Covid : faire face aux émotions
Nous vivons une situation globale similaire mais des perceptions et vécus différents
Lors de nos contacts professionnels ou personnels, nous sommes amenés à échanger sur la période particulière que nous traversons : le confinement, les informations autour du coronavirus, l’exposition à un virus qui peut être mortel, une incertitude sur l’avenir économique, …
Au cours de ces échanges, le comportement ou l’expression des autres peuvent nous sembler exagérés. Face à un collège qui exprime une colère excessive, à un ami qui n’ose plus sortir de chez lui, comment réagir ? Spontanément, nous avons le sentiment de vivre la même chose, nous pourrions avoir tendance à évaluer son ressenti par rapport à ce que nous vivons, aux positions que nous avons prises. Pourtant si nous avons l’impression de vivre une période similaire, notre façon d’appréhender cette situation et notre vécu sont eux, bien différents et dépendent de nos valeurs, de notre situation, de notre histoire, de nos ressources, … Si je suis une personne à risque parce que je présente par exemple des troubles respiratoires, je vais probablement appréhender la situation différemment d’une personne qui se sent en pleine santé. Si tous les jours, je dois aller travailler, je peux me sentir très exposé au virus et en insécurité.
Face à la plainte de l’autre, à sa peur, à sa colère véhémente, nous pouvons être tenté de ramener l’autre à la raison, ou pourrait-on dire à notre raison ; le risque est bien que nous nous projetions dans la situation de l’autre et délégitimions son ressenti.
La fonction des émotions
Les émotions, même celles que nous considérons comme négatives comme la peur et la colère, ont pourtant une fonction. La peur nous permet de nous mettre en alerte contre un danger et de nous adapter. Si on parle du covid 19, une personne qui se sentira très exposée aura probablement une peur intense et cette peur, légitime, va peut-être l’amener à prendre plus de précautions que la moyenne des gens.
La peur n’est pas à confondre avec l’anxiété qui est plus diffuse et dont la cause est plus difficile à appréhender. La peur est en lien avec la perception d’un danger souvent bien identifié.
Accueillir l’émotion pour mieux la comprendre
Loin de juger l’intensité émotionnelle comme recevable ou non, ou de dicter le bon comportement à tenir, s’intéresser à ce qui sous-tend l’émotion de l’autre lui permet de pouvoir s’exprimer et de conscientiser ce qu’il ressent. Accepter l’émotion qui traverse l’autre, l’accueillir, l’autoriser est le premier pas dans ce processus. Il demande une posture bienveillante, non jugeante et de l’empathie.
Pratiquer l’écoute active permet à l’autre d’entreprendre un travail en lien avec son émotion. Ainsi questionner sans jugement (qu’est ce qui te met en colère ? Qu’est ce qui te fait peur ?), lui laisser le temps de la réflexion, l’aider à approfondir, s’assurer avoir bien compris ce qu’il a voulu dire, permettra de créer cet espace propice à libérer la parole et aidera à sortir de l’emprise émotionnelle pour aller sur une expression plus rationnelle.
L’écoute amène à se comprendre en évitant les jugements hâtifs même si évidemment il n’y a pas d’obligation à adhérer au point de vue de l’autre. Donner son point de vue est bien sûr possible et peut permettre de faire cheminer la réflexion à condition de ne jamais l’exprimer en se mettant à la place de l’autre et de rester toujours dans une position respectueuse de la parole exprimée.
Conclusion, comment se comporter face à l’émotion de l’autre ?
En conclusion, face à cette épreuve que nous vivons tous différemment, notre système émotionnel est sollicité de manière plus ou moins intense. Accueillir sa propre émotion ou celle de l’autre avec bienveillance est le premier pas pour autoriser à verbaliser autour et pouvoir réfléchir plus sereinement à ce qui la sous-tend.
Nathalie Brulé - Psychologue du travail et dirigeante d'Acta Nova