à un contact pouvant être joint par courriel.

De plus, cette adresse était insérée comme lien hypertexte dans d’autres sites internet, tels ceux d’une association partenaire et d’un fournisseur de la société LES VENTS DU NORD, de sorte que ce rachat de ce nom de domaine par la société CUIVRES ET BOIS a eu pour effet de diriger automatiquement l’internaute cliquant sur ces liens vers le site de celle-ci.

Ainsi, après avoir également relevé que la société LES VENTS DU NORD qui faisait un usage antérieur de ce nom de domaine identique à son enseigne et à son nom commercial pour l’exercice de son activité, la Cour d’appel considère que le rachat de ce nom de domaine, dès le lendemain du jour où il était tombé dans le domaine public, et du nom de domaine « lesventsdunord.com », par la société CUIVRES ET BOIS, laquelle exerce la même activité très spécialisée, dans un magasin situé à proximité, dans la même ville à 700 mètres de distance, qui n’était pas fortuit, est de nature à faire naître une confusion dans l’esprit du public entre les deux sociétés afin de capter la clientèle de la société LES VENTS DU NORD et constituer une faute constitutive de concurrence déloyale.

 Cette décision ne remet évidemment pas en cause la règle selon laquelle le nom de domaine une fois supprimé ou non renouvelé, tombe dans le domaine public et peut être enregistré par un nouveau demandeur.

Ce qui est sanctionné c’est l’attitude pour le moins précipité et calculé du concurrent.

Rajoutons que ce qui a fait pencher la balance est certainement dû au fait que l’activité de la société LES VENTS DU NORD s’exerçait depuis toujours sous cette appellation et enseigne ce qui aux yeux de la clientèle jetait un trouble par rapport au nom de domaine éponyme repris et repris et devenu celui de la seconde.

 Cour de cassation 02 février 2016 n°14-20486

 

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