De la démocratie en Amérique
Paris le 07 Janvier 2021
Engins explosifs, bureaux dévastés, vitres cassées, portes violées, tirs d’armes à feu, des dizaines de personnes arrêtées, 4 morts dans l’attaque du Capitole cette nuit, tout cela au son des slogans « USA ! USA ! » des « proudboys », ces miliciens d’extrême droite, racistes, rétrogrades, convaincus par leur leader que leur élection leur aura été volée : Ce sont des scènes de sédition que les télévisions américaines ont relayé cette nuit, et qui auront été visionnées dans le monde entier.
Rien n’est arrivé par hasard, puisque c’est le président #Trump lui-même qui a appelé ses troupes à marcher sur le Capitole. Et ce matin, le choc est violent : une militante pro #Trump tuée à l’intérieur-même du Capitole, à l’intérieur-même de la maison qui protège chaque citoyen, de la faute-même du premier des citoyens de la nation. Venant de celle qui se présente comme la première démocratie du monde, le message envoyé au monde entier est catastrophique.
Pour saisir l’étendue du traumatisme, comprenons ce que, pour le citoyen américain, symbolise le Capitole : En haut d’une colline, largement visible, c’est le siège des deux chambres du pouvoir législatif fédéral, le sénat d’un côté et la chambre des représentants de l’autre, un site si grand qu’à l’intérieur, on y circule en métro. Situé pas très loin de la Maison Blanche, c’est par essence la maison de tout le monde, c’est la maison de la démocratie. Pour décrire leur Capitole, le registre lexical utilisé outre Atlantique – où il faut rappeler la devise « In God We Trust » - procède davantage de la sanctuarisation que du simple respect des institutions démocratiques.
Les conséquences de cette insurrection sont dévastatrices pour le parti républicain : la « droite » américaine si l’on peut parler ainsi, se retrouve coupée en deux, avec d’un côté les inconditionnels de Trump, qui le resteront quoi qu’il en coûte, et de l’autre les libéraux conservateurs ou progressistes. Et le président Trump, malgré les événements, continue d’entretenir la flamme de la sédition en maintenant un discours consistant à dire qu’il poursuivra le combat pour faire reconnaitre uniquement les « votes légaux ».
Ainsi, l’histoire nous rappelle que la démocratie en général est bien fragile : Nous ne sommes pas à l’abri de la prise du pouvoir par des déséquilibrés. Mais la démocratie est sans doute plus solide aux Etats-Unis qu’ailleurs, et on peut prendre le pari que Trump sera destitué avant la passation de pouvoir du 20 janvier.
Il y a 15 ans, nous avions voté, ignorants politiques que nous étions, contre l’institution d’une constitution européenne ; Ce faisant, nous refusions de faire de notre union européenne une confédération. Avec ce drame américain, alors que nous sommes en France confrontés aux limite d’un pouvoir hyper centralisé, c’est le moment ou jamais pour relancer le projet politique européen de relire Tocqueville et sa « démocratie en Amérique ».