Constats d'un humoriste très junior

Constats d'un humoriste très junior

Il y a de cela une semaine, j’ai décidé de participer pour la première fois de ma vie à un “open mic” d’humour dans un bar de Montréal (avec mesures pandémiques, bien sûr). Je n’avais aucune attente à part une connaissance partielle du contexte grâce à un ami qui avait raconté ses blagues dans le même cadre une semaine auparavant. Par chance, des fidèles collègues et semi-fans de cossette ont eu la gentillesse de partager le saut en parachute avec moi. 

Test ultime d’humilité (a.k.a épreuve olympique d'humilité)

Mettons une chose au clair: tenter de tirer un rire à un pur inconnu qui se présente spécialement pour se divertir est probablement le meilleur test d’humilité de tous les temps. Je le recommande d'ailleurs à titre de formation en leadership ou autres sujets connexes. En fait, j’ai compris dès la première minute qu’être “à l’aise en pitch” ou être un “orateur confiant” ne suffiraient pas du tout. Les dures notions de “delivery” des blagues et du rythme en général ont eu raison de moi rapidement. Pas que c'était poche, c'était juste pas comme quand tu payes 52$ pour Louis-José Houde. Je savais que c’était important, mais j'ai clairement mis trop d'emphase ailleurs que sur ma livraison. Bref le test d'humilité m'a ramené à des situations de discussion avec des clients où c’est tentant de faire comme si on savait tout mais au final, la meilleure approche est peut-être de dire: “laisse-moi vérifier, j’ai jamais fait ça, mais je te reviens assurément avec des pistes”.

Mine à insights et accélérateur de curiosité

Dans l’écriture de mon numéro, j’ai eu des flashs vraiment ridicules dont certains sur des observations liées à notre quotidien. Ça m’a forcé à observer plus longuement comment on se comporte (des fois de façon bizarre) et comprendre pourquoi on agit d’une telle façon saugrenue. Ce n’est pas un hasard car les humoristes qui réussissent le mieux (pas moi, les pros) ont cette capacité à identifier puis transformer des observations toute simples en immenses blagues qui connectent de façon redoutable avec leur audience. Ha, ça me rappelle la tâche première du stratège. 

En train de raconter une blague okay

Différenciation et idées fraîches s.v.p

J’avais la chance de performer dernier comme si j’étais l’attraction principale (100% un hasard cela dit). Chanceux parce que j’ai pu entendre tout le matériel des autres participant.e.s et j’ai pu rapidement me comparer. Tout le monde était bon (cool mais angoisse totale pour moi). Cependant, ma plus grande source de stress et constat sont venus du fait que nous profitions toutes et tous des mêmes sources d’inspiration (contexte pandémique, nouvelles habitudes de vie, autres thématiques modernes, etc.). Je met mets dans la peau de l’audience: c'est quand même ennuyant d’entendre des gags sur des sujets relativement similaires. J’ai tenté de modifier mon intro et quelques bouts de mon numéro de façon agile par improvisation mais je ne recommande pas vraiment cette tactique en tant qu’humoriste très junior. Plus sérieusement, le constat est le suivant: la pensée latérale (merci Mark Pollard) est plus importante que jamais pour la création d’idées nouvelles. Par exemple, si on veut créer un gag sur la pandémie, traiter de Dr. Arruda n’est pas nécessairement un gage d’originalité (mon erreur car très linéaire comme façon de penser). Par contre, si on cherche des idées en liant “pandémie” à disons, La Reine des Neiges, le produit de cette réflexion sera potentiellement vraiment plus original. Aucune idée où ça s'en va mais j'ai déjà plus le goût d'écouter.

Pas le temps d'attendre la perfection

Si j’avais peaufiné mon numéro pour atteindre un sentiment de perfection, j’aurais fait le saut dans 10 ans. Mon numéro de 5 minutes était totalement imparfait. Du genre, très imparfait. Mais le fait de l’écrire, de répéter, de réécrire et de livrer dans l’espace de quelques jours sans sur-penser chacun des détails permet une rétroaction plus tôt et plus de place pour l’amélioration. Ça me fait penser à ce contenu créé par le Think Group de Londres. Plus on en parle rapidement et souvent, plus le produit final en profite. Ça me fait aussi penser que les brainstorms/discussions de couloir me manquent terriblement. 

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Fauve Doucet

Entrepreneure en innovation sociale et environnementale | Experte en mutualisation, circularité et économie collaborative | Acteur de Changement chez Masse Critique

4 ans

Next time let me know! Je vais venir te voir ;)

David Pontbriand

Co-fondateur, C2 Immobilier

4 ans

Good show! Bon texte. J'aurais aimé voir/entendre ça :)

Bravo pour le courage !!

Wow! Chapeau. C'était un plaisir à lire. Moi mon truc (si je suis sur une scène avec un micro, aux rares sorties de notre band de musique), c'est de flipper la situation à l'envers et de me dire : « C'est pas eux qui me regarde, c'est moi qui les regarde– et c'est moi qui a le micro! » Ça désamorce, tout ralentit dans ta tête, ça devient drôle. Je te feel tellement!

Gaëtan Namouric

Fondateur et président de Perrier Jablonski, enseignant et auteur.

4 ans

Très bien!

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