Francophonie, le Brésil et le Canada: Une réflexion personnelle

Traditionnellement, les derniers jours de mars marquent la fin des évènements entourant le mois de la Francophonie. À travers le monde, le 20 Mars est célébré la Journée de la Francophonie. Officiellement pays bilingue, le Canada est fier de faire partie de cette initiative et de promouvoir la langue française à travers le monde.  En tant que francophone, et diplomate canadien, j’ai été ravi de faire partie activement aux activités visant à accroître la connaissance de la culture francophone au Brésil.

Ravi mais également fier;  la nomination en novembre 2014 de Michaëlle Jean, ancienne gouverneure générale du Canada, en tant que Secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), est un point d’orgueil pour tous les Canadiens cherchant à promouvoir le français à l’étranger. Rappelons que l’OIF est une organisation qui comprend environ 80 pays et gouvernements avec comme objectifs de promouvoir et d'assurer la culture francophone, promouvoir la paix et la sécurité, la diversité linguistique et culturelle, le développement durable et la réduction de la pauvreté. Les actions développées par le gouvernement du Canada au Brésil, s’inscrivent dans les objectifs de l’OIF, particulièrement dans le domaine de l’éducation.  

Depuis mon premier passage au Brésil en 2001, je reste frappé par la force des liens entre le Brésil et la culture francophone. À mon avis, peu de pays d’Amérique latine connaisse des liens culturels aussi forts avec le français que le Brésil. De l’Empire du Brésil jusqu’aux relations commerciales actuelles, la langue française a toujours su se démarquer dans le géant de l’Amérique du sud. Ces liens remontent jusqu’au début de la colonisation européenne du continent sud-américain,  quand le vice-amiral de Bretagne, Nicolas Durand de Villegagnon, devient l'un des personnages principaux de la tentative française de s’implanter au Brésil. C’est en 1555, dans l’ombre du fameux Pain de Sucre, que Villegagnon, s’établit avec une petite communauté de colons français protestants et fonde la France Antarctique. Les forces portugaises chasseront la communauté française 5 ans plus tard, mais pas avant que certains colons se soient enfuis dans les communautés autochtones environnantes. La France rencontrait le Brésil.

Autres exemples intéressants incluent la venue d’une grande mission artistique française au Brésil, à l’époque de l’Empire, parrainée par le gouvernement portugais. Comportant 40 artistes de renom tels que les peintres français Joachim Lebreton, Nicoles-Antoine Taunay, Jean Baptiste Debret et l'architecte Auguste Henri Victor Grandjean, la mission allait développer de nombreux projets au Brésil impliquant des peintures, des sculptures et la construction de plusieurs bâtiments. Debret allait également être un des artistes préférés du premier empereur Brésilien, Pedro I. Le successeur de ce dernier, João Pedro II allait trouver l’exil en France en 1889. Ses funérailles à Paris furent suivies par plus de 80.000 personnes.

Une autre petite connexion curieuse entre le Brésil et la France concerne le partenariat entre l'illustre aviateur Alberto Santos-Dumont et le célèbre joaillier Louis-François Cartier. En 1904, l'aviateur brésilien se plaint à son ami Louis Cartier de l’impraticabilité d’utiliser des montres de poche pendant qu’il pilote ses aéronefs. Cartier conçoit un plan de montre-bracelet avec un cadre carré : le fameux modèle de montre "Santos" est né.

 Du côté académique, les intellectuels Claude-Levy Strauss, François Braudel et Roger Bastide allaient avoir un rôle déterminant dans la fondation de l’Université de Sao Paulo en 1934. Aujourd’hui l’une des meilleures universités en Amérique latine, l’USP a vu le jour en s’inspirant du modèle académique français.

Qu’est-ce que cela signifie pour le Canada au Brésil? La francophilie brésilienne donne, à mon avis, une opportunité enviable de renforcer nos liens culturels, académiques et commerciaux avec ce géant de l’Amérique du sud. Déjà, le Canada est devenu un endroit de prédilection pour les étudiants brésiliens voulant étudier à l’étranger en partie parce que nous offrons des études en français de premier plan. Il y a deux semaines, j’ai eu le plaisir de recevoir une délégation de représentants d’établissements d’éducation francophone en mission pour promouvoir leurs programmes au Brésil. Le plus formidable était que la mission comportait non seulement des grands comme l’Université de Montréal mais également des établissements d’importance dans nos milieux francophones et bilingues tels que le l’Université de Moncton, l’Université Ste-Anne et les Cégeps de l’Abitibi-Témiscamingue et de Trois-Rivières.

En ce qui concerne le commerce, le Brésil et le Canada francophone ont aussi su tisser des liens étroits depuis des décennies. Des entreprises francophones de partout au Canada font des affaires au Brésil, les similarités liées à la culture latine facilitent le développement des relations personnelles et d’affaires. Par ailleurs, la province de Québec a développé plusieurs accords bilatéraux avec des états brésiliens, entre autres avec le Paraná mais aussi avec Rio de Janeiro.

Au niveau de la recherche, un des meilleurs exemples est celui où les universités du G3 (Montréal, Université Libre de Bruxelles et Genève) ont récemment signé une entente avec la Fondation pour le soutien à la recherche de l’État de São Paulo (FAPESP) permettant aux chercheurs des Universités G3 et des universités brésiliennes de l’État de São Paulo d’obtenir des fonds de recherche pour des projets communs.  C’est à travers ces partenariats de recherche que les technologies d’innovation voient le jour et permettent le développement de nouvelles technologies. Tel que le partenariat entre Cartier et Santos-Dumont….