Deux causes de non-conformité aux règles de licences logiciels dans les entreprises
Cela fait maintenant 5 ans que je suis consultant en Software Asset Management (SAM). Pendant ces 5 années passées chez un revendeur, puis dans des sociétés de consulting, à accompagner un certain nombre d'entreprises allant de la plus petite avec 10 postes à la plus grosse avec 60 000 postes, je me suis aperçu que les problèmes de conformité qu'elles rencontraient, étaient dues aux mêmes raisons. J'avais donc besoin de vous en partager deux, par le biais de cet article.
Les achats, ce mystère "maitrisé"
Commençons tout d'abord par celle que l'on pourrait qualifier comme étant la plus orientée "processus". En effet, lorsque j'arrive chez mes clients, j'ai souvent la même question qui m'arrive très rapidement en tête lors des rendez-vous de qualification de projet :
"Avez-vous un moyen fiable et exhaustif pour me fournir l'intégralité de vos contrats en cours ainsi que les preuves d'achat de vos licences ?"
C'est souvent à ce moment précis que mes interlocuteurs se regardent tous dans le blanc des yeux pendant quelques secondes, minutes, avant de me répondre sur un ton hésitant:
"Oui, enfin, plus ou moins..."
Je prends à ce moment conscience que ma mission sera certainement dans un premier temps de jouer les spéléologues dans les archives ou d'aider quelques jours de plus les acheteurs à collecter l'ensemble de ces données. Ceci aura donc pour effet direct, une augmentation du coût de ma mission chez le client.
A côté de cela, j'ai eu parfois certaines discussions avec des consultants, des personnes des cellules de conformité des éditeurs et j'ai eu très souvent l'impression que leur focus et donc indirectement celui des clients, portait bien plus souvent sur les inventaires, la collecte des installations plus particulièrement.
Pour moi, c'est un faux problème car dans quasiment 90% des cas, il existe déjà chez ces clients un outil qui permet d'obtenir des données d'inventaire logiciel. Alors oui c'est vrai, les données peuvent parfois faire faire des cauchemars à qui doit les traiter mais une chose est sûre, elles existent ! Pourquoi vouloir imaginer tout de suite autre chose que de les exploiter pour travailler sur la conformité ?
Mais revenons plutôt à notre problématique d'achat et je vous dirais simplement que si vous souhaitez être le plus apte à régler vos problèmes de conformité, commencez par un chantier sur les achats. Évidemment, il faudra certainement plus tard réfléchir aussi à l'amélioration de la qualité des données de l'inventaire technique mais vraiment j'insiste, faites passer ce point après la maitrise de vos achats.
Pour justifier ma démarche, je vais vous donner un exemple simple et qui parle de lui-même.
Comment arriveriez-vous à compter les licences dont vous avez besoin pour votre SQL Server hébergé sur un cluster VMware, si vous ne savez-pas si la licence a été acquise avec ou sans Software Assurance (SA) ?
Oui, vous pouvez évidemment compter deux fois. Une fois avec les règles sans SA puis une seconde fois avec la SA... Mais si vous aviez déjà eu l'information d'achat, n'auriez-vous pas été plus efficace ? J'en suis personnellement convaincu !
Le "mode projet" ou le début du gaspillage logiciel
Continuons sur le second axe de travail sur la conformité : le "mode projet" ! Si, si, vous voyez très bien de quoi je veux parler. Il s'agit de ce mode qui consiste à acheter les licences qui correspondent au nouveau projet que vous souhaitez mettre en place au sein de votre entreprise.
Cependant, comme vous n'avez pas (encore) de cellule spécialisée en SAM, vous allez certainement demander à vos architectes de vous aider à traiter ce sujet. Malheureusement comme ils n'ont pas spécialement les connaissances requises en matière de licensing, ils vous préconiseront peut-être, de racheter une licence pour la base de données de la solution. Et tant qu'à faire, car vos acheteurs n'en sont plus vraiment sûrs (ils n'ont pas encore réglé leur problème d'archivage des preuves d'achats...), vous allez, sur leur recommandation, inclure l'achat de nouvelles licences Office pour utiliser votre nouvelle solution.
Et c'est à ce moment que vous allez basculer dans ce que l'on appelle vulgairement, le "sur-licensing", ce mot barbare signifiant que vous avez acquis plus de licences que n'auriez dû.
Ce fameux mode de fonctionnement ou plutôt de déploiement de nouvelles solutions IT, projet après projet, est celui qui génère le plus cette situation. Vous vous retrouvez à faire comme ce que vous faite avec une assurance. Vous payez, pour "être sûr que"... Mais vous payez surtout pour être sûr de gaspiller votre argent et c'est pourtant bien là qu'est l'action d'une cellule SAM, non ? Celle-ci doit vous permettre de ne plus voir vos budgets disparaître sous le poids des licences et je dirais même plus, de vous faire économiser de l'argent pour porter des projets plus ambitieux encore ! C'est l'essence même de cette activité pour moi.
Alors pensez maintenant à ce que je viens de vous décrire et rappelez-vous de ces moments où vous vous êtes dit :
" Mieux vaut trop que pas assez ! "
Impliquez le SAM dans vos projets IT, même si sa valeur ajoutée n'est pas toujours évidente au premier abord pour vous, mais vous verrez que vous allez forcément y trouver votre intérêt.
Ne voyez cependant pas cet article comme une critique des processus, outils ou moyens que vous auriez pu mettre en œuvre dans votre entreprise car ce sont des situations que j'ai rencontré malheureusement maintes et maintes fois. Vous avez fait ces choix par manque d'information sur les règles de licence, sur les programmes d'achats et les contrats des éditeurs ou bien simplement car vous n'aviez pas pris conscience du risque.
Cette prise de conscience de l’intérêt du SAM en France n'en est encore qu'à ses débuts, je trouve et c'est malheureux. Mais vous allez désormais être en avance sur votre voisin, vos concurrents car vous aurez su anticiper au moins deux situations de mise en non-conformité.
J'aurais voulu vous parler d'encore bien des choses mais elles feront certainement l'objet d'autres articles que j'aurai encore le plaisir de rédiger concernant mon sujet de prédilection.
Alors, merci d'avoir pris le temps de lire ce billet et j'espère que vous serez nombreux à commenter et partager avec moi votre vision du SAM.
Software Asset Manager chez Fnac Darty
8 ansJe viens de prendre connaissance de vos commentaires à tous les deux, David Morin et Patrick Gillet et je vous remercie pour cela. Je suis aussi assez d'accord avec le fait que certains revendeurs/LSP, ne sont pas toujours les meilleurs conseillés vis à vis de la conformité des licences au moment du processus de vente. J'avais d'ailleurs par le passé voulu monter une offre d'avant-vente "licensing" mais ce projet n'a pas aboutit ! Je pense que la force des revendeurs est la base de connaissance qu'ils peuvent avoir vis à vis de chaque éditeur, malheureusement ce matériel est essentiellement utilisé pour vendre plus mais pas toujours mieux. Mais je ne vais pas rentrer dans le débat du SAM chez le LSP sachant que chacun à sa propre structure indépendante des ventes (sauf exceptions). Mais, oui, dans tous les cas ce qu'il faut chercher c'est comment acheter selon ses besoins réels sans se laisser influencer par une sécurité quelconque (de la maintenance inutile, un contrat global plus simple a gérer, des promos...). Pour la communication, encore une fois je suis tout à fait d'accord avec toi David. Si des processus sont mis en place mais que les canaux de communications sont coupés cela ne pourra jamais fonctionner. Si un SAM Manager n'est pas impliqué ou même au moins informé, des projets en cours ou à venir dans le SI par exemple, c'est qu'il y a déjà un élément manquant dans le processus. En tout cas merci à tous pour vos réactions, cela m'encourage à écrire de nouveaux articles et à enfin pouvoir parler de SAM dans le langue de Molière ;-)
Directeur de Projet Cloud chez SCC France avec expertise en Microsoft 365
8 ansPour trop de nos clients, SAM rime avec conformité lors d'un audit éditeur. Alors que SAM devrait rimer avec gestion intelligente et proactive. Certes l'outil est important pour avoir une bonne mesure de ce qui est déployé et utilisé réellement sans être chronophage en matière de calcul de consommation, mais, comme Jérémie le faire fort justement remarquer, le travail le plus complexe est celui de la chasse aux droits acquis, c'est à dire les Preuves d'Acquisition. C'est cela qui rend notre métier plus qu’intéressant nous sommes à la fois des Indiana Jones, à la recherche de la licence perdue et des Maestros tentant d'expliquer les bonnes pratiques à nos clients pour éviter de perdre de l'argent avec du sur-licensing ou du sous-licensing. Le propre d'un LSP ou d'un revendeur pour parler français est normalement de bien conseiller son client lors de sa démarcher d'achat, malheureusement, trop souvent les commerciaux licences ne pensent qu'à vendre et faire du chiffre à court terme et non pas à la l'intérêt de leur client. C'est pourquoi nous essayons avec mes deux équipes d'apporter à la fois une démarche de mise en conformité, mais également de compréhension des licences et de la démarche à avoir pour travailler intelligemment avec les différents éditeurs.
Microsoft Cloud Solution Product Specialist
8 ansJe rajouterais qu'une stratégie d'entreprise redescendue à tous les niveaux de l'organisation (comme les équipes projet, It , achats et les métiers) peut à la suite d'une revue de conformité réduire fortement les dépenses logiciels. Aligner les achats aux besoins réels de l'entreprise que ce soit un instant "T" ou pour les années à venir est le rôle d'un SAM Manager ou d'un DSI et non pas d'un acheteur! Pour le faire il se doit de connaître et comprendre tous les projets de sa structure...donc "oui" la communication est essentielle à la réussite d'une politique SAM et doit impérativement impliquer chaque service dans l'entreprise.
Head of IT Asset Manager
8 ansUn article fort intéressant et plein de bons sens comme nous en avons eu l'occasion d'en discuter à plusieurs reprises, par contre un élément qu'il ne faut pas oublier et qui a également un impact important est la "communication", malheureusement on a souvent l'occasion de constater que les différentes équipes IT, service Achat, et la Direction n'arrivent pas à communiquer et à se comprendre. Un problème qui engendre des situations de sur-licensing ou l'inverse non nécessaire. Le rôle du SAM est de créer un canal de communication et initier une culture autour de la gestion des actifs logiciels. Un autre fait important est que les entreprises n'ont pas conscience du potentiel interne déjà présent autour de la gestion des actifs logiciels ... et oui certains font déjà du SAM sans le savoir... Je suis tout à fait en accord avec Lionel et toi-même au sujet des outils et c'est d'autant plus vrai lorsque les DSI pensent que l'outil SAM va résoudre tous leurs problèmes, mettre en place les processus nécessaires ou bien même permettre d'éviter les audits...Les outils sont des facilitateurs à votre démarche SAM mais pas la solution à tous vos problèmes de non-conformité. La prise de conscience est d'autant plus nécessaire de traiter la gestion des actifs logiciels comme un réel sujet d'entreprise à tous les niveaux de celle-ci car malheureusement pour les clients les audits éditeurs sont loin de prendre fin...
Responsable IT au sein du groupe RAS INTERIM
8 ansArticle amusant :-), et très intéressant car on n'est plus dans ce concept de "SAM", qui ne veut plus dire grand chose, mais le SAM = Gestion d'un Parc Logiciel, très concret, très factuel et plein de bon sens. (D'ailleurs, nous, nous ne voulons plus utiliser ce mot SAM, et aidons nos clients pour qu'ils fassent ... du SAM ... sans le savoir) J'ajouterai une absence de communication entre équipes, et une méconnaissance, tout simplement, des règles Licensing de base des grands éditeurs. Enfin, complètement en phase avec le mythe de l'outil "magique" survendu. Les données sont souvent déjà disponibles (ou peuvent l'être assez facilement) et on oublie les à-cotés, qui ont certes un coût, mais, finalement, moindre, qu'une énième solution qui va s'ajouter aux Applications déjà installées.