Face au coronavirus, Esprit gourmand accélère sa diversification Par Maëva Gardet-Pizzo, La Tribune
Leader de la distribution de fruits secs torréfiés à destination de l’hôtellerie de luxe, cette PME installée aux Pennes-Mirabeau souhaite se diversifier pour être moins dépendante de la conjoncture. Pour ce, elle souhaite renforcer sa présence dans les magasins bio et les épiceries fines.
Créée en 1922, l'entreprise familiale Esprit gourmand n'a eu de cesse de se réinventer au gré des générations qui s'y sont succédé. Au départ, elle fait du négoce de produits alimentaires et est assez généraliste. Lorsque le fils du fondateur reprend les rênes dans les années 1950, il se lance dans la torréfaction de fruits secs en parallèle de l'alimentation générale. Une activité que développe un peu plus la troisième génération à la tête de la PME, celle de Didier Najarian et de son frère aîné Éric. "Nous avons beaucoup transformé pour des entreprises alimentaires. A l'époque, nous représentions 50 % du marché français des pistaches grillées et salées, même chose pour les amandes", raconte Didier Najarian.
La conquête de l'hôtellerie
Puis à la fin des années 1990, après avoir fait face à "quelques problèmes financiers", la PME fait le choix d'adresser un nouveau secteur : l'hôtellerie. "Nous avions un savoir-faire dans la torréfaction et nous cherchions un secteur dans lequel le valoriser". Or, il se trouve que les hôtels, même de luxe, disposent d'assez peu de possibilités pour s'approvisionner en fruits secs et font donc appel à des grossistes généralistes.
Ce positionnement permet à l'entreprise d'affirmer le caractère haut de gamme de son offre. "La clientèle de ces établissements est sensible à la qualité et la question des coûts est moins problématique que dans la grande distribution".
Pour séduire ce marché, elle fait le choix de matières premières issues de la dernière récole de producteurs méditerranéens. Les fruits secs sont transformés dans son usine de 5000 m² aux Pennes-Mirabeau, où travaillent actuellement une soixantaine de salariés. "Nous essayons de garder des process qui se rapprochent le plus possible de l'artisanat". Les produits sont fabriqués à la commande, dans des délais très courts pour plus de fraîcheur. Ils sont conçus sur-mesure car les clients, des hôtels parfois voisins, ont à cœur d'offrir des produits différenciant.
Quant à la gamme des produits, elle a été étoffée pour répondre à la demande des hôteliers. La PME fabrique ainsi des mélanges de céréales pour le petit déjeuner, des produits apéritifs ou encore des ingrédients pour la pâtisserie tels que de la poudre d'amande ou des pralinés.
Avec cette stratégie, Esprit gourmand est parvenue à convaincre 85 % des hôtels quatre ou cinq étoiles française, ainsi que des établissements en Europe, Asie et Moyen-Orient. L'hôtellerie représente à ce jour 80 % de son activité. Quant à son chiffre d'affaire global, il s'élevait à 15 millions en 2019.
A la recherche de nouveaux débouchés
Mais si l'hôtellerie lui a permis à l'entreprise de se développer, l'entreprise pense depuis quelques années à s'adresser à de nouveaux clients. "Avec les gilets jaunes et les attentats, nous avons constaté que ce secteur est très sensible à la conjoncture". Et l'actuelle crise du coronavirus confirme cette analyse. "Nous sommes quasiment à l'arrêt. Seuls 15 à 20 % de notre activité subsiste". Didier Najarian pense que l'inertie qui frappe l'économie sera plus durable dans l'hôtellerie. "Certains affirment qu'elle reprendra en 2021 pour ne retrouver son rythme de croisière qu'en 2022".
Alors l'enjeu est "d'essayer de perdre le moins de temps possible", en s'ouvrant à de nouveaux secteurs pour lesquels la reprise semble moins lointaine. Parmi eux : les magasins bio et les épiceries fines. "Nous sommes déjà très présents à la Grande épicerie de Paris, l'idée est de répéter cette logique dans d'autres magasins importants. Nos commerciaux essaient d'activer le mouvement".
Dans cette démarche, Esprit gourmand espère voir reconnu son engagement en faveur de la production locale et de l'environnement. "Nous aimerions que nos clients profitent de la crise pour envisager différemment l'avenir. Certains achètent à l'autre bout de monde pour quelques centimes d'économies. Mais nous sommes là, tout près. Aujourd'hui, les gens ont du mal à intégrer que face à un prix, il y a une qualité en rapport. Nous, nous avons une démarche de suppression des plastiques, nous installons une centrale solaire... Cela a un coût, même si ce n'est pas toujours évident à faire comprendre".
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