Emploi : l’ère du partage.

Emploi : l’ère du partage.

Longtemps mètre-étalon du monde du travail, le sacro-saint CDI décroché à 20 ou 22 ans et plus ou moins jalousement conservé jusqu’à la retraite (et tant qu’à faire chez le même employeur, qui endossait souvent le statut d’un véritable membre de la famille !) laisse peu à peu sa place à de nouvelles formes d’emploi moins exclusives et plus flexibles. Alors qu’il y a quinze ou vingt ans, elles étaient totalement subies par les salariés, on assiste de plus en plus à une acceptation, voire à une attirance vers des formes de travail plus précaires : CDD qui permettent de tester un nouvel employeur sans s’engager, cumul de plusieurs contrats salariés pour ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier en cas de lassitude ou de licenciement soudain, portage salarial et bien sûr création d’entreprise.

 

Avant la création et l’avènement de l’auto-entrepreneuriat, les Français avaient déjà pris goût à la création d’entreprise. Grâce à ce statut révolutionnaire qui fait encore polémique, la création d’entreprise est devenue de plus en plus souvent une porte de sortie du salariat classique, voire une alternative envisageable avant même son premier emploi salarié.

 

Le monde bouge, le marché de l’emploi suit

 

Cela peut paraître un cliché, mais il est important de le rappeler : comment imaginer une seconde qu’on divorce de plus en plus, qu’on parte régulièrement aux quatre coins du Monde sur des vols low cost, qu’on accède à de plus en plus de produits culturels et de loisirs, que l’on s’informe à la vitesse de l’éclair, mais que l’on continue à rêver d’un CDI à plein temps dans la même entreprise pendant 40 ans ?!

 

Cette cohérence socio-culturelle complique autant la vie des employés (risque accru de périodes de chômage plus ou moins longues, difficultés à obtenir un prêt immobilier, déménagements imposés...), que celle des employeurs (difficulté à garder longtemps de bons éléments nécessaires à la bonne image de l’entreprise et donc à la réussite durable de l’activité, faible emprise hiérarchique sur les freelances...). Il y a quelques décennies, on recommandait tel prestataire parce qu’on y connaissait un référent connu et de qualité depuis 15 ans et qu’on savait qu’il allait y rester jusqu’à la retraite. Aujourd’hui, le discours c’est plutôt «A l’époque, il y avait une directrice vraiment très bien, mais elle n’est sûrement plus là, à toi de voir !».

 

Des compétences et des profils mieux répartis ?

 

Entre le CDI - à temps plein ou à temps partiel - ou le CDD et la création d’entreprise, il existe d’autres formes d’emploi en plein essor : les groupements d’employeur, le portage salarial et le multisalariat. Dans ces trois cas, un point commun avec l’entrepreneuriat : le fait que les travailleurs interviennent dans plusieurs entreprises. 

 

Le bon côté c’est bien sûr une adaptabilité optimale aux besoins spécifiques d’une entreprise, que ce soit de manière pérenne ou de manière ponctuelle. Une PME de 12 employés peut ainsi avoir absolument besoin d’un chargé de communication, mais seulement deux jours par semaine. Le groupement d’employeurs ou un CDI à temps partiel peut répondre à ce besoin de manière plus fiable qu’un simple contrat de prestation avec factures ou par le biais d’une société de portage.

 

Avec une approche par projet ou mission - la grande tendance du moment - une entreprise peut au contraire avoir besoin d’un chef de projet à plein temps sur 8 ou 18 mois : le CDD reste alors une solution avantageuse.

 

Des agences spécialisées développent différents services répondant à ces nouveaux modes de fonctionnement. Chez les employeurs, la tendance est à l’adaptabilité en temps réel : «je contracte, puis je recrute en conséquence». On trouve de plus en plus d’entreprises qui cumulent les différents types de partenariats, même (et surtout ?) chez les TPE : une équipe de 5 personnes peut par exemple être composée de deux CDI à temps plein, d’un CDI à temps partiel, d’un alternant et d’un agent commercial indépendant commissionné à 100%.

 

Même si le débat est encore âpre entre, d’un côté, les pourfendeurs de la précarisation de l’emploi à grand échelle et, de l’autre, les défenseurs d’une grande flexibilité rassurante pour les employeurs qui naviguent un peu à vue côté carnet de commandes, il ne fait aujourd’hui aucun doute que l’hyper-mobilité grandissante des employés, et notamment des cadres, est devenue une caractéristique inéluctable de notre économie. Un fait, plus qu’une idéologie. Autant tout mettre en place pour gérer cette évolution au mieux, plutôt que de vouloir y résister à tout prix.

 

 

Pour approfondir

 

> Une étude de fin 2017 diligentée par l’Apec, sur la relation des cadres avec les nouvelles formes d’emploi.


Fatiha HIDA

Conseillère en insertion professionnelle, formatrice

4 ans

En effet c’est un fait. Les entreprises créent la demande, et tout suit derrière. Les incertitudes, la non visibilité des entreprises et même le comportement des recrutés changent. On doit s’adapter sans cesse et avancer.

Aurore CHAVANON

Conseillère RH / CRHA

6 ans

Sans oublier le temps partagé en prestation de service qui libère encore plus l'entreprise utilisatrice puisque soumise à aucune charge salariale et à aucun risque prud'homal !

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