Du travail confiné au télétravail ?
Des négociations pourraient s'ouvrir entre partenaires sociaux, annonce le journal Les Échos. Une bonne nouvelle ! Un nouveau cadre est désormais nécessaire au télétravail.
Quelques vœux post confinement.
Ne nous trompons pas, ce que nous vivons ces derniers mois n'est pas du télétravail. C'est un travail confiné à la maison : des enfants ou des parents dont il faut s'occuper, aucune interaction sociale extérieure permettant de "changer d'eau au bocal", des outils informatiques inadaptés parfois, des espaces de travail pas toujours adaptés (chaise, bureaux, éclairage…), …
Donc, le "monde d'après" est-il un idéal platonicien, gonflé au romantisme confiné pour combler l'angoisse de l'incertitude ? ou, saura-t-il embrasser le réel avec volonté et ambitions ? Saurons-nous poser les questions qui replacent le travail de chaque personne "en première ligne" du renouveau tant promis? Saurons-nous comprendre que le travail construit chacun de nous, construit la société, tout autant que la réussite des entreprises tant nécessaire?
Il n'y aura pas de posture à avoir dans le monde d'après, il y a le réel auquel nous seront tous prêts ou non à faire face.
Le réel, ce sera :
- de faire en sorte que les engagement des opérateurs téléphoniques, pris depuis près de 20 ans auprès des pouvoirs publics soient tenus : de l'internet haut débit partout en France métropolitaine et outre mer, à la ville , comme à la campagne! Il faut que l'état soit capable de faire mieux que de "faire la grosse voix", ou, plus récemment, de se démettre de promesses un peu hâtivement faites en campagnes (électorales). Demandez aux gilets jaunes…
- arrêter de construire et proposer aux salariés, par des "ateliers participatifs" permettant de choisir la couleur des chaises, des open spaces dont la seule vertu est de gagner quelques mètres carrés. Il existe un nombre d'études impressionnant depuis plus de 50 ans sur la perte de productivité (20 à 30%) et l'inconfort personnel et collectifs qu'induisent ces modèles d'organisation. Arrêtez, chers collègues entrepreneurs, de donner vos décisions de votre entreprise aux seuls financiers, même si vous en êtes le dirigeant salarié. Arrêtez d'adopter le "style start up" que vous croyez faire moderne ! La Start up a adopté l'open space parce qu'aménager des locaux c'est coûteux et quand vous vivez sur les levées de fonds cela fait désordre de se faire faire des espaces de travail plus sophistiqués.
- le réel sera de construire des organisations agiles et réactives, c'est à dire souples, préparées à l'imprévu, capables de faire face au mieux aux impondérables. Comment ? En prévoyant, en prévenant, en formant, en jouant de solidarité avec les entreprises de notre quartier, de notre région, de notre pays, en étant non doctrinaire, en faisant confiance au personnel et aux managers. En arrêtant de croire que l'agilité est la réactivité quotidienne - 5 minutes tous les matins debout en prenant un café : les méthodes dites agiles tendent à construire un horizon de poissons rouges (je n'ai rien contre les poissons rouges :-)
- le réel sera de reconsidérer ce qui fait que nos entreprises tiennent vraiment debout. Pas seulement des consommateurs, pas les heures travaillées au delà de 35 heures, mais aussi un environnement de services publics, modernes, replaçant la mission et les personnes qui l'animent en première préoccupation, des personnes qui ont besoin de souffler de temps en temps, de se construire, d'être valorisées, au delà des taches à réaliser. Le télétravail, est affaire de confiance et d'engagements réciproques.
- le réel sera de considérer tous les atouts et les contraintes de tous les territoires et pas seulement des métropoles. Le télétravail peut être une réelle opportunité pour reconstruire un modèle de vie en France, dans toute la France. Télétravailler à la campagne ne doit pas être un choix de misanthrope ou d'anachorète, il faut pouvoir construire sa vie, sa famille, ses loisirs…
- le réel sera de considérer et valoriser la responsabilité sociale et sociétale de l'entreprise au-delà des labels d'entre-soi. Arrêter de faire croire à chacun que la pleine réalisation de soi au travail passe par l'auto-entrepreneriat, de penser que pour résoudre une situation de conflit, de burnout ou de harcèlement il suffit de faire une rupture conventionnelle, que le reclassement des cadres séniors (plus de 45 ans…) peut se faire par un "accompagnement formatif" et leur installation en tant que coach… Il s'agira de renforcer des liens honnêtes et équilibrés au sein des entreprises.
- le réel sera que les partenaires sociaux sachent inventer un cadre ambitieux de revalorisation du travail à tous les niveau. Il faut désormais ne plus penser en seul intérêt personnel et individualiste. Combien d'entreprise seraient mortes si l'état, tant détesté parfois, n'avait pas été là, si les associations, les bénévoles, les professionnels de santé, les avocats, les salariés, les artistes, les entrepreneurs ne s'étaient pas tous mobilisés, sans calcul.
Le réel c'est donc de considérer le télétravail comme un point d'entrée pour repenser ensemble la vie au travail. Ce sera d'agir.