Des appellations de vin, chapitre quatre
Promis, on y revient, oui, on ne pouvait pas vous laisser comme ça sans savoir ce qu'il advient des vins allemands qui ne font pas partie du fameux VDP vu dans le précédent chapitre, n'est-ce pas ?
Est-ce à dire que ces vins-là seraient moins bons ? Moins remarquables ? Ce serait trop simple et trop limité surtout, je crois que Theresa Breuer d'ailleurs en rigole tellement on est loin de la vérité !
Oui, car bien des sommeliers, des critiques, des dégustateurs de tous horizons seraient heureux qu'on leur serve un verre de ce riesling Berg Schlossberg, une parcelle près de Rüdesheim dans la fameuse Rheingau (oui, vous connaissez maintenant, on peut se lâcher sur les adjectifs). Et pourtant les vins de Weingut Georg Breuer ne portent pas l'aigle symbole du VDP sur leurs capsules. C'est un choix, mais bien moins source de discussion outre-Rhin que chez nous quand un grand domaine reconnu quitte son AOC.
Comment les consommateurs s'y retrouvent-ils donc en dehors des fameux prédicats dont nous parlions la dernière fois ? Par exemple pour un blanc sec et fruité vendu 13 euros chez Soif d'ailleurs, en provenance de la Rheinhessen, j'ai nommé le Scheurebe de Katharina Wechsler ? Katharina n'a pas non plus adhéré au VDP, elle a relancé son domaine familial en 2009 et a gravi bien des échelons depuis dans son beau village de Westhofen. Voici un aperçu de ses vins épurés :
Aujourd'hui ils sont reconnus outre-Atlantique, mais alors comment font les américains pour déchiffrer les étiquettes allemandes ? Ils sont meilleurs que les français ? Qu'y a t-il d'écrit sur ces étiquettes si vous n'avez pas Kabinett trocken et Spätlese ?
"Tiens, c'est joli ce mauve, ça change du vert". Pardon...Sérieusement, que veut dire tout cela ? Vous voyez en haut de ce tableau les quatre catégories de vin dont celle appartenant au VDP. Cette dernière est bien encadrée avec les autres mais compte bien garder le haut de la pyramide pour elle.
Deutscher Wein : on demande à ce que les raisins proviennent tous du vignoble allemand. On contrôle la richesse du moût à la vendange, on autorise la chaptalisation car il faut qu'il atteigne un minimum de 8,5%, on soumet le vin à un contrôle agro-alimentaire standard. On ne dépasse pas 15% d'alcool et on peut proposer tous les styles de sec à liquoreux.
Landwein : On précise ici une région (il y en a 26 de répertoriées pour le vin), même si on laisse une souplesse de 15% dans la provenance. La richesse du moût doit être légèrement supérieure que pour un Deutsche Wein. On ne peut pas produire partout des Landweine sucrés, voir l'astérisque.
Qualitätswein (kwalitets vaïne) : A cet échelon, la région viticole officielle doit être précisée, une des 13 déjà listées précédemment. Le moût est encore plus riche à la vendange et attention, le vin va être soumis à un comité d'approbation officiel avant commercialisation. On redescend en alcool minimum, oui, car dans les vendanges tardives, plus le moût s'enrichit, plus les levures ont du mal à convertir tous les sucres en alcool, il n'est donc pas rare de voir des blancs liquoreux allemands titrant à moins de 8% d'alcool. On fait également attention aux cépages utilisés en rapport avec la région d'origine.
Sachant cela, si je vous dis que le Scheurebe trocken (sec) de Katharina est un Qualitätswein b.A., (pour bestimmte Anbaugebiet, région viticole bien précise) de la Rheinhessen, vous en savez un peu plus sur le travail accompli par la jeune vigneronne.
Tout en étant en dehors des prédicats, elle précise tout de même que son Scheurebe est un Gutswein, un vin de domaine, alors que son riesling Kirchspiel (son grand cru à elle) est un Lagenwein, un vin parcellaire. Alors, pas d'AOC, mais ces dénominations ne sont pas si fantaisistes et même plutôt précises, qu'en pensez-vous ?
Et cela continuera d'évoluer car aucun système ne satisfait pleinement, ici ou ailleurs dans le monde du vin.