Gérer les risques environnementaux et énergétiques, un vrai défi, et pas pour après demain.
Le redémarrage économique et industriel, suite au covid-19, promis autant que rêvé, par tous les politiques ne sera pas un long fleuve tranquille, et les risques vont y jouer un rôle clé.
A preuve, plusieurs éléments :
- Le choc économique a été tel, que le retour à la normale prendra beaucoup, beaucoup, beaucoup plus de temps que les 3-4 mois dont certains ont parlé.
Le célèbre taux U6 de chômage aux états unis, jugé le plus représentatif, mais sur lequel peu communiquent, vu qu’il n’est historiquement pratiquement JAMAIS descendu en dessous du fatidique 7,5%. Même en pariant sur un rebond vers le bas, il est difficile d’imaginer que cela prenne moins d’un an ou deux.
- Les déficits engagés pour lutter contre le COVID, ont explosé tous les plafonds, en conséquence de quoi, l’ardoise à payer va être particulièrement lourde et peser sur les investissements publics et privés.
- La crise a montré, avec force, la faiblesse de notre système économique et financier mondial. Exposé à une perturbation somme toute limitée, mais aux conséquences politiques et médiatiques inacceptables, de surcroît liées à une niveau de préparation inexistant ou peu s’en faut, on s'est rabattu sur la solution moyenâgeuse du confinement en sa propre forteresse.
- « Mortecouille, mon château !".
- Bien des questions se sont posées lors de l’arrêt sur image de l’économie, et des externalités insoupçonnables se sont exposées au grand jour (ex : les oiseaux chantent moins aigu, car moins stressés par le bruit, etc…). Les marges de manœuvre sont en train de se réduire, dans l’opinion; et par conséquence dans le discours et l’affichage des politiques, et qui se verront en partie traduites dans les faits (ex : renforcement des contrôles des sites industriels).
- Les risques liés aux activités industrielles et de supply chain, imposent pour tout investisseur soucieux de l’avenir et de la performance de ses investissements, ainsi que de son image, une gestion des risques systémiques et environnementaux, à un niveau encore jamais connu, tant sur la profondeur et la largeur de l’analyse, que du rythme pour les mener, et ça, ça risque de prendre pas mal de temps et consommer des ressources clés.
Quelques lignes guides pour mener cet exercice à bien :
Le réchauffement climatique n’est pas la seule cause de risque, même si elle est clairement identifiée, sauf par une poignée de climato-sceptiques, dont l’influence est certes déclinante, mais reste encore ancrée dans quelques cervelles bien connues. A celui-ci il faut rajouter la pollution généralisée (phytosanitaires, déchets, etc…), l’effondrement de la biodiversité (dont on pourrait regretter qu’il s’attaque assez peu aux mêmes climato-sceptiques 😉 ) et la déplétion des ressources critiques (eau douce, terres arables, zones humides, etc…)
Le risque s’attaque à 4 grandes classes de supports :
o La supply chain : désorganisation des transports suite à des accident météorologiques, pénurie de moyens énergétiques, etc.
o Les investissements : risques de submersion, de phénomènes météorologiques, etc..
o Le produit : pénurie de matières premières, embargo, inadéquation d'usage, etc…
o Les ressources Humaines : disponibilité, compétences, mobilisation,etc….
En conséquence, on peut le segmenter dans de modéle, comme ci dessous, ceci n'excluant en aucun cas une analyse de type systémique entre chacune des cases.
Chaque case ayant vocation a être explorée en profondeur, pour établir la totalité de la synthèse, et certaines pourront alors surprendre. Dans la case biodiversité, si le frelon asiatique s’attaque aux abeilles pollinisatrices des amandiers de Californie (80% de la production mondiale tout de même), la solution risque de passer par une pollinisation à la main (comme cela se fait déjà en Chine)
L’analyse doit être menée dans une perspective systémique en englobant les fournisseurs, sous traitants et clients, jusqu’au niveau 3 au moins , et englober toutes les composantes de l’entreprise ou de l’organisation concernée. Puis sera produite, une première synthèse où les principaux sujets seront mis en avant, (soit isolés dans des cases, soit transversaux), tant il est vrai qu’on ne peut courir plusieurs lièvres à la fois.
Les systèmes d’information des entreprises, (dont les ERP, PLM, Bases de données historiques), sont une source fabuleuse et irremplaçables de matériau pour conduire cette analyse, mais ils ne suffisent évidemment pas. A laquelle il faut rajouter des compétences en analyse systémique et en compréhension des impacts environnementaux. La qualité et variété de l’équipe d’analyse est le meilleur garant de sa pertinence.
Aucune, aucune, aucune mesure de contrôle des risques, ne doit parier sur des ruptures technologiques dans un avenir proche (fusion nucléaire, piégeage du CO2, stockage énergétique à grande échelle, etc…), c’est un pari perdu d’avance. La raison en est simple : dans une économie qui se contracte (car il faudra un jour assumer la réalité), la marge restante pour développer ce genre de solution se réduit à néant. Pour revenir au cas d’ITER qui a connu un dépassement de budget et de délai semblable à l’EPR de la Hague, la production industrielle, suite aux essais d’ITER est estimée à 2050, ….
Le général Mac Arthur avait une expression favorite : « Toutes les batailles perdues peuvent se résumer en 2 mots : TROP TARD ».
Il est, par contre, parfaitement loisible de s’appuyer sur des briques technologiques disponibles aujourd’hui, et il faudra effectivement bien le faire, faute d'alternative crédibles, ce qui devrait accélérer la mise en place des solutions. Arrêtons donc de rêver et relevons nos manches.
L’énergie et le pétrole sont des facteurs de risque à regarder de très très prés :
L’énergie, parce que c’est la clé du fonctionnement d’un système économique et industriel, la vraie question qui se pose maintenant, est : sous contraintes environnementales élevées, quel est le niveau de disponibilité des ressources énergétiques acceptables, sur lesquelles on peut vraiment compter (Le photovoltaïque et l’éolien pouvant compter au niveau de 1 à 4%, sans inclure les problèmes d’intermittence).
o Source BP statistical review 2019
Autre facteur de risque critique :Le pétrole. Cest une des formes les plus faciles à exploiter d’énergie, et on s'en prive pas, cf supra, mais que malheureusement, le pic de Hubbert du conventionnel a été franchi en 2010 et que le EROI des nouveaux gisements devient de plus en plus dissuasif, peut être plus que ce à quoi nous pouvons nous adapter. Pour info :EROI des gisements d'arabie saoudite : (70 à 110), EROI des shistes bitumineux (3 a 10).
Le pic de Hubbert expliqué par l'écart entre les dates de découverte et d'exploitation. Source Jean Lahere
Pour conclure, en reprenant les paroles de Clausewitz, l’exercice proposé est une affaire sérieuse, au profit d’une cause sérieuse.
Le ciel vous garde en joie.