Journée mondiale de l’hygiène menstruelle
La journée mondiale de l’hygiène menstruelle, initiée en 2014 par l'ONG allemande WASH United, a lieu chaque année le 28 mai. Choisi de manière symbolique, le 28ème jour du mois fait référence à la durée moyenne d’un cycle menstruelle et le mois de mai, 5ème mois de l’année, fait référence au nombre de jours moyen de la durée des règles.
L’hygiène menstruelle décrit par l’UNICEF comme « englobant à la fois la gestion de la santé menstruelle et l’ensemble des Facteurs systémiques qui relient les menstruations à la santé, l’égalité des sexes, l’éducation, l’émancipation et aux droits », demeure encore à travers le monde, un enjeu de santé publique.
La moitié de la population mondiale est concernée par les règles au cours de son existence, qui la touchera pour une durée moyenne de trois à huit ans au total sur sa durée de vie. Loin d’être un sujet secondaire, la question de l’hygiène menstruelle a longtemps été délaissée par les politiques de santé publique.
Pourtant, l’hygiène menstruelle est avant tout une question de droit fondamental et devrait à ce titre être une priorité des politiques publiques. La stigmatisation et les difficultés d’accès aux protections hygiéniques peuvent engendrer des discriminations et une atteinte au droit des personnes menstruées à l’égalité, à la santé, à l’éducation, à la sécurité et à l’accès au travail. La question est d’autant plus problématique dans les pays en développement, comme en Asie du Sud par exemple, ou un tiers des filles manquent l’école entre un à trois jours par mois pendant leurs règles. L’utilisation de protection non adaptée provoquerait également une hausse de 70 % des risques d’infections vaginales.
Si de prime abord, la question de l’hygiène menstruelle semble s’arrêter à la problématique de l’accès aux protections hygiéniques, les enjeux sont en réalité bien plus grands : éducation sur le cycle menstruel, accès au savon et à l’eau, élimination sécuritaire des déchets menstruels, sécurité sanitaire des protections, lutte contre les inégalités de genre mais également stigmatisation et discrimination et donc indirectement émancipation de la femme.
La notion d’hygiène menstruelle est indéniablement liée à celle de la « précarité menstruelle », définit selon le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP), comme « les difficultés de nombreuses femmes et filles à se payer des protections hygiéniques à cause de leurs faibles revenus ». En effet, près de 500 millions de personnes dans le monde n’auraient pas les capacités de se procurer les protections hygiéniques dont elles ont besoin.
Si dans certains pays européens, des mesures législatives novatrices dans le domaine de l’accès gratuit pour toutes sont à souligner et, espérons-le, seront vectrices de mesures similaires partout ailleurs, d’autres aspects demeurent centraux et prioritaires, comme notamment la sécurité sanitaire des produits d’hygiène menstruelle.
Des progrès en Europe à généraliser…
En 2020, l’Ecosse votait en faveur d’un accès gratuit aux protections périodiques afin de lutter contre la précarité menstruelle, une première dans le monde dans ce domaine. Par l’inscription du droit d’accès à tous dans la loi, le gouvernement écossais doit permettre, depuis le 15 août 2022, à quiconque qui en a la nécessité, d’avoir accès gratuitement à des protections hygiéniques. Concrètement, l’implémentation de cette nouvelle disposition législative passera par la mise à disposition dans les établissements scolaires et universitaires de protections périodiques dans les toilettes via des distributeurs mais également par la possibilité pour le gouvernement d’imposer aux organismes publics la fourniture gratuite de ces produits d’hygiène.
Suivant le mouvement, d’autres pays européens comme l’Angleterre ou encore la France ont pris des mesures en ce sens.
Au sein de l'Union Européenne, il n'est pas possible de porter le taux de TVA à 0% sur les produits d’hygiène menstruelle, en raison de la directive européenne 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, qui impose au minimum un taux de 5%. Le Royaume-Uni, à sa sortie de l’Union Européenne, a donc suivi la voie de nombreux autres pays, comme les Etats-Unis, l’Australie ou l’Inde, en supprimant la « taxe tampon ».
En France, Frédérique Vidal, alors ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, avait annoncé début 2021 la mise à disposition gratuite de protections hygiéniques pour les étudiantes. Ainsi, à la fin de l’année scolaire ont été mis en place, dans les résidences CROUS et les services de santé universitaires, des distributeurs de protections hygiéniques gratuites et respectueuses de l’environnement.
Depuis septembre 2021, ce sont maintenant tous les campus universitaires qui en sont dotés. Dans la même dynamique, Elisabeth Borne a annoncé le remboursement par la sécurité sociale des protections périodiques réutilisables pour les moins de 25 ans, en pharmacie et sans ordonnance dès 2024.
Si des progrès notables dans le domaine de la lutte contre la précarité menstruelle sont ainsi à saluer, la question de la sécurité sanitaire des protections intimes reste un sujet très peu abordé, qui touche pourtant directement la santé des femmes.
La sécurité sanitaire des produits d’hygiène menstruelle
Suite à la saisie de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) par les ministères de la santé et de l’économie, sur la sécurité des protections intimes, celle-ci s’est prononcée à la fois sur la présence de substances chimiques mais également sur les risques de syndrome du choc toxique menstruel (SCT).
Concluant à la présence de substances chimiques indésirables dans des concentrations ne présentant pas de risque pour la santé, l’agence réfute le lien supposé entre la présence de ces substances et le syndrome du choc toxique.
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Le syndrome du choc toxique est une maladie aigue grave pouvant survenir au cours des règles lors d’utilisation de dispositifs vaginaux. Il est provoqué par la présence de la toxine TSST-1 produite par le staphylocoque doré déjà présent dans le corps de la personne, et peut entrainer une défaillance des organes, le coma, l’amputation, voir le décès de la personne. Il constitue le principal risque lié au port de protections hygiéniques internes (tampons et coupes menstruelles).
En France chaque année une vingtaine de cas sont recensés, mais les difficultés de diagnostic et l’absence de déclaration obligatoire des cas de SCT, rendent incertaines les statistiques.
Les conclusions de l’Anses, tout comme celle d’une étude menée par des chercheurs du Centre international de recherche en infectiologie de Lyon et du Centre national de référence des staphylocoques, indiquent que ce risque microbiologique est essentiellement lié aux mauvaises conditions d’utilisation, comme une durée de port trop long, un niveau d’absorption et une taille inadaptée des protections.
Une information claire et plus visible de la part des fabricants mais également des pouvoirs publics s’avère donc nécessaire pour prévenir l’apparition de ce syndrome, d’autant plus que la pathologie reste difficilement détectable, faute d’études, de statistiques et de formation des professionnels de santé sur le sujet.
En outre, l’Anses recommande l’adoption d’un cadre réglementaire plus restrictif à l’échelle européenne, afin de réduire la présence de ces substances chimiques dans les protections intimes.
Ainsi, si au cours de la dernière décennie, les pouvoirs publics se sont saisis de la question de l’hygiène menstruelle dans certains pays, ils restent malheureusement minoritaires à l’échelle mondiale. L’éducation, l’information et la prévention sont essentielles à la lutte pour une meilleure hygiène menstruelle et santé des femmes. Dans de nombreux pays, des moyens financiers doivent être impérativement alloués aux infrastructures et à l’accès aux produits d’hygiène menstruelle. Les comités internationaux, tels que le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), ont sûrement ici un rôle à jouer.
Clémentine Durand-Malpel
Étudiante du Master Comparative Health Law
Sources
Socio- Anthropologue de la santé.
1 ansLa journée du 28 mai est une journée a pour but de briser le silence autour des règles, de lutter contre la stigmatisation qui leur est souvent associée et de sensibiliser l’opinion à l’importance de l’hygiène menstruelle pour les femmes et les filles du monde entier. C’est une occasion de souligner l’importance des soins menstruels pour les femmes et les filles et de sensibiliser les gens aux problèmes auxquels sont confrontées celles qui n’ont pas accès à des produits d’hygiène.