Crowdfunding : Risques et opportunités - Évolution récente
Le crowdfunding est un segment phare des fintechs, secteur qui se développe très rapidement aux USA et en Europe
En France les fonds collectés doublent pratiquement chaque année depuis 3 ans pour atteindre en 2015 presque 300 millions d’euros dont 66% correspondent à des prêts.
Source « Le baromètre du crowdfunding » réalisé par Compinnov-Rapport annuel 2015 de l’association du Financement Participatif
2.3 Millions de français en 2015 et 1 million de plus qu’en 2014, ont financé un projet à partir des plateformes existantes et ont ainsi permis à 18000 projets de voir le jour.
Par âge, on constate que 41% des 34 ans et moins, ont financé un don alors que l’investissement est plutôt le fait d’une population plus âgée ( 39% entre 35 et 49 ans et 40% de plus de 50 ans) , tandis que les prêts sont souscrits de façon plus équilibrée ( 32% par des moins de 34 ans , 34% par les 35-49 ans et 34% par les plus de 50 ans)
4 raisons à ce succès
- la simplicité et la transparence des plateformes qui mettent en relation directe les porteurs de projets et les contributeurs (désintermédiation)
- Les campagnes de dons contre récompense souvent de faible montant développe l’engagement des contributeurs et plus globalement donne l’impression de participer au développement de l’économie réelle.
- les difficultés que certaines TPE/PME peuvent avoir pour mobiliser des financements bancaires
- et le dernier mais non le moindre, les rendements promis, sachant que nous sommes depuis quelques temps et encore pour de nombreux mois dans un environnement de taux négatifs.
Quand le livret A affiche un taux de 0.75%, le PEL 1.5% et les fonds euros d’assurance vie entre 2 et 3%, offrir un taux de rendement généralement compris entre 6 et 10% attire forcément les épargnants.
Cependant malgré des réussites flamboyantes, le crowdfunding n’est pas un investissement sans risque car prêter de l’argent comporte, comme pour tout investissement, des risques de pertes de tout ou partie des fonds engagés .
En crowdequity, en cas de faillite les créanciers sont prioritaires sur les actionnaires dans l’ordre de remboursement (à l’identique des achats d’actions sur tout marché boursier) mais en plus, en cas de sortie du capital, se pose le problème de la valorisation de la start up et de la liquidité.
En crowdlending, les prêteurs sont prioritaires sur les actionnaires mais pas sur les organismes sociaux .
Et en crowdfunding immobilier, secteur qui se développe très rapidement avec une nouvelle plateforme toute les 2 ou 3 semaines sans même avoir obtenu d’agrément de l’AMF, on a tous les risques de l’immobilier direct, à savoir, la baisse du marché immobilier, la solvabilité des locataires, le risque promoteur , de la bonne commercialisation des lots et des retards de chantier.
Et on constate en effet, de plus en plus, d’ « accidents industriels » :
Sur 48500 projets de Kickstarter ayant recueilli plus de 237 millions de dollars US de dons, 75% des produits proposés sont délivrés avec un retard de 8 mois en moyenne voir même totalement abandonnés.
Au Royaume Uni, la plateforme Crowdcube (leader européen) rencontre des difficultés : sur 30 entreprises qui ont bénéficié d’une campagne de crowdfunding , seules 2 présentent des résultats à la hauteur de leur prévisions, les autres sont en deçà et enregistrent des résultats inférieurs de 200 à 500%. 2 d’entre elles ont fait faillite (analyse menée par Robert Murray Brown)
Le Lending club, récemment ( le 9 mai 2016), a vu l’éviction de son président Renaud Laplanche, suite au non respect des conditions de risques fixées lors de la vente d’un prêt de 22 millions de USD, et à la découverte d’un conflit d’intérêt portant sur un investissement personnel non révélé par le président dans un fonds dont le Lending Club a racheté 15% suivant la recommandation du président …..
En France, en 2014 le projet de Smok-it, constitue le premier cas de défaut de paiement : 75000 € levés auprès de 329 particuliers, avec un taux de rendement proposé de 9.36% sur 36 mois. Malheureusement 3 mois après, suite à une commande non honorée, la société était placée en règlement judiciaire puis liquidée.
Et avec l’essor, comme partout, des cas de fraude et de malveillance se produisent :
Aux USA par exemple en 2012 , Erick Chevalier lance sur Kickstarter le projet de jeu « The Doom that came to Atlantic city » et réussi à récolter 122 874 usd. On est loin de la Happy End lorsque le créateur informe que le jeu ne sortirait finalement pas . Les préteurs n’ont jamais été remboursés et ont appris plus tard que le créateur avait dépensé l’intégralité de la somme en dépenses personnelles.
L’Etat essaye donc de développer ce secteur mais également de rassurer les épargnants
- Développer par 2 mesures récentes :
- Dorénavant, en cas de non remboursement d’un prêt participatif consenti depuis le 1er janvier 2016, la perte en capital subie par un particulier est imputable sur les intérêts générés par les autres prêts de même nature, perçus pendant l’année au cours de laquelle la créance devient irrécouvrable ou des 5 années suivantes. (instruction BOFIP du 21-03-2016). Jusqu’à présent les pertes n’étaient pas déductibles.
- A compter du 1er octobre 2016, les plateformes de crowdlending pourront proposer des mini-bons aux particuliers et entreprises. Emis pour 5 ans ces minis bons, sont des titres nominatifs comportant l’engagement de l’emprunteur de rembourser le capital, augmenté des intérêts à échéance déterminée. Emis par des sociétés par actions ou SARL de plus de 3 ans, ils seront proposés par les plates formes au titre de prestataire de services d’investissement ou de conseillers en investissement participatif. Des précisions sont attendues sur le plafond maximum de financement qui pourrait être fixé à 2.5 millions d’euros.
- Rassurer les épargnants
En effet, en limitant jusqu’à présent à 1 millions d’euros d’emprunt par entreprise et 1000 euros de prêt par particulier, on oblige les plateformes, pour être rentable, à faire du volume ce qui peut nuire à la rigueur de la sélection. D’autant plus qu’aucune de ces structures n’est soumise à l’obligation d’un contrôle interne, et que ni l’AMF ni L’ACPR n‘ont jamais audité les procédures internes de ces startups. Mais clairement, il faut calibrer intelligemment la réglementation aux startups de la fintech au risque d’étouffer dans l’œuf se secteur en devenir. Il faut en effet trouver le juste milieu car les exigences de l’AMF et de l’ACPR en termes de contrôle interne, de fonds propres ou honorabilité correspondantes aux grandes banques sont disproportionnées.
Emma Marcegaglia, lors de sommet de Davos en 2016 disait : « face à une innovation, les américains en font un business, les chinois la copient et les Européens la régulent ».
Travaillons donc intelligemment pour que le secteur des fintech continue à se développer et garde sont agilité mais en toute sérénité pour les épargnants
Et je pense que les Directeurs Administratifs et Financiers ou Commissaires aux comptes pourraient avoir de nombreuses idées sur la question …
Il y aura forcément de la casse et je me demande comment ces start-ups sont organisées pour le recouvrement ou le rééchelonnement d 'emprunt qui sont tout un art...d'un autre côté si la somme mise en jeu est limitée à 1000 euros le risque individuel reste très faible.
Communication des entreprises
8 ansMerci pour cet intéressant article et bien écrit.
Défense et conseil des Courtiers, des Agents, des Intermédiaires et des Distributeurs
8 ansSurtout, la complète application de leurs obligations juridiques, notamment celles décrites par le Code monétaire et financier (art. L. 548-1 et suivants, pour les IFP, par exemple), est la source d'un bon niveau de sécurité juridique, pour les professionnels. Indispensable, pour revendiquer une protection irréprochable des consommateurs.
Experienced senior manager
8 ansTrès intéressant, merci.