Coupe du Monde... 1919/2018
La Coupe du monde de football peut se flatter d’être un sacré événement : Elle est la seule activité à réunir autour d’elle une petite moitié de la population de la planète. Trois milliards d’entre nous quand même. Aucune autre ne fait mieux. Pas mal, non ?
Quelle peut bien être l’alchimie d’un tel raz-de-marée émotionnel ? Difficile de répondre, bien sûr. Des centaines de chercheurs planchent depuis des décennies sur le sujet. Leurs explications sont passionnantes et sans doute vraies.
Prenons pendant un court instant la question dans un autre sens. Celui de la mémoire plutôt que de l’émotion.
Nous sommes à l’été 2018. Année d’un centenaire : celui de l’été 1918 justement.
Il y a un siècle, des nations s’affrontaient elles aussi sur tous les terrains possibles et inimaginables. La musique accompagnait des hymnes mille fois répétés. Les couleurs des drapeaux flottaient partout et partout, elles menaient des jeunes gens dans leur prime jeunesse à perdre leur vie sur des champs non pas de sport mais de bataille. Par milliers.
Été 1918 : la dernière offensive de la Grande guerre faisait rage : Ce fut la Deuxième bataille de la Marne. Le 15 juillet marqua l'apogée de ce déchaînement. Les canons étaient à 60 kilomètres de Paris. Et chaque soir, des drapeaux – déchirés cette fois - accompagnaient les corps de milliers de jeunes hommes vers leur dernière destination : un cimetière de campagne improvisé.
Été 2018 : des nations affrontent d’autres nations sur d’autres terrains. Mais de sport, cette fois. Les drapeaux flottent partout également. Et partout les hymnes nationaux résonnent. Les gorges sont serrées et les larmes ne sont jamais loin. Mais curieusement, miraculeusement devrait-on s’empresser d’écrire, au soir, après les rencontres, pas un seul de ces jeunes hommes n’a perdu la vie. Pas une goutte de sang n’a coulé. Des visages tristes et déçus bien sûr chez les infortunés perdants. Et des délires de joie, des liesses populaires bien pacifiques, du côté des vainqueurs du jour.
Quel renversement ! Réalise-t-on assez quelle chance nous avons de vivre ces heures-là plutôt que ces heures noires ?
C’est sans doute la magie de cette Coupe si curieuse capable de souder pendant quelques heures, quelques jours, quelques semaines même des hommes et des femmes que beaucoup sépare et que beaucoup oppose si souvent.
Une sorte de déchainement d’envie d’être bien ensemble...
Alors à tous les pisse-vinaigre qui regardent de haut ces curieux peuples qui se réjouissent si sincèrement d’être bien ensemble, je pose la question : Comment mieux commémorer un centenaire de 15 juillet et enfin tourner la page ?
Allez les Bleus !
Pascal Masi