Enquête sur les conditions de travail dans le domaine de textile au Maroc: quelle vie, quel droit ?

Enquête sur les conditions de travail dans le domaine de textile au Maroc: quelle vie, quel droit ?

Nous ne sommes pas les premiers à tirer la sonnette d’alarme, mais nous sommes persuadés encore une fois que rien ne va dans ce domaine à part les sommes que gagnent les teneurs du marché textile au Maroc.

Cette enquête est réalisée en 2012 auprès d’un échantillon représentatif de 320 salariés d’une entreprise composée de 2 sites, l’enquête projette  un peu de lumière sur l’environnement et les conditions de travail,  ainsi que la perception du risque des ACD chez les ouvriers.

Synthèse de l’enquête

Les conditions de travail

Les conditions de travail c’est (l'ensemble des facteurs à l'exclusion des caractéristiques individuelles des travailleurs, qui peuvent influencer les conduites au travail. Ces facteurs représentent l'ensemble des caractéristiques internes et externes dans lesquelles s'inscrit le travail. Il est tout autant difficile de mettre en lumière ce qui constitue de bonnes conditions de travail (absence de souffrances ne signifie pas l'existence de bonnes conditions du travail). Ces bonnes conditions peuvent être exprimées comme telle : « ce sont celles qui donnent au travailleur la liberté de travail favorable à sa santé (Volkoff : 2007)». Autre possibilité de connaître objectivement les conditions de travail : une variation relative dans le temps, amélioration ou dégradation qualificative que des groupes de salariés soulignent.

Les conditions de travail est l'environnement dans lequel les employés vivent sur leur lieu de travail, elles peuvent résulter d'un mauvais facteur de risques d'accidents du travail ou de maladies professionnelles. MANZI (2008), sur ce sujet déclare « si les conditions de travail sont bonnes, on remarque moins d'absences, moins de fatigue physique ou nerveuse moins des risques d'accidents ou maladies, un accroissement de la production et de bonnes relations subordonnés- supérieurs ». Ces conditions de travail désignent d'une manière générale l'environnement dans lequel les employés vivent sur le lieu de travail.

D’après Citeau (1997), LEPLAT affirme que  les conditions de travail s'orientent selon trois orientations :

  • Orientation organique c'est-à-dire l'adaptation du travail à l'individu
  • Conditions de travail elles - mêmes lors que l'outil de travail réponse aux besoins des travailleurs, un climat de travail favorable
  • L'hygiène et santé.

Citeau, lui aussi classe les conditions de travail en :

  • Les conditions physiques: les caractéristiques des outils, des machines, de l'environnement immédiat du poste de travail (bruit, chaleur, éclairage,....)
  • Les conditions organisationnelles: Horaires de travail, les procédures
  • Les conditions sociales, en particulier la rémunération, la qualification, les relations avec la hiérarchie, les conditions de transport, logement, l'assurance maladie.

Les résultats relatifs aux nuisances et conditions de travail, révèlent que les sujets de l’étude partagent une même perception de certaines dimensions que nous avons étudié, dont la perception des conditions de travail et celle des nuisances aux quelles ils sont exposés durant la réalisation de leur travail à savoir, le bruit, la poussière, les postures et les agents chimiques dangereux.

Cette perception partagée entre les sujets de l’étude réside dans le fait qu’ils ont révélé que les conditions en question sont  influencées par des nuisances physiques et sonores qui restent défavorables et aussi inévitables mais leur impact peut être réduit.  

Selon les résultats ont a 67.70 % des salariés ont  affirmé que les conditions de travail sont défavorables à cause des nuisances et influences négativement leurs santés physiques contre 32.30% qui ont dit le contraire.

On constate ainsi de nombreuses violations des conditions sanitaires et de sécurité. Les travailleurs sont parfois exposés à des exhalations dangereuses notamment quand est utilisée la technique du sablage des jeans, une technique qui consiste à projeter du sable à très haute pression pour obtenir un aspect usé et qui est surtout très dangereuse pour la santé des ouvriers. Suite à des pressions, les marques comme H&M ou M&S étaient les premières à l’interdire en 2010.

Parmi les causes des mauvaises conditions on trouve aussi: le bruit, la poussière et les mauvaises postures.  En se basant sur les chiffres de l’enquête, nous disons que les conditions de travail ne sont pas favorables et nécessitent d'être améliorées surtout que les conditions du travail expriment tous ce qui caractérisent une situation de travail peuvent favoriser ou freiner l'activité des travailleurs.

94.50% de notre échantillon confirment qu’ils sont exposés à la poussière, cela ne peut que pousser les psychologues de travail et les ergonomes à tirer l’alarme. Sachant que   l'exposition répétée et à long terme pour certains irritants au travail peut conduire à un tableau de maladies pulmonaires qui peuvent avoir des effets durables, même après l'exposition cesse.

67.7% des enquêtés  déclarent qu’ils sont exposés aux produits dangereux. Sachant que les ouvriers sont tous exposés aux produits dangereux du fait que l’industrie de textile se base, de l’amant à l’avale des processus, sur les produits chimiques surtout la section du sablage et teinture. Rappelons que Les substances chimiques ou leurs mélanges sous forme de gaz, de liquide, de solide, peuvent provoquer des effets plus ou moins graves sur la santé soit en cas de contact, unique ou répété, avec la peau, soit par inhalation ou par ingestion : aigus, comme des irritations, brûlures, troubles de conscience, chroniques sur de nombreux organes, allergies (eczéma, asthme), pneumoconioses, cancers … Certaines affections peuvent se manifester des années après l’arrêt de l’exposition.

Nous ajoutons qu’en milieu textile et habillement parmi les substances camouflées dans les placards, certaines sont totalement interdites. D’autres ont un usage règlementé, avec des seuils autorisés – comme le formaldéhyde. Mais ces seuils sont régulièrement dépassés utilisés pour assouplir les plastiques, ces perturbateurs endocriniens notoires sont souvent présents sur les dessins, inscriptions et décorations collés sur les pulls, tee-shirts, casquettes ou pyjamas. De plus l’ouverture de l’industrie marocaine sur le marché chinois provoque d’avantage ce phénomène.

Pour les postures ont a remarqué que  77.40% des enquêtés affirment  qu’ils sont victimes des postures assises pénibles liées à l’activité du travail (Piqueuse/Piqueur). 78% travaillent en debout, affirment qu’elles sont exposées aux risques à cause de cette position de travail.

Soulignons que toute posture de corps peut entrainer progressivement :

  • De l’inconfort ;
  • De la fatigue
  • Des lésions musculo-squelettiques lorsqu’elles sont maintenues et répétées, une réduction durable des capacités fonctionnelles.

Sachant aussi que, qu’il y a des Éléments qui entraînent de mauvaises postures :

  • Dimensions du poste de travail (hauteur, profondeur) ;
  • une chaise trop basse amène les coudes au niveau des épaules,
  • un plan de travail trop bas provoque l’inclinaison du tronc vers l’avant, ce qui peut entraîner une position de déséquilibre.

Pour le bruit, on constate que  65.90% confirment la souffrance du bruit. Rappelons encore que Le bruit constitue une nuisance majeure dans le milieu professionnel. Il peut provoquer des surdités mais aussi stress et fatigue qui, à la longue, ont des conséquences sur la santé du salarié et la qualité de son travail. On considère que l’ouïe est en danger à partir d’un niveau de 80 décibels durant une journée de travail de 8 heures Si le niveau est extrêmement élevé (supérieur à 130 décibels), toute exposition, même de très courte durée, est dangereuse. Elle peut conduire à une surdité, phénomène irréversible. Les surdités peuvent être reconnues comme maladies professionnelles.

Le bruit est cause de fatigue et de stress et agit sur les systèmes nerveux, cardiovasculaire et digestif. Mais, il n’affecte pas seulement la santé. En empêchant de se concentrer, il nuit également à la qualité du travail et peut même être à l’origine d’accidents.

On remarque finalement que seulement 37.80%  pensent être capable de rester au travail jusqu’à l’âge de retraite, 42.10% des questionnés, désirent et souhaitent  rester au travail jusqu’à leur mise à la retraite. Cela signifie que ce manque de désir tue le sentiment  d’appartenance, ce qui influence l’engagement de l’opératrice et de l’opérateur, et stimule en lui  un désintérêt  au travail et au rendement.

Recommandations

Les responsables et les spécialistes doivent travailler sur l’amélioration des points suivants :

La réduction des sollicitations au poste :

  1. L’outil :

Il nous parait indispensable d’aborder un facteur primordial dans les ateliers en général, et dans les ateliers de montage (confection) en particulier. Le problème des chaises non réglables, nous incite à se poser la question de caractères physiologiques des opérateurs, n’est il pas nécessaire que le concepteur prend en considération ses caractéristique ? comme l’a souligné (Alain Wisner,1996), cité par Laerte Idal Sznelwar et Hélène LeDoaré, (2006).

Le poste de repassage, aussi  pose le problème de l’adaptation de l’outil à la tâche. Il faut donc rappeler la nécessité de fournir une table jeannette convenable à l’utilisateur.

Dans ce cadre, nous pourrions proposer une mise en place d’une machine de repassage de gros calibre.

  1. L’aménagement du poste :

L’atelier doit avoir un vacuum pour aspirer les poussières. Aussi le marché peut approvisionner l’entreprise en matière de casques, lunettes et bouche- oreille.

  • le poste de l’emballage :

Nous avons mis en évidence que la mise en position de grandes tables servant au pliage des produits finis.

Pour le travail du stockage, nous voyons indispensable la présence de cadis servant le transport des colis, parfois il y a des femmes qui sont obligé de lever des poids dans le but de dégager leur espace de travail.

Ainsi nous pourrions proposer des poses pieds pour les opérateurs et opératrices.

  • le poste de teinture et délavage

Nous croyons que, des outils isolants sont disponibles sur le marché, alors l’acquisition de ce matériel est primordiale

  1. l’organisation du travail :

Il est déjà établi que la fréquence des mouvements répétitifs est directement liée à la cadence du travail.

La répétitivité des gestes est alors importante et joue un rôle  majeur dans l’apparition des TMS.

L’objectif général de l’action sur l’organisation du travail est de diminuer la répétitivité des tâches, en diminuant la cadence et en alternant les tâches répétitives et non répétitives.

Dans le cas du travail de  repassage, nous voyons la nécessité de  prolonger les pauses et permettre  un repos suffisant au niveau des articulations

Ainsi nos propositions pour l’amélioration des conditions de travail s’orientent vers une réduction de la cadence imposée aux opérateurs et opératrices  qui est une étiologie principale reconnue dans la survenue des troubles musculo-squelettiques, mais aussi une conception différente des espaces de travail au niveau des postes à risque, avec notamment des propositions de fournir des outils et du matériel ergonomiques à l’égard d’autres entreprises.

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