La Côte d'Ivoire scrute 2020; quelles attentes?

L’histoire en général, et celle politique en particulier, est dynamique. Elle évolue sous l’effet des événements de la planète d’une part, et selon les faits et les aspirations au sein des populations d’autre part.

L’histoire politique de la Côte d’Ivoire n’est donc pas en reste. Elle est en perpétuel mouvement depuis les temps coloniaux jusqu’à nos jours. On peut cependant la scinder en trois grandes parties :

1- La Côte d’Ivoire Coloniale, territoire de l’Afrique Occidentale Française (AOF),

2- La Côte d’Ivoire indépendante sous le régime du parti unique (PDCI-RDA),

3- La Côte d’Ivoire de retour au multipartisme à partir de 1990 et celle après Félix Houphouët-Boigny.

A peine trois ans après le retour au multipartisme, le pays sera frappé par le décès de celui qui, pour beaucoup d’ivoiriens, est l’artisan principal de la Côte d’Ivoire moderne. Sa succession se nourrit de commentaires et de situations inédites pour les populations et depuis 1993 à ce jour le pays a connu trois différents présidents avec des fortunes diverses.

Mais peut-on parler d’alternances depuis 1993 ?

« L’alternance se définit comme la succession dans le temps et dans l’espace selon un ordre régulier. Dans le cadre purement politique, elle est le passage au pouvoir d’une tendance politique à une autre, ou la succession régulière de partis ou de coalition de partis dans le cadre des institutions existantes » (dictionnaire français Larousse).

Il est donc clair qu’il y a eu alternance politique en Côte d’Ivoire depuis 1993. Les successions ont été plus ou moins opérées selon les périodes prévues, sauf 2005, et validées par les institutions. Les contextes des changements ont été souvent douloureux, mais chacun a marqué d’une façon ou d’une autre son passage au sommet du pouvoir d’Etat. Cependant, des questions subsistent. La grande masse de la population a-t-elle vraiment senti une différence fondamentale dans les politiques menées ? Quelles retombées réelles (améliorations conditions de vie, évolution qualitative des mentalités, etc.) a-t-elle récoltées dans ces changements ?

Sans vouloir établir une comparaison entre le bilan des différents présidents successifs, jetons un coup d’œil sur celui du président au pouvoir actuellement. Son bilan assez intéressant est loin d’atteindre la satisfaction des populations et le chapelet de promesses qu’il avait annoncées lui-même avant et à son arrivée au pouvoir.

Ses réussites sont nombreuses : Il a repositionné la Côte d’Ivoire au niveau international (au niveau diplomatique, au niveau des institutions de Bretton Woods, au niveau des investisseurs et financiers extérieurs, etc.). Il a achevé et entrepris des chantiers d’infrastructures.

Mais les attentes non satisfaites ne sont pas négligeables non plus : La réconciliation pour une cohésion sociale retrouvée reste en panne. La politique sociale (notamment la santé, l’éducation, l’emploi) reste le parent pauvre de sa politique générale. La corruption, l’insécurité, les détournements de deniers publics, l’incivisme, etc. demeurent des plaies béantes de notre société.

Et c’est dans ces conditions que les ivoiriens ont les yeux tournés vers l’horizon 2020 ; alternance ou continuité ?

Désormais, les trois leaders qui font la pluie et le beau temps sont passés au pouvoir. Ils sont d’un âge assez avancé, même si cela n’est plus un handicap pour concourir. On parle maintenant d’alternance générationnelle. On remarque que la génération 1950 est encore au contrôle du pouvoir tandis que leurs successeurs qui sont déjà bousculés et traités de vieux, attendent leur tour. La génération 1950-1970, génération politiquement sacrifiée (la grande majorité), espère trouver une occasion pour enfin s’installer. Mais la génération 1970-1990 et après, pense que les générations précédentes n’ont pas atteint les objectifs auxquels le peuple était en droit de s’attendre et réclame donc le pouvoir. Ce sont des jeunes prétendants aux dents longues qui frappent donc à la porte parce qu’il y a besoin de vivre autre chose que ce qui a été vécu ces dernières décennies.

Et puis 2020 apparaît véritablement comme la fin de la longue période de crise et l’ouverture sur une ère nouvelle. Depuis le décès de Félix Houphouët-Boigny, c’est dans un esprit de conflit larvé qu’on aborde l’élection présidentielle avec les oppositions Gbagbo-Ouattara-Bédié animées par leurs hommes de terrain.

Mais aujourd’hui, au-delà de tous les clivages, l’enjeu se veut être autre chose. Il peut se décliner, sans être exhaustif, en quatre points en sus des points positifs actuels :

1- Réconciliation, cohésion sociale pour l’édification d’une nouvelle unité nationale et la reprise de la construction de la nation au détriment des cloisonnements ethniques et régionaux,

2- Nouvelle vision économique en donnant la prééminence à la promotion d’un tissu économique endogène soutenu par les pouvoirs publics en vue d’entreprendre la transformation de nos matières premières, ne serait-ce qu’en produits semi-finis avant l’export,

3- Nouvelle stratégie de lutte contre l’insécurité tant interne qu’externe,

4- Nouvelle politique générale, notamment : administration, Ecole, santé et emploi, formation d’un nouvel esprit civique, lutte contre la corruption etc.

Pour ce faire, les seuls critères à prendre en compte qui réuniront les ivoiriens dans une seule et même ambition seront ; intégrité, amour de la patrie et de ses peuples, inclusion nationale de la diversité.

Octobre 2020 arrivera sûrement et notre avenir commun sera le fruit de notre intelligence et de notre sagesse à comprendre et à mettre l’intérêt national au-dessus de toutes considérations. Arrêtons de faire peur, mais réapprenons à nous tendre une main amicale dans la tolérance et la fraternité. Nous ne sommes qu’en compétition et non en guerre et parce que chacun a un projet pour le peuple de Côte d’Ivoire, donnons-lui le pouvoir de choisir librement celui qu’il aura adopté. Paix sur le carré magique.

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