Dépistage des troubles visuels des enfants mahorais

L’année 2025 devrait être celle de la mise en place du dépistage systématique des troubles visuels des enfants mahorais.

Nous connaissons les enjeux d’un tel dépistage. Effectué dans la petite enfance il permet un développement visuel optimal. En revanche son absence conduit à des déficiences visuelles irrécupérables.

Ce dépistage n’est pas bien réalisé dans l’hexagone mais il existe une possibilité de rattrapage par des consultations ophtalmologiques ou orthoptiques à l’initiative des parents, soit à titre systématique en accord avec les recommandations, soit devant des difficultés scolaires dont on cherche à connaitre la cause.

Les enjeux sont encore plus grands à Mayotte car l’accès facile à une consultation ophtalmologique n’a jamais existé, celle-ci n’est donc même pas recherchée par les parents.

L’autre aspect du problème est le nombre d’enfants par classe d’âge qui est proche des 10 000, compte tenu du dynamisme de la natalité locale. Idéalement il faudrait voir tous les enfants de la dernière année de maternelle (en fait plus tôt serait encore mieux mais c’est trop  compliqué pour l’instant).

En juin, grâce à l’ Agence Régionale de Santé Mayotte (ARS) et Académie de Mayotte nous avons réalisé une phase de test en examinant 313 élèves de la commune de Sada, la plupart en CP, mais aussi CE1,CM1, CM2 pour des enfants repérés par les enseignants. Ceci explique le taux de 40% d’enfants à revoir alors qu’on s’attendrait plutôt à un taux de 20%.

Le processus de dépistage les troubles visuels des enfants comporte plusieurs phases qui doivent impérativement se succéder sauf à être inefficace :

1. Le dépistage proprement dit
2. L’examen en centre ophtalmo, qui se conclue la plupart du temps par l’ordonnance de lunettes
3. L’achat et le port de lunettes
4. Le contrôle et le suivi en centre ophtalmologique ou orthoptique

Regardons ces différentes étapes :

1. Le dépistage proprement dit : il est relativement facile à mettre en place sous réserve d’avoir des personnes formées et d’obtenir l’accord du chef d’établissement. Nous aimerions susciter l'émergence d'une aide bénévole, par les mamans ou par des personnes extérieures à l'établissement, pour préparer les enfants et leur dossier. Cet aide permettrait de voir plus d’enfants dans la même séance.
2. L’examen en centre ophtalmo : les vraies difficultés commencent. Il faut tout d’abord que ces centres existent, et qu’ils aient des créneaux de rendez-vous disponibles. Il faut aussi que les parents se sentent suffisamment motivés pour prendre rendez-vous. Or sur 126 enfants dépistés une quinzaine d’enfants seulement sont arrivés au centre. Nous avons donc décidé d’ouvrir une consultation spécifique dédiée aux enfants dépistés un samedi par mois. Ce samedi sera connu dès le moment du dépistage. Nous voudrions ainsi favoriser le  transport groupé et la prise en charge des enfants du même dépistage le même jour.
3. L’achat et le port de lunettes : aujourd’hui il existe 7 magasins d’optique sur l’ile. Mais les temps de parcours sont longs (routes montagneuses et embouteillages), l’acquisition des lunettes prescrites nécessite un effort parental non négligeable. Ensuite arrive la question du port de lunettes qui n’est pas favorisé culturellement, voire qui se heurte à des préjugés négatifs.. Il y a un travail de communication à faire à ce sujet, probablement de façon longue et soutenue.
4. Le contrôle : après quelques semaines de port des nouvelles lunettes un contrôle visuel est nécessaire pour vérifier si l’acuité visuelle est revenue à la normale. Pour un pourcentage important d’enfants une rééducation visuelle comlémentaire sera nécessaire, ce qui signifie des passages réguliers au centre.

Le samedi 20 juillet a été le premier samedi dédié aux enfants dépistés. 11 enfants ont été reçus.

Mariame est opticienne optométriste, un protocole local accepté par l’ARS lui permet d’exercer comme partenaire de téléconsultation et comme professionnelle de santé en charge du dépistage des troubles visuels.

Merci à chaque membre de l'équipe de Bandrélé : Haladati, Tanlimi, Fardat, Mariame et bien sûr Perrine, notre directrice, pour avoir accepté d'être présentes certains samedis matin dans le but d'accueillir les élèves de Mayotte.👍👍

(Finalement, comme partenaire de la télémédecine j'aurai travaillé avec les orthoptistes, les infirmières et les opticiens-optos. Si j'ai le courage je ferai un jour un post à ce sujet 😊)