De la vulnérabilité...
L'épidémie actuelle nous donne à vivre, entre autres, la confrontation brutale et incontournable avec une réalité que nos sociétés tentent le plus souvent d'occulter et qui constitue l'une des caractéristiques de notre commune humanité : la vulnérabilité. Ou plutôt l'une des caractéristiques du vivant, au-delà de nous les humains qui sommes l'une et seulement l'une des espèces vivantes de cette planète.
La compassion, à l'origine de la solidarité, repose sur la reconnaissance de la vulnérabilité chez soi et chez l'autre, et la conscience de l'impermanence de toute chose. Ainsi aujourd'hui je vais bien, je suis en bonne santé, je vis dans un pays en paix, j'ai un travail, un toit, de quoi manger, je donne et reçois de l'affection, de l'amour, de l'amitié... mais un ou plusieurs de ces facteurs d'équilibre et de bien-être peut s'altérer, voire disparaître sans que j'y sois pour rien, sans que je puisse l'empêcher et, sans l'aide d'autrui, faire face.
Je peux, demain, être ce chômeur longue durée en fin de droit. Cette personne en fauteuil roulant. Ce malade en chimiothérapie. Cet être souffrant de la perte de la personne aimée. Nous ne maîtrisons qu'une part infime de notre destin. C'est abyssal, et cela fait peur, d'autant plus que beaucoup de nos sociétés ont bâti des croyances, des parades, des paravents, des raccourcis et des mirages : ô miroir mon beau miroir, dis-moi que nous sommes les plus forts.