L'élite qui danse avec les loups
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L'élite qui danse avec les loups

"L'homme de pouvoir est détruit par le pouvoir, l'homme d'argent par l'argent, l'homme servile par la servilité, l'homme de plaisir par le plaisir. Ainsi le Loup des steppes fut-il détruit par sa liberté" (Le loup de steppes, Hermann Hesse, 1927). 

Comment donc vivre ? Comment se comporter ? A quoi s'orienter ? 

En ne pas s'attachant à un but, à une croyance, à un seul chemin. En ne pas mettant sur un socle une façon de vivre qui sera la seule et unique orientation pour le reste de la vie. En gardant son esprit critique et en ajustant ses choix quand le temps est mur. Savoir saisir le moment pour agir. Hermann Hesse, dans son contexte historique où l'idéologie nazi était en train de naître, alertait notamment de l’idolâtrie.

Comment appliquer ces conseils dans monde de l'entreprise ?

En ce moment, nous nous trouvons dans une époque de transformation liée à des grands changements technologiques et sociétales qui vont main dans la main. La liberté d'expression et l'accessibilité à toute sorte d'information grâce à Internet met en question les hiérarchies. La journaliste Laure Belot a appelé ce phénomène "La déconnexion des élites" (son bestseller porte le même nom). Il y a en effet une population parmi ceux qu'on appelle l'élite à cause de leur niveau de formation dans des écoles prestigieuses qui ne peut plus s'appuyer sur un savoir ou sur des méthodes auxquels d'autres personnes n'auraient pas accès. Les moyens de pression et de contrôle ne marchent de moins en moins à partir du moment que le CDI à vie n'est plus un objectif des salariés. Le management ne convient pas ? La conséquence : "Je pars".

On s'en passe des chefs ? 

On ne peut pas. L'espèce humaine a un fonctionnement social de groupe qui nécessite une minorité qui indique la direction à prendre. Nous sommes un peu comme des loups, nous aussi. Nous sommes majoritairement des suiveurs.

La direction à prendre et les chemins à emprunter pour y arriver sont à redéfinir par les personnes qui souhaitent avoir une responsabilité et un impact dans le monde à venir. J'appelle ces personnes "la nouvelle élite". 

Pour moi, la définition de l'élite est la minorité qui apporte à la société ce dont elle a besoin à un moment donné. L'élite du XXème siècle du monde occidental a répondu à ce que la société à réclamé : la consommation de masse. La société doit reconnaître les efforts d'une élite qui a rendu possible ce dont la majorité de la population a profité : la production de masse. La société de consommation a pu durer car il y a avait une sorte d'équilibre, malgré l'insatisfaction déclarée. Une constellation sociale a fonctionné pendant longtemps, c'est un fait. Et il est un fait aussi qu'un grand nombre de ceux qui font partie de l'élite s'est déchirée, elle aussi, à un point de négliger leurs propres besoins humains. Quand il y a un manque sur ce plan-là, la responsabilité et une vie dédiée au travail est une corvée pour tous.

Avec l'évolution du consommateur et la conscience écologique et éthique qui a évolué grâce à la transparence d'information et des possibilités d'agir sur Internet, la consommation de masse n'est plus un but. 

Quel est le rôle de l'élite ?

La nouvelle élite doit apporter à la société ce dont elle a besoin demain. Pour cela, elle doit se transformer et adopter un nouveau style de leadership pour être acceptée par une société qui n'accepte plus les hiérarchies formelles. Dans une société qui a envie de sortir de la consommation de masse, l'argent ne sera d'ailleurs plus nécessaire pour faire partie d'une élite. C'est les idées, la responsabilité, la personnalité qui comptent.

A mon avis, la transformation de l'élite sera enthousiasmante pour ceux qui osent être l'avant-garde. Ce sera un temps dédié à la création et à l'action (comme aux temps de l'invention des avions par exemple), où il y aura de la place pour des véritables personnalités qui marquent l'histoire.

La minorité qui a le courage de prendre en main l'avenir de la société va devoir danser avec les loups. Reniflez ! Ça ne sent pas un peu la liberté ?

Gilles Donada

Journaliste au quotidien La Croix. Créateur de Croire, le podcast la Croix de l'aventure intérieure.

6 ans

Bravo, très inspirant !

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