Individualiser l'apprentissage : le défi du responsable de formation dans le supérieur
Image générée par IA : étudiants de l'enseignement supérieur

Individualiser l'apprentissage : le défi du responsable de formation dans le supérieur

Depuis 2022, mon domaine professionnel a connu une transformation majeure, notamment en ce qui concerne les attentes et postures des apprenants. Cette évolution a nécessité une adaptation inévitable de ma pratique quotidienne, avec l'individualisation de l'apprentissage. Cela a eu un impact significatif sur mes missions, ma charge de travail et les compétences requises.

Du collectif à l'individualisme

Dans le domaine de la formation initiale et des études supérieures, que ce soit en tant que formateur ou responsable de formation, j'ai l'habitude de gérer des classes, des promo' et des groupes d'apprenants. Même mes outils sont orientés vers la gestion d'un groupe d'apprenants.

Ces apprenants ayant acquis un socle commun de connaissances et de compétences (durant le secondaire) suivent un parcours de formation standardisé. Ce parcours, régulé par un référentiel certifié, cadré par un planning préétabli et une volume horaire contractualisé, comprend des activités communes, des épreuves pratiques et des projets collectifs ou individuels, menant à une certification individuelle.

Aujourd'hui la logique se veut différente. A l'image de notre société, l'individualisme s'impose face au collectif.

Imaginez-vous devant un groupe de 25 apprenants, chacun avec ses propres attitudes, croyances et attentes. Vous avez préparé votre cours avec soin, mais dès le début, vous êtes confronté à une diversité de besoins et de perspectives individuelles. Chaque apprenant pense avoir le droit d'exprimer ses attentes, et que vous devez vous adapter à chacun d'eux.

Maintenant, mettez-vous à la place du responsable de formation. Vos formateurs vous informent que parmi ces 25 apprenants, les niveaux de connaissances varient considérablement, malgré le prérequis du BAC. Certains estiment que le formateur n'est pas assez pratique, d'autres pas assez théorique, et certains pensent que le groupe dans son ensemble perturbe le bon déroulement de la formation.

A l'idéal on pourrait imaginer diviser le groupe, donner du temps supplémentaires pour une partie, et essayer de répondre aux 25 attentes. Sauf que voilà, j'ai un programme à tenir. J'ai un volume à respecter. J'ai un planning validé pour 2 ans. Tout ça, c'est contractualisé avec une entreprise dans le cadre de l'alternance, c'est déjà transmis auprès des organismes de financement, et c'est également budgété à l'avance. Puis on va m'auditer, m'évaluer sur le respect de tous ces éléments !

Agile au quotidien, dans un cadre rigide

Pour mon quotidien, c'est un temps d'écoute en nette augmentation. C'est un pilotage qui s'est humanisé (bien loin de l'automatisation de l'avant covid). C'est un lot d'imprévu. L'apprenant vient s'exprimer directement dès que l'expérience n'est pas satisfaisante. Il faut alors entendre, comprendre ce ressenti, et expliquer pourquoi.

Le formateur quant à lui est en débrief perpétuel de l'expérience vécue. Une remontée de terrain riche. Parfois un besoin d'être rassuré, ne pas se sentir seul et garder la confiance.

Ces échanges sont désormais le cœur du métier. Il permet d'agir ou de réagir. Et rapidement, sinon on a le droit a une piqûre de rappel. Sans oublier de tracer ces échanges (hop un petit rapport) pour justifier en cas de contrôle, pourquoi la feuille de route évolue.

Et si cette feuille de route évolue, avons-nous une marge de liberté pour le faire, avons-nous les accords des différents acteurs, certificateurs, financeurs, contrôleurs ?

Faire et défaire pour s'adapter aux individus, pour répondre aux attentes, pour s'adapter dans un court délai, doit-il également devenir mon quotidien ? Mais comment se projeter, si tout est en flexibilité permanente.

En général, à ce niveau, on m'apporte souvent des réponses orientées outils : learning analytics, contenu sur étagère, groupe de niveaux, modularité des parcours, module à la carte.

A l'échelle de petit groupe c'est toujours amusant. Mais à l'échelle de parcours d'études supérieures sur plusieurs années, c'est vertigineux.

Une autre piste est envisageable : remettre l'individu dans un cadre collectif pour le faire avancer. Après tout, la richesse vient majoritairement des autres.

Mais n'oublions pas que pour faire rentrer un rond dans un carré, il faut élargir ce carré.

Alors d'après vous pouvons-nous adapter nos méthodes pour répondre aux besoins individuels des apprenants tout en respectant les contraintes organisationnelles des campus de l'enseignement supérieur ?


Gilles Aubin

Formateur - Suite Adobe | Blender | Auteur des romans "Nouvelle Conscience" #IA et "L'effet Murphy" #dystopie - Cours particuliers sur Lille et environs... ou visio. "Pour changer de système, il faut changer de réalité."

8 mois

Tu effectues un travail remarquable autant au niveau apprenant/formateur, qu'au niveau individuel/collectif, école/entreprise et souhait/cadre administratif. Cette flexibilité (j'ai faillit écrire "souplesse" en t'imaginant faire le grand écart😅) est une force incroyable. Tu questionnes : est-ce tenable... sur le long terme dans un cadre administratif en constante "évolution" ? Je crains que non pour une personne seule. J'ose espérer que tu puisses compter sur tes intervenants pour mettre en place les solutions que tu imagineras afin d'accomplir "notre" mission d'enseignement.

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