J'aime le sport mais pas ça...
Les héros de notre siècle
A l’école on nous apprend que le « h » aspiré en début du nom commun « héros » rend la liaison avec le précédent mot caduque. Mais pour une fois, pour donner du sens à cet article je vous propose de faire cette belle faute et de laisser venir à vos oreilles le son de votre bouche : « les zhéros de notre siècle ». Car c’est de cela qu’il s’agit ici. Dimanche soir, je ne sais pas quelle mouche m’a piqué, mais je me suis dit « tiens je vais regarder PSG-OM ». Il faut dire que ça fait un moment que je ne regarde plus ces matchs au sommet, comme les appellent les annonceurs télé, meurtri que j’étais par les années de défaites de Marseille, incapables de rivaliser avec les parisiens.
C’est donc tranquillement installé dans mon canapé que j’ai regardé ce qu’on appelle un match de football de haut-niveau. Et ce que j’ai vu Dimanche soir ne m’a pas fait regretter ce temps passé où je laissais la télévision éteinte.
Notre société n’a plus la notion de respect. C’est un fait. Notre ministre de l’Intérieur évoque même un « ensauvagement ». Ni les maîtres d’école ni les gendarmes ne réussissent à coller à l’image d’Épinal de l’autorité d’autrefois. Même les Maires, élus par leurs concitoyens, ont été au cours de l’été 2020 la cible d’insultes, de menaces et de passages à tabac. Seuls les éducateurs sportifs arrivent encore à canaliser l’énergie de nos enfants, à travers le prisme de leur passion commune pour le sport. Ils sont aujourd’hui les relais des services de l’éducation, des forces de l’ordre et des politiques pour inculquer la notion de civisme tant utile à nos enfants, et qui peut faire défaut parfois jusque dans les familles. C’est dire si le sport a pris une place prépondérante dans notre siècle.
Et nos héros des temps modernes (vous n’êtes plus obligés de faire la liaison) ce sont ces sportifs hyper-médiatisés dont les salaires mensuels avoisinent ou dépassent le million d’euros. Soit, on peut comprendre que l’économie du sport permette aux plus grands clubs de financer de tels salaires. Mais ce qu’on ne peut pas accepter, ce qu’on ne doit pas accepter, ce sont ces comportements puérils de ceux qui sont censés être des exemples. Car le match de Dimanche soir entre Paris et Marseille a montré tous les défauts du football moderne (joueurs qui ne respectent pas l’arbitre, joueurs qui s’échangent des coups par derrière, joueurs qui se battent, joueurs qui s’insultent et vraisemblablement émettent des propos racistes, joueurs qui font les morts et roulent au sol sur 15 mètres dès qu’ils sont poussés par leur adversaire,…).
Depuis des années, la Fédération Française de Football dépense des sommes astronomiques pour des campagnes publicitaires soutenant le fair-play dans son sport. Les puristes se souviennent du fameux « On n’a pas le même maillot, mais on a la même passion » mettant en exergue la nécessité de respecter l’arbitrage. Mais comment on peut inciter un enfant de 8 ans à respecter l’arbitre, quand ses modèles, ceux qu’il voie chaque week-end à la télévision, dont il a les posters collés sur les murs de sa chambre, ne respectent pas eux-mêmes l’homme en noir. On en arrive à des scènes plutôt cocasses où un arbitre qui veut distribuer un carton (le symbole de la sanction lors d’un match) doit reculer, voir courir pour échapper à la meute de protagonistes qui vient réclamer, se plaindre, se lamenter, houspiller, voire menacer le garant de l’équité sportive.
Pourquoi ne pas interdire la discussion entre les joueurs et l’arbitre ? On n’a jamais vu un arbitre retirer un carton jaune ou rouge parce qu’un joueur est venu lui vociférer dessus. On voit le manque de recul de nos sportifs et surtout l’absence de consignes officielles. Pour ne pas tomber dans une dictature du terrain, on pourrait autoriser le seul capitaine de l’équipe à venir échanger avec l’arbitre. On devrait également interdire au joueur qui prend un carton de tourner le dos à l’arbitre qui lui indique sa sanction. Vous avez déjà essayé de tourner le dos au policier qui voulait vous transmettre une amende ? C’est peu recommandé.
On gagnerait du temps (et de l’argent) à non pas payer des campagnes publicitaires dont tout le monde se fiche (oui le professionnel peut venir se plaindre auprès de l’arbitre et empêcher le jeu de continuer, alors pourquoi pas moi quand je joue au foot le dimanche ?), mais plutôt à mettre en place des sanctions contre les comportements de ces mêmes professionnels.
Qui demanderait à un gamin dont les parents jettent leurs détritus par terre, dans la nature, d’aller jeter son papier de bonbon à la poubelle ? Est-ce qu’on a déjà vu un enfant dire « bonjour » en entrant dans un magasin alors que ses parents ne le font pas ? Et le malheur dans tout cela, c’est que cette contagion en vient à toucher « certains » éducateurs (j’ai beaucoup trop de respect pour les éducateurs sportifs amateurs pour mettre tout le monde dans le même panier). Oui les enfants d’hier grandissent et deviennent les adultes de demain. C’est comme cela que se crée le fameux et bien souvent irréversible effet boule de neige. Et seul des mesures fortes peuvent enrayer ce phénomène.
Malheureusement la Fédération Française de Football semble penser qu’en se payant des campagnes publicitaires avec l’argent des licences des joueurs amateurs (cercle vertueux cette fois) elle arrivera à endiguer ce fléau du non-respect sur les terrains de football amateur ?
J’en doute fort. Pour l’amour du jeu, pour permettre aux spectateurs et supporters que nous sommes, tout le monde aurait à gagner à voir un match où les joueurs ne se plaignent pas et ne perdent pas de temps en lamentation ou en roulades Jean-Claude Van Dammiennnes.
Pour expliquer le comportement des joueurs, certains verront dans ces affrontements la défense par les joueurs de leur ville, leur club, l’identité du club marseillais contre l’identité parisienne ? « Le sport c’est la guerre sans les armes » disait Georges Orwell. Très bien. Quel joueur marseillais parle un mot de provençal ? Quel joueur marseillais connaît le nom du fondateur de l’Olympique de Marseille ? Est-ce que Neymar met une claque derrière la tête d’un marseillais pour défendre un club dont il voulait partir moins d’un an après son arrivée et qu’il quitte à la première blessure pour se soigner au Brésil (où bien sûr les techniques médicales sont connues pour être meilleures qu’en Europe) ? Et même si c’était le cas, est-ce aux sportifs de se battre pour des enjeux géopolitiques (inexistants en France mais certainement présents en Catalogne ou dans d’autres régions du monde) ? Je vous rappelle que les administrés marseillais ont élu comme député Jean-Luc Mélenchon qui n’a de marseillais que sa capacité à s’emporter pour rien. Si les élus et le peuple n’ont pas de revendications régionales, pourquoi les footeux seraient les étendards de ces velléités ?
Quant à ceux qui verront dans ces comportements un comportement d’homme, un vrai, celui qui se bat pour défendre son honneur (Neymar a déclaré en conférence de presse d’après-match à propos d’un de ses adversaires du soir « Dommage qu’il ne soit pas en face de moi »). Ah bon ? Je répondrais à Neymar que pendant tout le match ce joueur était à côté de lui et qu’il n’a rien fait à part mettre des petits coups quand le joueur avait la tête tournée de l’autre côté. Oui je vous disais : un vrai comportement viril d’un homme qui ne se laisse pas faire. Pauvre Eric Cantona. Il doit se dire que les temps ont bien changé et que ce qu’on appelle un homme en 2020 n’est pas ce qu’on appelait un homme dans les années 90.
Les attitudes des protagonistes du Classico ont phagocyté littéralement le spectacle (euh non…le jeu…euh non le match) proposé. Les marseillais ont gagné en tombant par terre au moindre contact physique des joueurs Parisiens (au moins un domaine dans lequel les marseillais et parisiens ont excellé et fait jeu égal). Il aurait mieux fallu pour les marseillais perdre pendant encore 100 ans que de gagner de cette manière.
Notre société finit par tout laisser passer aux joueurs. Les parisiens ont quand même demandé à décaler leur premier match de championnat pour récupérer physiquement de leur finale de Ligue des Champions. Et quoi de mieux en pleine épidémie de coronavirus que d’aller se reposer à Ibiza. Résultat : plusieurs joueurs positifs au coronavirus. Evidemment on a pardonné. On aurait même pleuré et organisé un deuil national si un international français était venu à succomber de la maladie. Pendant ce temps ses concitoyens (ou con de citoyens, on peut ajouter la particule ça ne fait pas de mal) se voient infliger des amendes si par mégarde ils oublient de porter leur masque, même dans une rue déserte, même en prenant garde de rester éloignés de plus d’un mètre des possibles chalands. On sent le deux poids deux mesures.
Deux poids deux mesures, c’est aussi le couperet qui tombera sur la tête de l’enfant de 15 ans, en pleine montée d’hormones adolescentes qui, voulant copier ses modèles, en viendra aux mains contre son adversaire ou tiendra des propos haineux contre un arbitre l’ayant bien entendu volontairement floué. Ce joueur se verra mis à l’écart des terrains pendant plusieurs semaines par la Commission de discipline du District de football de sa circonscription géographique.
En plus de cela il se verra certainement imposer de venir arbitrer des matchs de catégories d’âges inférieures. Une forme de Travail d’Intérêt Général. Pourquoi ne pas imposer ces TIG aux joueurs professionnels ? Parce que pour lui l’amende dont il écopera restera relativement faible par rapport à son salaire. Si je travaille au SMIC et que l’amende de stationnement est à 50 centimes, je risque de continuer longtemps à stationner sur une place non autorisée. Quand on fait le ratio sanction-salaire, on comprend que le joueur de football n’ait pas tellement envie de changer sa manière de faire.
Tous les maux de la société d’aujourd’hui ne sont pas à mettre sur le dos des sportifs professionnels. Loin de là. Mais si ceux-là étaient soumis aux mêmes contraintes que le citoyen lambda, voire à des mesures plus restrictives au titre de leur statut d’icône publique, nul doute que le monde ne s’en tirerait pas plus mal. Et que parents, institutions et éducateurs verraient leur mission éducative facilitée par l’exemple montré par les idoles de nos bambins.
Alexandre GHIBAUDO
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