Gestion des émotions dans la médiation

La communication devenue impossible, irrémédiablement rendue au silence avec une incapacité à renouer le dialogue met en avant une non gestion des émotions. Cependant, il est utile de connaitre le principe de la gestion des émotions pour prendre en charge celles-ci lors de la médiation.

Accueillir l’émotion à pour exigence de travailler sur soi en tant qu’être humain face à d’autres humains pour que dans sa posture de médiateur, celui-ci puisse recevoir sans effet miroir les expressions parfois passionnées voire violente des médiés.

Rappelons que les émotions sont des interactions entre l’esprit et le corps. Le corps est l’image extérieur des ressentis internes. Le mental créé un réel changement dans le fonctionnement physiologique entrainant la nécessité de s’adapter.  Chaque situation a un sens et chaque personne sa réalité. De ce fait l’émotion vécue personnellement est confrontée à son vécu, ses valeurs, ses principes, et ce, au moment présent.

Chaque histoire est expérimentée de façon différentielle selon sa propre histoire. Ainsi les médiés devront être entendus dans leurs émotions, ressentis et souffrances. Il faut toutefois préciser que le médiateur n’est pas un thérapeute ni un psychologue ni un coach. Il doit rester dans son rôle en renouant le dialogue et dans l’accueil des dires des médiés. Le médiateur se doit d’être vigilant sur la tolérance et la résilience.

La tolérance

Selon Voltaire la tolérance « …c’est l’apanage de l’humanité. Nous sommes tous pétris de faiblesses et d’erreurs ; pardonnons-nous réciproquement nos sottises, c’est la première loi de la nature. »[1]. La tolérance a pour fonction d’accueillir l’autre dans sa globalité. Il s’agit ainsi de ne pas remettre en cause la personne dans son histoire ni  dans sa réalité.

La tolérance a aussi cette notion de pouvoir accueillir l’intolérable ce qui est désapprouvé par l'esprit humain. Il s’agit ici de vertu se situant selon Comte-Sponville[2] entre l'intolérance et l’intolérable. La notion de tolérance nécessite donc pour le médiateur de se positionner face à ses valeurs et le sens qu’il donnera à sa propre notion de tolérance dans le respect de la loi.

Il pourra durant le processus de la médiation renvoyer les médiés à ce rapport de tolérance. Il aura dû au préalable lors des premiers entretiens aller à la rencontre des valeurs de chaque partie.

La résilience

Selon Boris Cyrulnik[3], la résilience est la capacité de reprendre un développement malgré l'adversité. L’envie de vivre est alors plus forte. La vie prend le dessus sur les pressions, les souffrances morales et physiques. Généralement la résilience est associée à des traumatismes profonds. Pour autant, il a été mis en avant que l’agression ressentie, vécue, reçue fait aussi partie des éléments pour lequel le cerveau va aller rechercher le processus de résilience pour pouvoir continuer à vivre.

Ce processus demande un effort considérable afin que l’esprit humain trouve ses propres solutions pour trouver un nouvel objectif. Ce principe n’est pas faisable part tous car la résilience est en lien avec, physiologiquement, la sécrétion de dopamine[4] et de sérotonine.

Le médiateur peut s’appuyer sur la résilience pour renouer le dialogue et permettre aux médiés de trouver ensemble un accord dans le respect de chacun. Pour ce faire, il lui sera nécessaire de repérer chez chaque médié sa capacité de résilience. Certains s’appuient sur des attitudes de protection, une part de rêve ou encore une forme de mégalomanie voire même de déni et d’humour.

Dans tous les cas les personnes sujettes résilience sont des créateurs. En effet, elles ont pu trouver des solutions originales voire marginales. Ce sont des personnes avec des parcours souvent atypiques malgré une recherche constante de revenir sur le chemin balisé voire tracé.

Le médiateur doit donc comprendre le fonctionnement des médiés voir cerner leur niveau de créativité; puis,vérifier si celle-ci est en lien avec des souffrances récentes ou passées ou simplement il s'agit d'une capacité de créativité intrinsèque.

L’enjeu est alors de mettre les médiés acteurs dans leur médiation et les emmener vers le chemin de la créativité commune. Ils seront alors dans ces échanges où les solutions sont multiples et rebondissent d’idée en idée jusqu’à obtenir un compromis en faveur de tous.

[1] Traité sur la tolérance de Voltaire P.235

[2] Comte-Sponville A., Petit traité des grandes vertus, Paris 1995.

[3] Résilience : les connaissances de base - Boris Cyrulnik – 2012 – Ed Odile Jacob

 

[4] Substances cérébrales qui rendent actifs et donnent une fringale de vie

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