Dangereux excès de zèle de la Commission Européenne
Italie, Belgique, Espagne, France… la liste des pays dans le viseur de la Commission européenne faute de suivre leur feuille de route budgétaire pour 2019 s’allonge de jour en jour, à un moment critique où les risques de contagion de la crise italienne s’amplifient au fur et à mesure des déceptions sur la conjoncture et l’inflation et à l’approche de la fin supposée du programme d’achats d’actifs de la BCE.
La rigidité dont fait preuve la Commission en retoquant jusqu’au budget de la Belgique pose incontestablement question, sur plusieurs fronts :
- Conjoncturel, tout d’abord. La détérioration des perspectives de croissance s’est accélérée ces derniers mois et promet d’être coûteuse en matière budgétaire si les tendances se poursuivent. En l’absence d’être capable de mettre sur pied un programme structurel d’investissement pour dynamiser la croissance ou de pouvoir imposer aux pays qui le peuvent d’utiliser leurs marges de manœuvre pour à stimuler la conjoncture de la région, cette rigidité est une nouvelle fois très préoccupante pour l’avenir.
- Politique, ensuite, au moment où l’instabilité des différents gouvernements constitue une menace grandissante de montée des populismes qui trouvent dans cette rigidité européenne de quoi alimenter leur argumentaire anti-européen. A quelques mois d’élections européennes, dont tout suggère qu’elles feront la part belle aux eurosceptiques dans le futur Parlement, le risque est grand que cette orientation participe à creuser davantage le fossé qui éloigne déjà grandement l’Europe de la cohésion dont elle aurait besoin pour se donner des chances de poursuivre sa construction.
Les moyens de négocier pour atténuer les tensions avec le gouvernement italien et les autres existent et sont largement plébiscités par les économistes de tout poil : sortir les dépenses d’investissement, par exemple, de la comptabilité des déficits, orienter le QE de la banque centrale à destination de programmes d’investissements structurels transrégionaux (il est certes bien tard) sont des moyens à considérer, parmi bien d’autres, pour desserrer les contraintes sur les gouvernements et éviter de répliquer l’erreur des premières années de la décennie en faveur de politiques procycliques aux conséquences économiques, sociales et politiques éminemment destructrices, faisant par là-même la part belle aux concurrents du reste du monde.
La tournure de ces derniers jours est assurément préoccupante, propice, tout à la fois, à un regain de défiance de la part d’agents économiques déjà bien malmenés, qu’à un risque accru de contagion de la crise souveraine italienne aux pays les plus exposés.