Gilets jaunes : Ce n’est pas de la colère, c’est du désespoir!
La journée du samedi 24 novembre sur les champs Elysées, aussi désolant ait été le spectacle des affrontements, n’a pas reflété la réalité d’un mouvement authentiquement populaire. Les heurts avec les forces de l’ordre qui, soit dit en passant, ont agit avec beaucoup de retenue et de doigté dans ces circonstances, n’ont pour une grande part, pas été le fait des « Gilets jaunes ».
Il y a deux choses que je retiens de cette journée.
En premier lieu, ce n’est pas une manifestation de colère de ceux que Le Président de la République appelle « la classe laborieuse ». C’est un cri de désespoir ! C’est le cri de ceux qui jour après jour, se démènent désespérément pour rapporter de quoi survivre. Pour donner quelque chose à manger à leur famille. Pour espérer ne pas se retrouver dans la rue. C’est le cri de toute une partie, hélas de plus en plus importante, de la population qui, quotidiennement fait face aux difficultés journalières. Et qui voit aussi que jour après jour ses efforts sont vains. Dès qu’elle grappille un peu d’air frais financier, une bourrasque fiscale l’étouffe à nouveau. Et, inéluctablement, elle voit son acharnement de vivre réduit à néant. Samedi se sont entrouvertes les portes de la désespérance d’un peuple.
En second lieu, ce qui m’interpelle, c’est que ce désespoir n’est absolument pas compris par l’appareil politique français qui ne sait que répondre « transition énergétique » quand on lui crie « au secours ! je me noie ! ».
Nos politiques confondent la colère de certains qui, mécontents d’une situation, laissent déborder leurs sentiments et deviennent violents, avec ce cri dramatique de gens qui n’arrivent même plus à vivre, alors même qu’ils travaillent.
M. Castaner, épaulé sur BFM par un pseudo expert des mouvements sociaux obnubilé par « l’utra droite », tente avec une absence de conviction évidente, et une maladresse ubuesque, de faire porter le chapeau des violences à Madame Le Pen. Aucun des majors politiques, quel que soit son bord n’a, semble-t-il, pris la mesure du drame qui se joue, aveuglé qu’ils sont par les échéances électorales.
Oui, la France n’a plus d’argent, au point que les armées et la gendarmerie sont obligées de différer les paiements des réservistes pour payer les militaires d’active. Oui, la dette s’est encore creusée depuis les 18 derniers mois. Oui, les réformes, courageuses pour certaines, n’ont pas encore pu porter leurs fruits. Et, oui, je reconnais que le Gouvernement est assis sur deux chaises qui s’écartent. Mais, doit-il au nom d’une réponse dogmatique ou spécieuse (la fiscalité sur les carburants n’est à mon sens qu’une manœuvre pour rentrer un peu d’argent), mettre à la rue des familles entières, laisser des pans entiers de notre société se paupériser ?
La France, c’est d’abord son peuple. Et puisque nous en sommes au centenaire de 1918, dois-je rappeler les sacrifices consentis par ce peuple dont le labeur fait vivre, et globalement assez bien même, nos élus. Le Trésor public se remplit avant tout par le travail des Français. Et, à l’heure où M. Le Président demande des efforts, certes nécessaires, il serait bon pour la tête de montrer l’exemple en premier. Le mille-feuilles politique serait bien plus intéressant à dégraisser car il aurait une incidence à long terme sur les finances publiques. Les réformes fiscales doivent être d’ampleur et tendre vers l’équité proportionnelle.
La sagesse populaire dit qu’il ne faut jamais acculer un animal car, dans cette occurrence, même un mouton peut se battre jusqu’à la mort.
Les élus, et en particulier notre Gouvernement ne disposent que de très peu de temps pour se reprendre et comprendre réellement ce qui s’est passé samedi dernier. S’ils ne sont pas convaincus qu’il n’y a pas de colère, mais de la désespérance d’une population qui demande seulement qu’on lui permette de vivre, si possible décemment, les élus et le Gouvernement ouvriront les portes à des évènements plus graves.
Le mouvement va certainement tenter de se structurer. Il va aussi faire l’objet de tentatives de récupération, certains partis ou syndicats pouvant proposer opportunément leurs services. Et là, je n’exclus personne, ni même la LRM, histoire de contrôler le mouvement de l’intérieur.
Sans dramatiser, car la résilience des peuples est grande, il va arriver un moment, que je sens néanmoins proche, où les gens qui ont manifesté et qui représentent un bien plus grand nombre, n’auront plus d’espoir. Ni pour eux, ni pour leurs enfants ce qui sera pire. Ce jour-là pourrait être terrible car il jettera dans la rue des femmes et des hommes qui n’auront plus rien à perdre. Ce jour-là sera marqué par des violences indescriptibles parce que les rancœurs accumulées et les tabous sociaux tomberont.
La France a, de loin en loin été marquée par des jacqueries, révoltes violentes de pauvres paysans affamés. Elle a subi plusieurs révolutions dont celles de 1789 à 1934, toutes sanglantes, pour certaines effroyables. La peur et la faim sont mauvaises conseillères. Le Peuple ne demande pas grand chose ; qu’on le comprenne, qu’on lui marque la considération à laquelle il a droit par sa contribution quotidienne à la vie du pays … et surtout, qu’on lui permette de vivre en espérant un futur meilleur pour ses enfants. Dans le cas contraire, dans tous les pays du monde, il ne manifeste plus, il se révolte.
Frank Puget
Corporate Security Officer chez COUNCIL OF THE EUROPEAN UNION GENERAL SECRETARIAT
5 ansTrès bonne analyse de la situation qui malheureusment n'est pas compris et qui est récupérée politiquement. C'est bine regrettable ce décallage entre le peuple et les représentants du peuple :o(
Président d'association
6 ansAnalyse très intéressante et à plus d'un titre...
Coach ; Référent Jeunesse ; SNU
6 ansMerci pour cet article, Luc. Il montre, s'il en était besoin, que la vérité, le pouls de la population est sur youtube et les raisons sociaux et non pas sur BFM, CNews, LCI et encore moins sur France2. Seules les radios permettent de faire qq tris.....