Guenif Louiza, ou la légende des Maquis d'Akfadou
Guenif Louiza, épouse Fellak, est une jeune et ravissante fille kabyle du Djurdjura. Elle est née dans un village de la Haute Kabylie qui fait face a la majestueuse chaine du Djurdjura sur laquelle trône depuis la nuit des temps, le Saint Marabout du «pic du zénith », Azro Net’Hor, dans une maisonnette blanche qui culmine a 2300 mètres d’altitude.
Louiza n’avait que 18 ans quand elle s’était mariée avec un homme de 20 ans plus âgé qu’elle. Le destin a voulu que la guerre la surprenne et lui impose un itinéraire semé d’événements qui vont bouleverser toute son existence pour la marquer au fer rouge. Rapidement sa vie va basculer et prendre la forme d'un cauchemar interminable.
Louiza élevait ses trois enfants, une fillette Houria et deux garçons, Madjid et Mohand, âges respectivement de 1, 2 et 7 ans.
Tout avait commencé le jour où son mari avait rejoint les rangs des soldats français de la 2éme compagnie du 6eme BCA (Bataillons de chasseurs alpins) en 1957.
Depuis cet événement dramatique, Louiza ira de village en village pour fuire d’abord son mari, supplétif dans la 1ere section de la 2éme compagnie du 6éme BCA, ensuite la répression systématique de la soldatesque française. Son itinéraire forcé la mènera jusqu’aux cotés de celui qui était déjà devenu une autre légende dans les maquis d'Akfadou : le colonel Amirouche.
Accompagnée de ses enfants, Guenif Louiza quittera précipitamment son village d'Ait El Mansour, non loin d’iferhounène ou était venue s’installer à moins de 100 mètres des premières mechtas, en octobre 1956, la 2eme compagnie du 6éme Bataillon de chasseurs alpins (6éme BCA) commandée par le Capitaine Favier.
On comprend que dans cette société traditionnelle fortement conservatrice, le sacré droit et le sacré gauche sont ces lois intransigeantes qui régissent rigoureusement les comportements individuels, et n’autorisent aucune échappatoire a la trahison , On comprendra ce qui avait poussé Louiza à fuire la région. Ces raisons majeures implacables et imparables qui peuvent s’abattre a tout moment sur le sort de chacun constituent autant d’épreuves pour les kabyles de la Montagne. Son époux, Ouali, venait de rallier les forces d’occupation françaises pour des motifs que nous éluciderons a la fin de cet ouvrage. Une histoire comme on en connait d'identiques dans les rangs de la Résistance. Un fait ou un mensonge, une dénonciation, objets réels ou supposés de luttes intestines.
On serait sans nul doute tenté de chercher à en savoir plus sur cet homme devenu Harki, mais pour ne pas mettre de l’ombre sur les séquences d’images limpides qui nous content le sort de cette femme sublime, nous n'en dirons pas plus, sauf qu’avant de changer de camp, il était militant, et assurait son tour de guet jusqu’à durant cette nuit fatidique où il sera confronté à une découverte insolite, selon ses propres dires.
Ouali n'était certes pas l'auteur de cette vraie ou supposée entorse au sacré gauche de la société kabyle, mais, en dénonçant dans un rapport écrit à sa hiérarchie ce qu'il désignait lui-même par le terme qualifie par les us et coutumes kabyles pour que la sentence à prononcer soit le doux « sourire kabyle », il se retrouve pris dans la nasse pour ne plus en sortir. Des lors, il n'avait plus l’embarras du choix, mais sa décision sera trop lourde de conséquences. L’avait il envisagée avec légèreté? Ce qu'il fit pourtant, sous le coup de la colère, ou la peur de subir le sort que les Moudjahidines réservent aux fautes impardonnables, va bouleverser sa vie et, par ricochet, l’équilibre qui régnait jusque la dans tout son entourage.
Fellak Ouali né en 1910, avait déjà participé à plusieurs guerres au sein de l'armée française, notamment en Indochine et au Maroc, dans le cadre du service militaire imposé aux algériens.
Pour Louiza c'est une autre affaire qu'elle ne pouvait résoudre autrement qu'en se résolvant à envisager toutes les alternatives possibles sauf celle de suivre son mari qui venait de faire défection et surtout de vouloir l’entraîner dans une aventure sans lendemain en acceptant de vivre dans un camp militaire de l'armée coloniale.
Commença alors une longue et épuisante cabale pour la petite famille qui dut se délester de leur fillette âgée d'à peine 3 ans, pour la confier aux grands parents.
Organisée par les maquisards sous la direction de Mohand Oussaid Ait Saïd, a partir du Refuge installé a Taourirt dans sa propre demeure, la première étape de cette fuite se terminera au village de Kerrouche.
C'est ici chez Ait Said a Taourirt également que le premier maquisard de la région Amar Ait Cheikh trouvera toute la sécurité nécessaire et la nourriture des 1947
A Kerrouche où elle sera confiée à une famille du village, Louiza connaîtra la faim, la souffrance, et la privation. Elle se résignera à subir la jalousie de l’épouse de son hôte qui la privait du peu de nourriture qui pouvait être disponible en ces temps de rationnement drastique imposé par l'arme d'occupation.
C’est là que le petit Madjid mourra de maladie et de sous alimentation...
a suivre...